[ Les films ]



mardi 6 septembre 2022


Les Magnétiques sont sur Canal+
posté par Professor Ludovico

Le meilleur film français de l’année dernière est disponible sur Canal, qu’est-ce que vous attendez ? Le parcours de deux frères au début des années 80, entre Service Militaire et radio libre, mais une seule fille…

Comédie française, puis tragédie grecque, avec comme musique de fond le meilleur du post-punk… Il ne passera jamais sur TF1, dépêchez-vous…




dimanche 4 septembre 2022


Key Largo
posté par Professor Ludovico

Dès les premières minutes de Key Largo, on sait qu’on est dans la production hollywoodienne, qualité Triple A. Noir et blanc marmoréen, couple mythique Bogart/Bacall, John Huston et la Warner. La Warner, peut-être le seul studio hollywoodien qui ait tenu une forme de ligne éditoriale tout au long de sa longue existence (99 ans au compteur) : des films méchants, mauvais esprit, immoraux, de William Wellman aux sœurs Wachowski en passant par Kubrick…

Key Largo, c’est la ville au début des Keys, cet archipel magnifique au sud de la Floride relié malheureusement par une horrible highway lardée de supermarchés. Il faut chercher la beauté derrière l’anarchie immobilière, ou revoir Bloodline. Mais là, on est en 1948, les Keys sont encore sauvages, et c’est l’hiver, l’ouragan gronde. Bogart débarque dans un hôtel ; il est venu dire au propriétaire quel héros son fils était pendant la guerre. Mais traine dans l’hôtel une bande patibulaire, en fait le gang d’un mafieux revenu en Floride, le terrible Johnny Rocco (Edward G. Robinson) qui va rapidement prendre tout le monde en otage.

Première audace, le bad guy n’apparait qu’au bout d’une demi-heure. Ce qui laisse le huis clos s’installer, les personnages (ambigus) se découvrir, et la tension monter jusqu’à l’explosion finale. En 1h40, Huston extrait l’essence même du film noir : des conflits moraux (qu’est-ce que le courage ?), le désespoir moral de l’après-guerre qui voit les profiteurs revenir sur le devant de la scène, et bien sûr, l’amour impossible. Voir Bacall qui regarde Bogart (ils sont en couple depuis quatre ans) suffit à donner des frissons dans le dos…




vendredi 26 août 2022


America Latina
posté par Professor Ludovico

Les cinéphiles sont des gens bizarres. On décide d’aller voir Rash?mon, le chef d’œuvre d’Akira Kurosawa pour enfin savoir ce qu’est un film-aux-multiples-points-de-vue-et-narrateurs-peu-fiables, et on finit au Reflet Médicis pour voir America Latina, un néo-Giallo.

Pourquoi ? Après de multiples atermoiements (faut-il préférer la séance de 19h10 plutôt que celle de 20 heures ? Ou au contraire voir le jap aujourd’hui et le rital demain ?) Manger un bout avant ? ou après ? Questions fondamentales de la cinéphilie…

Bref, nous voilà dans le noir à regarder un film uniquement recommandé par un pitch. Un pitch très excitant, en vérité :  un chirurgien-dentiste à qui la vie sourit (épouse aimante, ados charmantes, très belle villa avec piscine et chiens) descend à la cave chercher du vin. Il y découvre, stupéfait, une adolescente bâillonnée. Qui est cette jeune fille ? Comment s’est-elle retrouvée là ? Mais surtout… pourquoi ne la libère-t-il pas ?

Pendant 90mn, les frères D’Innocenzo déroulent ce questionnement étrange et absurde, qui fait penser à la meilleure littérature fantastique, d’Edgar Allan Poe à Barbey d’Aurevilly. Mais en utilisant toutes les ressources du cinéma : images léchées et sanguines, champs/contrechamps bizarres (profil contre profil, contrairement aux face-à-face habituels), plans très rapprochés claustrophobiques, et bande-son extrêmement travaillée, aux sons anormalement amplifiés. Si la cadre est luxueux, l’ambiance est délétère.

On reprochera simplement à America Latina un final hyper explicatif dont on aurait pu se passer, car on avait déjà compris.

Que ça ne vous empêche pas d’aller voir ce petit diamant noir…




jeudi 28 juillet 2022


RIP Michel Schneider
posté par Professor Ludovico

Michel Schneider est mort, et nous sommes tristes. L’homme est surtout connu pour son livre sur Marilyn*, qui lui fit gagner l’Interallié. Mais pour le Professore, Michel Schneider est l’homme d’une émission, Apostrophes, et d’un livre, La Comédie de la Culture. Venu dans la première promouvoir le second, il lutta, seul contre tous, pendant près d’une heure contre les thuriféraires de Jack Lang et Pierre Boulez. Une heure qui changea à jamais Ludovico, qui courut acheter le livre et, douze ans plus tard, partit fonder CineFast.

Son brûlot dénonçait l’imposture d’un ministère de la Culture mécène plutôt que passeur. Un monde que connaissait bien Michel Schneider, lui qui avait été, sous Jack Lang, Directeur de la Musique et de la Danse.

Sa thèse était simple, et, malheureusement, toujours d’actualité. Dans l’Ancien Régime, les artistes vivaient au gré du goût (bon ou mauvais) du Prince. Si les Médicis aimaient les statues, on faisait des statues. Si Louis XV aimait la peinture, on peignait. C’était le goût d’un homme. Mais dans une démocratie, l’Etat est une communauté, il n’a pas de goût. Et il n’a pas à en avoir. Le rôle des fonctionnaires n’est pas de choisir les artistes, mais d’assurer leur diffusion : salles de spectacles, médiathèques, salles de cours et de répétition. C’est évidemment l’inverse que constate, de 1988 à 1991, Michel Schneider. La Comédie de la Culture s’attaque en fait à deux vaches sacrées : Jack Lang, ultra charismatique et indéboulonnable Ministre de la Culture, et Pierre Boulez. Le musicien contemporain a certes du talent, mais vit depuis Georges Pompidou de la commande publique : Éclat/Multiples, …Explosante-fixe…, Répons sont des œuvres payées par les deniers de l’état. Comment puis-je, explique Schneider, moi l’énarque formé à la Cour des Comptes, savoir ce qu’est de la bonne musique ? Sur quels critères dois-je décider de subventionner, ou non, Pierre Boulez ?

En 1993, Boulez est le pape de la Musique Contemporaine en France ; il a la mainmise sur un orchestre spécialisée (l’Ensemble Inter Contemporain), un centre de recherche (l’IRCAM) et bientôt une salle de spectacle (la Cité de la Musique). Ce quasi-monopole empêche la diffusion d’autres musiciens contemporains qui n’ont pas l’heur de lui plaire (Steve Reich, Philip Glass, John Adams). Et ce monopole absorbe une grande partie des ressources (900 millions de francs à l’époque) soit l’équivalent du budget de la Danse en France, ou celui de toutes les bibliothèques.

Quel rapport avec le cinéma ? Même si le fonctionnement est différent (c’est le cinéma américain, taxé, qui finance le cinéma français), la même thèse s’applique. Pour faire un film, il faut souvent passer par les fourches caudines de l’Etat (le CNC), qui juge ce qui est bien ou pas. Et déclenche ensuite les financements télé. C’est-à-dire un droit de vie ou de mort sur les films qui ne sont pas de grosses productions populaires…   

Depuis, Schneider a fait des émules dans la musique (Requiem pour une Avant-Garde, Benoit Duteurtre) ou au cinéma (la charge assassine Vincent Maraval en 2012).

Qu’il en soit remercié.

« Il y a en France un ministère de la Culture, singularité dans une démocratie. Depuis 1981, ses interventions se multiplient : événements, marchandises, consommations, la culture semble diverse et vivante. N’est-ce pas l’inverse ? La fièvre indique un malaise. Au-delà d’une critique de la culture de cour, avec ses mœurs, grimaces, travers et ridicules, il faut analyser les tensions qui toujours existent entre art et politique, culture et pouvoir. Car, menée par la gauche ou la droite, la politique culturelle recèle des risques. Les arts ont peut-être le ministère qu’ils méritent, et le ministère les artistes qui le justifient. Que l’art divorce d’avec le sens, la forme, le beau, qu’il ne dise plus rien à personne, qu’il n’y ait plus d’œuvres ni de public, qu’importe, du moment qu’il y a encore des artistes et des politiques, et qu’ils continuent de se soutenir : une subvention contre une signature au bas d’un manifeste électoral. Le rideau tombe, il faut juger la pièce. Ministère de la Culture ? Non, gouvernement des artistes. Mais on ne gouverne pas la culture, et elle n’est pas un moyen de gouvernement. Rien n’est pire qu’un prince qui se prend pour un artiste, si ce n’est un artiste qui se prend pour un prince. »




lundi 25 juillet 2022


La Mort de Staline
posté par Professor Ludovico

En son temps, le signore Fulci nous avait signalé La Cour du Tsar Rouge, l’excellente chronique de Simon Sebag Montefiore sur Staline et son entourage. En deux volumes écrits serrés, Montefiore décrivait l’incroyable mafia – bien pire que celle des Sopranos – qui dirigea l’URSS de 1924 à 1953. Un exercice du pouvoir totalement paranoïaque, ayant causé la mort de millions de soviétiques.

Il existe d’ailleurs un jeu de société très drôle, Kremlin, où l’on s’amuse à lancer des procès staliniens, à purger ses collègues et les envoyer au Goulag, pour saluer – si la santé le permet – à la Parade d’Octobre. Si la santé ne le permet pas, on meurt, le Ministre des Affaires Etrangères est chargé d’organiser vos funérailles. La Mort de Staline, pourtant tiré d’une BD de Fabien Nury, semble pourtant directement sortir d’une partie de Kremlin

Le film d’Armando Iannucci (par ailleurs auteur du moins fin Into the Loop) est pourtant une fidèle reconstitution des derniers jours de Staline et, en même temps, une farce hilarante mettant en scène ses obéissants affidés qui s’empressent de lui succéder, dans le respect de la pensée du Petit Père des Peuples.

Le casting (réel et fictionnel) est immense : Malenkov (Jeffrey Tambor), le successeur officiel, est une poule mouillée qui écoute le dernier qui a parlé ; c’est souvent Beria (Simon Russell Beale), le Ministre de l’Intérieur, qui peut mettre n’importe qui dans les caves de la Loubianka ; tandis que Nikita Khrouchtchev (Steve Buscemi) attend son heure. On croise un Joukov version Tartarin de Tarascon (Jason Isaacs) ou les enfants (gâtés et hystériques) de Iossif Djougachvili…

Une comédie très rafraîchissante, d’autant plus drôle et plus effroyable que tout y est en grande partie vrai.




vendredi 22 juillet 2022


Casque d’Or
posté par Professor Ludovico

Jacques Becker, voilà un gars qui n’est pas manchot. Casque d’Or a beau raconter une histoire vraie, Becker ne s’emmerde pas avec le biopic*. Il a un film à faire, des enjeux à poser, une structure narrative à mettre en place. C’est ça qui compte.

On est en 1900, Casque d’Or est une jolie blonde qui tapine pour les voyous de l’époque, les Apaches**. Elle est avec Roland, un gars de la bande à Lecca. Mais justement le patron lorgne sur elle. Mais bien sûr, elle est amoureuse d’un autre, Manda (Serge Reggiani), ancien voyou reconverti en menuisier, évidemment marié.

Le triangle des tensions est installé, et tout ça va mal finir. C’est toute la force de Casque d’Or, de Heat, du Faucon Maltais ou de La Fièvre au Corps ; faire planer le fatum sur la tête des personnages. Tout pourrait s’arranger, mais tout va de plus en plus mal, car les hommes et les femmes sont comme ça… Hitchcock disait que la tragédie, c’est des gens qui font le contraire de leur intérêt. Casque d’Or, c’est exactement ça. Parfaitement amené, parfaitement mise en scène, parfaitement écrit (et bourré d’injures qui sonnent juste), ménageant son lot de surprises (le « tapin » final), Casque d’Or est un très grand film, étonnement moderne.

Et pas seulement parce qu’au milieu de Casque d’Or trône la reine Simone. Signoret, au sommet de sa beauté, comme un rayon de soleil. Becker l’a compris, et il la filme.

Comme on filme le soleil.

* Il inverse ainsi la réalité : C’est Manda qui avait agressé Lecca.

**Appelés ainsi parce que la presse – déjà ! – compare les affrontements entre bandes à ceux du Far West




samedi 16 juillet 2022


Love & Mercy
posté par Professor Ludovico

On se fout un peu des Beach Boys, de Pet-Sounds-le-plus-grand-album-de-tous-les-temps, mais on nourrit une passion coupable pour Paul Dano, l’un des plus grands acteurs de sa génération, passion partagée au-delà du Rideau de Fer avec Karl Ferenc. Qu’on en juge : Little Miss Sunshine, There Will Be Blood, Night and Day, La Dernière Piste, Looper, Prisoners, Twelve Years a Slave…

Il y a Paul Dano dans Love & Mercy, donc on regarde. Mais il y a aussi John Cusack, un acteur assez sous-estimé qui a traîné ses guêtres un peu partout : chez John Hughes, Rob Reiner, John Sayles, Clint Eastwood, Terrence Malick, Spike Jonze, David Cronenberg. Excusez du peu* !

Dans Love & Mercy les deux acteurs jouent un dispositif intéressant : Brian Wilson jeune est joué Paul Dano, tandis que la version actuelle est jouée par Cusack. Le tout raconte l’éternelle histoire du manager/toubib/parasite (ici le Dr. Eugene Landy, avec le toujours bon Paul Giamatti) qui prend sous coupe réglée une star qui n’en peut mais, coincée par ses problèmes psychologiques et ses différentes addictions. Elvis Presley, Brian Wilson, Britney Spears, you name it.

Si le dispositif est rigolo, il tient surtout aux performances des deux acteurs, forcés de sous-jouer (Wilson est un timide maladif) : on est loin des performances à Oscars.  

Pour le reste, Love & Mercy est le biopic tradi, déroulant le Parcours du Héros version Rock’n’roll : ça ne va pas bien, et puis ça va mieux, le connard drogué/infidèle/prétentieux devient un type sympa et généreux, et trouve en général l’Amour. En même temps, l’Amour, c’est Elizabeth Banks, donc on le comprend.

On aimerait bien qu’un jour on nous raconte le contraire : crises diverses, conneries à tous les étages, addictions en tout genre et SURTOUT pas de rédemption !

Les Rolling Stones, pour ne pas les nommer.

*Sixteen Candles, Stand by Me, Eight Men Out, Les Arnaqueurs, Les Ailes de l’Enfer, Minuit dans le Jardin du Bien et du Mal, La Ligne Rouge, Dans la Peau de John Malkovich, High Fidelity, 2012, Maps to the Stars…




vendredi 15 juillet 2022


Les Nuits de Mashhad
posté par Professor Ludovico

Une ville tentaculaire, la nuit. Un justicier solitaire qui tue des prostituées. Des flics et des juges corrompus. Une journaliste qui tente de faire éclater la vérité. Non, nous ne sommes pas dans le Quatuor de Los Angeles de James Ellroy, mais dans l’Iran de l’année 2001. Les Nuits de Mashhad est un polar nerveux, exceptionnellement filmé par le chef opérateur Nadim Carlsen, et mis en musique, encore plus exceptionnellement, par Martin Dirkov. Deux quasi-inconnus, mais qui travaillent avec le réalisateur, Ali Abbasi, depuis ses premiers films (Shelley, Border, et bientôt The Last of Us)…

Entre 2000 et 2001, le vrai Saeed Hanaei a voulu nettoyer la ville sainte de Mashhad en tuant 16 prostituées. Dans le film, on suit d’abord un personnage fictif, Rahimi (Zar Amir Ebrahimi), une journaliste qui tente d’imposer son enquête dans un monde d’hommes (journalistes, flics, et juges) extrêmement misogynes. Convaincue de la corruption des élites, elle pense que les autorités couvrent le meurtrier, qui fait à leur place un travail de « salubrité publique ».

C’est en tout cas ce que pense le meurtrier (Mehdi Bajestani, extraordinaire), maçon de son état, père de famille respectable le jour, mais tout à sa quête purificatrice la nuit.

Le film pourrait devenir ennuyeux dans cette partie, car il filme avec une certaine complaisance trois meurtres : un peu de hors champ n’aurait pas fait de mal. Mais le film bascule vraiment dans sa dernière partie, dans la description glaçante de l’environnement social et culturel dans lequel le tueur évolue. Ancien combattant, il bénéficie de la solidarité de sa famille, de ses amis, et de la population, contente que l’on débarrasse la ville sainte de ces droguées qui dévergondent les hommes. Les corrompus, on le voit, ne sont pas forcément ceux que l’on croit. 

Contrairement à La Loi de Téhéran ou aux film d’Asghar Farhadi, le film n’a pas été tourné sur place* et n’a pas – c’est le moins qu’on puisse dire – l’aval des autorités iraniennes. Au contraire, elles ont dénoncé une tentative de déstabilisation de la France, qui a placé ce film en compétition à Cannes, et a récompensé son actrice principale**. Pour autant, le film est assez fin sur les implications politiques de l’affaire. Le gouvernement religieux ne peut pas laisser faire, mais il est pris en tenaille par la morale très rigoureuse qu’il a lui-même imposée. Comment s’en sortira-t-il ?

Il faut aller voir le film pour le savoir…

*Le film est tourné en Jordanie, pas la meilleure amie de l’Iran.

**C’est évidemment Mehdi Bajestani, le tueur, qui aurait dû recevoir un prix, mais on n’est jamais déçu par la Palme des Alpes Maritimes.




jeudi 14 juillet 2022


Top Gun Maverick/Michel Sardou
posté par Professor Ludovico

Il y a quelques années, je suis allé voir avec ma sœur Michel Sardou, au Théâtre de la Michodière. Oui, le Professore n’est pas toujours l’apôtre du bon goût. Une comédie de boulevard consternante dont j’ai oublié le nom, avec mari trompé, jeune ingénue et amant dans le placard … Mais nous voulions voir l’idole de notre enfance sur scène. En réalité, le spectacle était dans la salle. Dès le héros arrivé, les fans de Sardou étaient aux anges, trépignaient, riaient à toutes ses blagues et applaudissaient à tout rompre. C’était comme revenir aux racines du théâtre, où l’on vient rire et pleurer depuis vingt-cinq siècles : un pur divertissement populaire qui met les spectateurs en joie. C’est ce qui s’est passé hier à l’UGC Ciné Cité Les Halles ; à chaque intervention de leur héros (ici, Tom Cruise) le public réagissait, applaudissait.

Depuis toujours, l’entertainment – et en particulier Hollywood – travaille le business de la nostalgie. La nostalgie historique d’Autant en Emporte le Vent (le monde perdu du Sud), des années 50 (American Graffitti, Retour vers le Futur) ou la nostalgie cinématographique elle-même : Star Wars faisant revivre les serials des années 30 aux spectateurs des années 70, eux-mêmes se repaissant quarante ans plus tard du revival Disney. Sans parler des sequels (Indiana Jones I, II, III, IV) et du Marvel Cinematographic Universe, qui garantissent des entrées à la simple évocation de leur nom, sans même avoir tourné une seule minute de film.

Et c’est normal d’exploiter cette nostalgie : s’il y a une chose qu’on n’aime pas, c’est être surpris. C’est le succès du McDo : on sait exactement ce qu’on va manger*.

En allant voir Top Gun Maverick, on est dans cette idée : on sait exactement ce que l’on va voir. Mais ici, c’est fait un tel niveau de copier/coller que ça en devient carrément scandaleux. Le film est entièrement conçu autour de l’idée de la nostalgie et ramène à chaque fois le spectateur sur une scène du film primordial. Le père joue Great Balls of Fire ? Le fils joue Great Balls of Fire… La B.O. est composée (forcément !) de musique des années 80 ? On écoute Let’s Dance dans le film de 2022… Maverick fait de la moto avec Kelly McGillis ?  Maverick fait de la moto avec Jennifer Connelly… Kelly McGillis a une Porsche ? Jennifer Connelly a une Porsche. Vous avez l’idée ? L’intrigue, évidemment, est aussi la même : des ennemis invisibles, une mission suicide, des pilotes qui se la pètent et sont rebelles à l’autorité, mais qui, en réalité, ont bon fond. Tout cela – comme le premier Top Gun – est profondément ennuyeux.

Ce ne serait pas trop grave si c’était un peu travaillé, un peu écrit, avec deux ou trois répliques, mais non, il n’y a rien, tout est décalqué, plan pour plan, sur le travail initial de Tony Scott.

On a l’habitude de dire que les films américains sont des produits marketing, mais là, c’est le pire produit marketing qui soit. Un scandale.

Et c’est le gars qui vénère Tom Cruise, Tony Scott, et les Simpson/Bruckheimer qui vous dit ça.

* En allant voir récemment Je Vais t’Aimer, la comédie musicale tirée des chansons de Sardou, le Professore Ludovico et sa sœur récidivaient, tout en savant aussi exactement ce qu’ils allaient voir : le même copier/coller fainéant, version Sardou. 




mercredi 13 juillet 2022


Intégrales Haneke et Reichardt sur OCS
posté par Professor Ludovico

OCS propose en ce moment deux intégrales très intéressantes, celles de Michael Haneke et de Kelly Reichardt. S’il y a un monde entre le nihilisme Hanekien et l’humanisme Reichardtien, les deux cinéastes posent tous les deux un regard acéré sur le monde, avec un cinéma au service de cette vision. C’est l’occasion de voir ou revoir leurs grands films, et leurs grands films sont souvent rares.

À ne pas manquer pour Haneke, ses premiers films autrichiens : Le Septième Continent, Benny’s Vidéo, 71 Fragments d’une Chronologie du Hasard et le terrifiant Funny Games. La suite, produite en France, est moins intéressante mais on peut jeter un œil à Amour, avec notamment un gigantesque Trintignant.

Côté Oregon, c’est plutôt l’inverse : les derniers films de Kelly Reichardt sont plutôt meilleurs que les premiers, plus solides, et mieux construits. Donc on peut prendre la filmographie de la floridienne à rebours de son propre parcours. Commencer par l’Oregon, First Cow, Certaines Femmes, Night Moves, La Dernière Piste… et finir éventuellement dans le Dade County de River of Grass




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