[ Séries TV ]

Il n’y pas que le Cinéma dans la vie.. y’a aussi quelques séries TV…



samedi 26 novembre 2011


The Walking Dead
posté par Professor Ludovico

The Walking Dead, c’est d’abord une excellente série BD, qui en est déjà à son 13ème volume en France. C’est maintenant une série sur Orange Cinéchoc et en DVD. Les deux séries partagent les mêmes qualités, dont la principale est de renouveler la thématique, plutôt ado-régressive, des zombies. The Walking Dead joue en effet la carte du réalisme plutôt que celle du genre : plutôt que la carte supermarché-blonde écervelée-hélicoptère salvateur, la série se propose de jouer la carte Après. Comment survit-on dans un monde post-apocalyptique : comment manger, dormir, aimer, alors que la mort règne partout. Cet aspect-la des deux séries les rendent particulièrement passionnantes, comme si l’ont explorait un territoire vierge. Il justifie à lui seul de découvrir cet univers.

Le seul reproche que l’on puisse adresser à The Walking Dead, (et ce qui suit va m’attirer les foudres de Rupelien et Ludo Fulci, qui dirigent, comme chacun sait, la Direction Bandes Dessinées d’une grande entreprise française de loisirs), c’est son côté « gentillet ».

C’est quoi « être gentillet » ? C’est partager une vision naïve, , idéaliste, irréaliste de la vie. Garder une forme de foi boy-scout en l’humanité. Et ça n’a rien à voir avec le genre. Prenons par exemple la sitcom. Friends et Seinfeld évoquent le quotidien de trentenaires new-yorkais et bourgeois… Mais l’une est gentillette, l’autre pas. Pourquoi ? Si les personnages de Friends font preuve de défauts très communs, (bêtise, avarice, égoïsme…), mais à la fin de chaque épisode, ils montrent une vraie volonté de réparer les dégâts causés, de s’améliorer, de grandir. On conviendra que cette posture est peu réaliste, et éloignée de la nature humaine traditionnelle. A l’opposé, les personnages de Seinfeld sont très semblables : avares, idiots, égoïstes, mais rien ne viendra jamais compenser cette attitude. Comme chez Kubrick, l’homme est, sans happy end rédempteur.

Il n’y a pas de happy end rédempteur dans Walking Dead, mais on est loin quand même de La Route. Dans cette Amérique livrée aux morts vivants, il y a certes de la place pour le réalisme : supprimer un ami infecté, par exemple, ou poursuivre dans la racisme et l’intolérance alors que la communauté humaine, réduite, devrait plutôt resserrer les rangs. Mais la BD et la série laisse tous les deux places à des rédemptions très américaines, qui sonnent comme autant de fausses notes dans cette belle symphonie : le gang latino qui s’occupe de l’hospice de vieux dans l’épisode 4 en est un bon exemple…
Que cela ne vous décourage de dévorer The Walking Dead, BD ou TV, car la série reste à ce jour la seule tentative sérieuse de film de zombies.

Rien que pour ça, debout les morts !




jeudi 10 novembre 2011


Le style Fontana
posté par Professor Ludovico

Au début des Borgia, j’avais laissé entendre que Tom Fontana, le créateur de la Cérihévéneman de Canal+, avait seulement griffonné quelques idées sur le papier et était ensuite parti avec la caisse.

Il semble qu’il ait fait un peu plus que cela : après dix épisodes des « Aventures d’Alexandre VI », on ne peut s’empêcher de constater les similarités avec Oz, le chef d’œuvre de Mr Fontana. Est-ce que son style carcéral (grosses burnes, sexe contrarié et violence à tous les étages) s’applique aux luttes de pouvoir dans la Renaissance Italienne, That is the Question….

Le showrunner tatoué traite en effet ses personnages comme des détenus : Château Saint Ange ou Emerald City, c’est pareil. Il les fait jaillir en permanence face à l’écran, souvent filmés grand angle (ça agrandit le décor à peu de frais, et ça rend les personnages légèrement anxiogènes) Le plus souvent, iles jouent la même scène : menacer un membre de la famille Borgia puis s’en prendre une en retour.

Ces effets de manche, très efficaces dans le confinement de la prison contemporaine de Oz, trouvent ici leurs limites. D’abord parce que l’histoire des Borgia est plus subtile que ça, comme on le comprend dans l’épisode 10 : pour battre Charles VIII, le Roi de France, le paladin sans peur et sans reproche, Alexandre VI ne peut faire appel qu’à la ruse : gagner, mais sans jamais combattre. Dans ce contexte, faire hurler en permanence les acteurs des Borgia n’a pas de sens, ne permet pas de les différencier, de comprendre leurs enjeux, ou de leur donner la moindre épaisseur. On retrouve ce sens de la caricature dans Oz, et ça s’y prête bien : des gangs s’affrontent (Bikers, Latinos, Noirs, Aryens…) : la caricature permet de les différencier. Mais là, traiter les Medici ou les Orsini comme de vulgaires condottieres ne satisfait pas nos regards européens, qui ont toujours un minimum de culture historique dans la tête. Autres exemples, les combats de rue, ou les français qui défilent au pas dans Rome sont ridicules, parce que c’est un Américain qui les regarde ainsi…

Fontana est un grand Showrunner, mais il ne sait pas tout faire…

PS on notera a contrario un personnage enfin correctement caractérisé : Charles VIII, joué par un acteur incroyable (impossible de trouver son nom sur IMdB), et qui met tout le monde d’accord dans ces deux derniers épisodes…

PS2 on a retrouvé, il s’agit de Simon Larvaron, un jeune comédien de 23 ans, de Cholet , qui interprète le rôle de Charles VIII.




mardi 11 octobre 2011


Borgia
posté par Professor Ludovico

C’est parti pour la série événement de Canal+. Ils sont forts chez Canal, ils ne font pas de série non-événement ! Mafiosa, Braquo, Borgia : même combat. Pour cette dernière, on y a cru pendant vingt secondes, jusqu’au générique… une histoire fantastique (les Borgia, ou la famille Adams au Vatican), Mr Fontana (Oz) au scénario, son compère Barry Levinson à la production (Homicide, Oz et quelques petits films comme Rain Man ou Good Morning Vietnam), Oliver Hirschbiegel (La Chute) à la réalisation : on va voir ce qu’on va voir.

En fait, on a vu le générique, et on a compris. Un générique, c’est beaucoup d’argent, une musique entraînante, et normalement, le concept de la série : les magnifiques envolées mécaniques de Game of Thrones, le blues poisseux des Sopranos, le corbeau de Six Feet Under, ou l’Homme qui Tombe des Mad Men.

Le générique des Borgia est flou, filmé derrière un vitrail, sur une musique Bontempi, où l’on devine plutôt que l’on ne voit les turpitudes promises au téléspectateur : du cul, de la violence, et encore un peu de cul.

Car avec les Tudors, la télé a découvert le Graal : avec une caution culturello-historique (« Oui, c’est vrai, je me passionne pour l’époque élisabéthaine »), je peux mater un peu de fesse et beaucoup de baston. C’est quand même plus valorisant que de regarder Captain America (où, en plus, y’a pas pas de fesse)…

Qu’est venu faire Fontana dans cette galère ? Prendre l’argent des frenchies, bien sûr, qui ne savent pas faire la différence entre un show télé réussi et une daube. Fontana a écrit Borgia pendant la mi-temps du Superbowl, et Rodolphe Belmer s’est extasié : tremendous job, Tom ! Pendant ce temps-là, Levinson comptait les billets.

Pourtant Borgia, version Fontana, c’est ce que le Professore appelle le Cinéma Epinal, comme les images du même nom. On enchaîne les clichés comme des perles, et on dit que ca fait un épisode. Ce qui est bien avec les Borgia, les vrais, c’est qu’il y a de quoi enfiler. Inceste, trahison, simonie, on peut faire dix saisons sans se forcer. Mais on ne saura rien des motivations des principaux personnages, de leur étrange rapport à la religion et au pouvoir. Rien ne sera expliqué sur la sauvagerie de l’époque, et la série, elle-même, n’a pas de méta-enjeu…*

Il nous reste l’autre Borgia, celui de Showtime, qui traine sur un disque dur quelque part, puisque Canal+ l’a acheté pour empêcher sa diffusion française. Quant à ces Borgia-là, nous y retournerons lundi prochain. Eh oui, je me passionne pour la Renaissance italienne…

* quelques exemples : « Nate peut-il devenir adulte ? » dans Six Feet Under, « Tony Soprano va-t-il devenir quelqu’un de bien ? » dans les Sopranos, « Qui va sortir de prison ? » dans Oz.




vendredi 30 septembre 2011


Le Trône de Fer, part 2
posté par Professor Ludovico

Avec Le Trône de Fer, on n’est pas au bout de nos surprises. Même si l’on a bien compris le cocktail (sexe + combats à l’épée), on tombe sur un joyau à chaque épisode. Ainsi, hier, épisode 5 : une longue scène entre M. et Mme Baratheon, Roi et Reine des 7 Couronnes. Ils se haïssent, et leur mariage fut arrangé, il y a dix sept ans de cela, pour garantir la paix du royaume.

Eh bien David Benioff et Daniel B. Weiss, les concepteurs de la série, nous ont offert une scène de vieux couple d’anthologie : un mari et une femme qui se détestent, qui rêvent de s’assassiner mutuellement, mais qui se respectent. Portée par deux excellents acteurs (Mark Addy et Lena Headey), cette longue scène, digne des Sopranos, a fini par nous faire oublier les châteaux, les dragons, et les barbares en slip.

Chapeau bas messieurs.




lundi 26 septembre 2011


Game of Thrones (Le Trône de Fer)
posté par Professor Ludovico

J’entretiens une relation bizarre avec l’Heroic Fantasy. Ado, je ne lisais que de la SF, et n’étais que plein de mépris pour ce sous-genre : Conan le barbare, non merci ! Puis des copains de lycée, en 1981, revinrent de Paris avec des dés multicolores à huit, douze, vingt faces. Ils les lancèrent sur le trottoir, avec d’étranges imprécations : « 17 ? Tu rates mon mago, il réplique avec une fireball : 3d6 de dommages ! »

Complètement fasciné, je tentais une percée :
C’est quoi, ça ?
– C’est Donjons et Dragons et c’est interdit aux mecs qui ont pas lu Tolkien…

Sur cette sèche admonestation, je me procurais Le Seigneur des Anneaux, et surtout aussi l’anthologie « La Citadelle Ecarlate » ; Fritz Leiber, Robert E Howard, Clark Ashton Smith.

Ce fut une révélation : il existait donc une littérature qui tenait la route sur les dragons, les elfes, et autres barbares cimmériens en short.

Mais bon.

Côté cinéma, ce n’était pas le même sourire, comme dirait le Professorino. D’abord, il y avait peu de films, et ensuite, ils étaient mauvais. Conan sortait du lot, mais ce n’était pas un chef d’œuvre, loin de là. Le Seigneur des Anneaux, version dessin animé par Ralph Bashki, était pour sa part le chef d’œuvre maudit. Interdit par la famille Tolkien, pour irrespect de l’œuvre, il n’existait qu’à moitié.

De plus en plus rôliste, je devins paradoxalement de moins en moins lecteur du genre. Comme si le jeu de rôle absorbait toutes les ressources possibles de mon imagination en la matière. Le jeu de rôle, comme chacun sait, c’est l’héroïne du monde des loisirs, la lecture n’étant à côté qu’un amusant passe-temps pour fumeur de cannabis. Quand on joue dans ces univers d’Heroic Fantasy, pourquoi perdre son temps à en lire ? Surtout que c’est souvent bourré de clichés : princesses elfes diaphanes, épée perdue+brisée+ reforgée, et orcs en maraude dans les Montagnes Grises. Bref, du sous-Tolkien, de surcroît, très mal écrit.

Puis vint Le Trône de Fer. J’offris le livre à mon ami Philippe , car dès les premières pages, il était patent que Game of Thrones, c’était le dessus du panier ; bien écrit, formidablement traduit, ambitieux dans les thèmes, les situations. On était dans de la low fantasy, c’est à dire un monde où la magie est peu présente, où il n’y a pas des magiciens et des dragons à chaque coin de rue.

Ce fut une révélation pour lui ; il le lut, le relut, et le fit lire à toute notre Ligue de Donjonneurs Extraordinaires. Je le lus aussi et reconnu bien volontiers les qualités du livre, mais ça me m’incita pas pour autant à lire les 12 autres volumes (série en cours).

C’était fini. Je ne lirais plus d’Heroic Fantasy.

Mais quand vint le projet de série, via l’extraordinaire HBO, mon sang ne fit qu’un tour. Perdre des journées à lire l’interminable saga de George R Martin, non, mais perdre quelque soirées pour la regarder à la télé, oui.

C’est chose faite. Le Trône de Fer passe sur Orange Cinéchoc, et j’ai commencé à regarder, et je ne suis pas déçu. La série fait preuve de tant de qualités, scénaristiques, décoratives, et de mise en scène, que c’en est un miracle en soi. Certes, le Seigneur des Anneaux a permis ce miracle, en démontrant que la Nation Geek, désormais quadragénaire, détenait les cordons de la bourse, et était donc arrivée au pouvoir, mais là, le Trône de Fer est carrément au dessus. Les Rois Maudits + Le Seigneur Des Anneaux, en 10 épisodes, ça ne se rate pas !

De quoi parle donc le Trône de Fer ? Sur une Angleterre médiévale de fantasy, des familles se battent pour le pouvoir suprême : le trône de fer. Les Lannister, les Greyjoy, les Stark, s’assassinent à tout va pour s’emparer du trône. Pour le moment, c’est Robert Baratheon qui règne, mais les dagues s’affûtent dans la nuit. Et un danger guette : l’hiver arrive. Car dans ce monde, les saisons peuvent durer des années, et menacer de famine des territoires entiers. Pire, les sauvageons, et les Marcheurs Blancs, créatures terrifiantes qui vivent au-delà du Mur, gigantesque forteresse de glace façon Mur d’Hadrien, menacent d’envahir le sud.

Pour tout dire, on pense à Dune : intrigues de hauts niveaux, princes fins politiques, enjeux de pouvoir, menaces dans la nuit, etc.

La gageure réussie par HBO, c’est de respecter cette ambition alors que d’autres se seraient contentés de combats de chevaliers, de dragons en images de synthèse, et de jeunes filles en short rouge.

Vous qui n’êtes pas client, jetez au moins un regard sur le pilote du Trône. Peut être que l’Heroic Fantasy, finalement, c’est fait pour vous ?




dimanche 25 septembre 2011


Mad Men, saison 4
posté par Professor Ludovico

Quelle série est capable aujourd’hui de vous mettre une claque à la fin de chaque épisode ? Quelle série peut, sur un seul plan, sur une seule musique, vous mettre à plat, sans esbroufe, sans effet de manche ?

Il n’y en a qu’une.

Cette série, c’est Mad Men, qui continue son parcours impeccable. Une série tellement géniale qu’elle n’a même pas besoin de se renouveler. Qu’elle peut broder ses saisons, les unes après les autres, comme une Tapisserie de Bayeux sixties, sur le même contexte, sur les mêmes intrigues, sur les mêmes personnages, sans jamais lasser…

Mad Men, sûre d’elle-même et dominatrice…




mardi 13 septembre 2011


Mad Men, Saison 4
posté par Professor Ludovico

Mad Men, c’est reparti. Nos « hommes fous » sont de retour, ou plutôt, nos hommes de Madison Avenue. Nouveau décor, mais intrigues habituelles : tout change et rien ne change dans le New York 1964 de nos héros.

Ni la qualité intrinsèque de la série, toujours au top (so far). A l’instar de l’épisode 1, qui commence in media res, au milieu de l’action pour ceux qui ne parlent pas italien, et compte sur l’intelligence du spectateur pour combler les trous.

Tout le contraire de la publicité, finalement.




samedi 10 septembre 2011


Platane
posté par Professor Ludovico

J’ai beau me forcer, Eric et Ramzy ne me font pas rire. Je vois le principe dans H, mais je ne ris pas. Je comprends l’absurdité qui préside à Steak, mais je n’ai pas envie d’y aller.

L’humour, c’est vraiment une question de génération. Pierre Dac ne nous fait pas rire, et mes enfants ne comprendront pas Desproges. C’est aussi pourquoi le rire, et les comiques en général ne sont pas artistiquement reconnus comme les tragédies : ils ne sont pas éternels, ils n’auront jamais la postérité pour eux. Pourtant c’est très difficile de faire rire, beaucoup plus difficile que de faire pleurer.

J’ai donc essayé Platane, sous l’influence de la méga promo, et pour les beaux yeux cendrés de Monica Bellucci au Grand Journal.

Malgré les efforts louables (qualité technique, originalité), je n’ai pas marché… L’argument est louable : au moment où Eric et Ramzy lance une suite à H, Eric percute un platane et sombre dans le coma. Il se réveille un an après, la série a continué sans lui (et l’intérêt de Platane est bien dans la satire de Canal+ et du monde du cinéma) Le voilà obligé de se trouver un nouveau projet… Mais évidemment, ce n’est pas une sinécure, car Eric n’est pas si sympa qu’il en a l’air…

Je tenterais une deuxième incursion, mais je ne vous promets rien…




lundi 18 juillet 2011


A la Maison Blanche, season finale
posté par Professor Ludovico

Voilà, c’est fini. (Je ne sais pas ce qui m’arrive, j’ai l’impression que Jean-Louis Aubert a pris le contrôle de mon cerveau). Mais c’est vrai, The West Wing, c’est fini, après sept années de bons et loyaux services, deux mandats Bartlet, et 155 épisodes : la Maison Blanche a occupé 108h de nos vies.

C’est la force des séries.

Un film peut vous envahir, vous suivre toute la vie, mais c’est rare. Une série est là chaque semaine, et les personnages deviennent vos amis, vos frères, vos amants. Tant et si bien qu’on reluque Dona Moss, qu’on admire CJ Cregg, et qu’on voudrait faire le même boulot que Josh Lyman, mais qu’on a du mal à citer les comédiens (Janel Moloney, Allison Janney, Bradley Whitford)…

Si A la Maison Blanche est immense succès, c’est d’abord parce qu’elle a su durer, et surtout se terminer en beauté, ce qui distingue le chef d’œuvre télé du vulgum pecus, comme nous l’avions expliqué ici.

Ce dernier épisode en est l’exemple même. Sans abuser de sa position de force : en 42 mn, comme les autres épisodes, (pas d’épisode double comme dans d’autres séries), A La Maison Blanche va tirer son bouquet final. Au menu, l’arrivée d’une nouvelle administration (un candidat a gagné, je ne vous dirais pas qui !), et le départ de l’administration Bartlet. Il y a déjà de quoi dire, dans cette transition extrêmement brutale, où l’on enlève toute trace de l’ancien président en quelques heures, et où une équipe s’installe, cartons à la main, pendant le même temps. Mais A La Maison Blanche ne perd pas son côté Cheese Burger extra large, puisqu’il y associe d’autres intrigues : l’adaptation de la famille du nouveau président (et les consignes de sécurité afférentes) et une dernière et douloureuse décision à prendre pour le Président Bartlet. Mais surtout, l’épisode joue avec la nostalgie. C’est nous aussi qui quittons l’aile ouest de la Maison Blanche, et la série, très malignement, nous repasse dans toutes les pièces, et nous représente une dernière fois les personnages, mêmes les plus insignifiants…

Un dernier épisode beau et triste à la fois, qui vient clôturer une histoire d’amour qui dure depuis sept ans, entre le public américain et cette série. Car même si les audiences ont fini par chuter, The West Wing est restée une valeur sûre auprès des CSP+, et donc un aimant à spots publicitaires.

C’est l’incroyable coup de poker tenté par Aaron Sorkin : faire une série pédagogique, haut de gamme, démocrate, à une heure de grande écoute sur une des Big Four : NBC. Et ce, en plein règne républicain, 11 septembre, War on Terror, Irak et Afghanistan. On peut même avancer que cette série fut un baume au cœur des démocrates pendant ces huit années. Une autre présidence était possible : là, à la télé ! Martin Sheen, l’homme, fut parmi les premiers à dénoncer la politique de Bush, comme s’il incarnait, dans la réalité cette fois, le Président Bartlet. Ce coup de poker, Sorkin l’a réussi en attaquant l’Amérique par son point faible : le feelgood movie.

Car ce qui peut apparaître insupportable au néophyte, dans les premiers épisodes de The West Wing, c’est en fait sa force : cette insupportable naïveté, cette beauté, tant intérieure qu’extérieure, des personnages. Dans The West Wing, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Comme par hasard, A la Maison Blanche se positionne comme l’anti-24, la série réac et républicaine de la Fox. Le Président est têtu, et colérique, mais il est juste et brillant. Ses collaborateurs sont beaux et idéalistes. Tellement travailleurs qu’ils n’ont même pas le temps de baiser leur secrétaire (ça viendra) Il n’ont pour idéal que la République et l’Amérique. Même les républicains sont des gens bien.

On pourrait sourire, nous les français sarcastiques, devant tant de patriotisme niais. Mais est-on si différent ? Le Professsore se permet d’avancer ici sa théorie fétiche sur les rapports USA-France : si l’on se déteste et l’on s’apprécie autant, c’est peut-être qu’on est pareils, non ? Car en cette période de 14 juillet, comment nier l’évidence ? Qui continue (seul pays en Europe, à notre connaissance) à faire défiler ses soldats le jour de la fête nationale ? Qui fait un drame quand une politique en conteste le bien-fondé ? Ou que trois footballeurs ne chantent pas la Marseillaise ? Qui veut exporter dans le monde entier son TGV, son paquebot France, son Rafale, son Minitel, ou sa filière hippique ? Qui est aussi fière d’elle-même, de son histoire, même la plus ténébreuse (Napoléon) ? Qui ? L’Amérique évidemment, qui croit dur comme fer en sa « Destinée Manifeste ». Il y a cent ans, nous gouvernions le monde, avec les anglais. Qui croit encore pouvoir le gouverner ? Nous, pas les anglais.

Sorkin, en jouant à la fois de la fibre patriote, et du mélo, s’est tout simplement ouvert les portes d’une des plus grandes chaînes US. Ensuite, il a braqué l’épicière et fait tout ce qu’il voulait, c’est à dire une formidable leçon de politique, de diplomatie, d’économie, étalée sur un cursus de 7 ans, en 155 leçons de 40mn.

Prix du pétrole, rôle du sénat, liens sordides avec l’Arabie Saoudite, 11 septembre, obstruction parlementaire, Israël, Minutemen, Filibustering, Projection Mercator, 5ème amendement, Cour Suprême, Primaire du New Hampshire, manipulation des journalistes… Dans chaque épisode, A la Maison Blanche abordait au moins deux de ces sujets, parfois très ardus, et les rendait simples. Une formidable leçon de télévision.

Au delà de l’ambition énorme de The West Wing, sa réussite s’explique par une maestria incroyable des codes télévisuels, maîtrisés aussi bien par le père géniteur (Aaron Sorkin), que la famille d’accueil (John Wells, devenu showrunner après le burn-out de Sorkin)

En créant ces personnages formidables (les 5 « Bartlet Men » d’origine (Leo, Josh, Toby, CJ, Sam), en sachant gérer les départs de stars (Rob Lowe, pourtant l’As de cœur de la saison 1, par Joshua Malina), en sachant faire monter ou descendre alternativement des personnages (Charlie et Zoey), A La Maison Blanche a réussi là où beaucoup ont échoué (Lost, 24…)

Mais surtout, ultime tabou, les producteurs/scénaristes de The West Wing ont osé briser le moule originel de la série, respectant en cela le rythme des institutions américaines. Puisque Bartlet ne pouvait être réélu, son personnage devait céder la place à un autre personnage principal, le candidat démocrate Matt Santos (formidable Jimmy Smits revenu d’entre les morts de NYPD Blue) et son tout nouveau conseiller, Josh Lyman. Oser propulser un des seconds rôles sur le devant de la scène, créer un nouveau personnage principal, mettre dans l’ombre (tout en les conservant à proximité) le reste du cast, voilà le chef d’œuvre de mécanique de précision qu’a réussi A la Maison Blanche*.

Aura-t-on le courage, un jour, de revoir tout The West Wing ? On ne sait.

Il le faudrait, pourtant.

*On imagine les négociations interminables avec les acteurs, si chatouilleux de leurs précieuses secondes d’apparition à l’écran.




lundi 27 juin 2011


A La Maison Blanche
posté par Professor Ludovico

Formidable A La Maison Blanche ! La dernière saison brille de mille feux… Avant-hier, un épisode sur… le serrage de mains !!

Pendant la campagne, les candidats serrent des milliers de mains… Jusqu’à l’accident ! Comment gérer ça ? Pas de soins (le candidat avec un plâtre, ça ferait infirme), silence complet (pour éviter les sarcasmes du camp d’en face) : A la Maison Blanche a beau être une série gentillette, elle ne zappe pas les absurdités, et les compromissions, d’une campagne.

Ainsi hier, un autre épisode, sur le rythme frénétique, absurde, des derniers jours de campagne: pour gagner le candidat doit enchaîner 5 états le même jour. Et ânonner les mêmes messages (la Santé, c’est important, bla bla…), répéter les mêmes encouragements (neutre, évidemment) aux deux équipes de Baseball qui vont s’affronter ce soir-là, et réfléchir à la blague qu’il fera au Tonight Show plutôt qu’à la situation au Kazakhstan…

On comprend mieux le parti pris « idéaliste » de The West Wing : même dans le meilleur des cas, la démocratie oblige aux compromissions, aux à-peu-près, au trivial…

A La Maison Blanche, une leçon de démocratie…




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