Il me disait que la chasteté était le meilleur moyen de garder son instrument en parfait état de marche. Moi, j’ai besoin que mon instrument soit accordé très régulièrement.
Mimi Leder, à propos des raisons de sa séparation avec Tom Cruise. Elle l’initia à la Scientologie (entre autres, visiblement)
[ Les gens ]
jeudi 14 juillet 2005
posté par Professor Ludovico
jeudi 14 juillet 2005
posté par Professor Ludovico
J’ai eu du mal à accepter Coppola. Au début, j’ai cru que Francis était une erreur des services de sécurité de la Paramount.
John Milius, futur scénariste d’Apocalypse Now
jeudi 14 juillet 2005
Compétition mémorielle
posté par Professor Ludovico
La Liste Schindler, un film sur la shoah ??? Moi je dirais que c’est plutôt un film sur le succès, non ?
Kubrick, un peu jaloux de s’être fait doubler sur le sujet par son copain Spielberg
jeudi 14 juillet 2005
Hollywood Gossips
posté par Professor Ludovico
Une nouvelle rubrique pour noter, au fur et à mesure, les déclarations fracassantes des uns sur les autres. Rien de chabada bada là-dedans mais plutôt des vacheries en stock…
Sortez le fiel…
lundi 11 juillet 2005
Ken LOACH et sa morale à 30 cts d’euro
posté par FrameKeeper
Pour en finir avec Ken LOACH, il suffit de pitcher Raining Stones…
Bob est chômeur et nécessité faisant loi, vit d’expédients.
Mais il en vit mal: il n’arrive pas à voler des moutons, se fait arnaquer par l’évêché qui lui fait déboucher les égouts gratos, puis se fait virer d’une boite de nuit parce que lui, Bob, il leur dit merde aux dealers… Et il se fait même piquer sa camionnette, ah vraiment, il a pas de bol le Bob.
Et pourtant, il est catho le Bob ! Même qu’il va acheter la plus jolie aube pour la communion de sa fille. Ah mais ! Pauvreté n’est pas vice. Et sa fille sera la plus belle pour aller communier.. Même s’il doit s’endetter pour cela, il est comme cela Bob… Sauf que, pas de bol, sa dette de communion, il ne peut pas la rembourser et que, pas de bol décidemment, son usurier cède la dette à un méchant truand qui ne rigole pas avec les délais et que patatras, les méchants viennent tout casser chez lui pour qu’il rembourse.
Alors forcément, Bob se dit « c’est pas juste » et il va lui dire au grand méchant ce qu’il en pense de ses méthodes de voyou et que c’est pas bien que tous les pauvres du monde ne se donnent pas la main et que certains en profitent pour exploiter les plus pauvres… Mais le grand méchant, il a pas lu Marx, alors il s’énerve de pas avoir son pognon et Bob aussi parce qu’il l’a pas le pognon et pas de bol, Bob le tue ce fils de pute d’usurier…
Alors Bob, qui est vraiment un bon chrétien, il va voir le prêtre pour tout lui confesser avant de se rendre à la police. Mais le prêtre c’est vraiment un mec bien aussi, pas un pourri d’evêque pédophile et il lui dit à Bob: » c’est pas juste, ce mec était vraiment une ordure, toi t’es un mec bien puisque t’es un pauvre chômeur honnête, y’a pas de raison, c’est pas normal, c’est pas juste alors tu rentres chez toi et tu fermes ta gueule ».
Alors Bob, il rentre chez lui mais la police, elle vient chez lui … les gentils seront décidemment toujours perdants ? Non, c’était une blague du scénariste, les policiers, y’venaient juste pour lui rendre sa camionnette qu’on lui avait piquée au début du film… Ah, un film qui finit bien de temps en temps, ça fait du bien !
Moralité 1: C’est vrai quoi, si les pauvres avaient le droit de buter un salaud de patron ou d’usurier de temps en temps et si les prêtres étaient un peu moins cons et acceptaient de les absoudre, (d’autant que souvent, c’est de leur faute aux riches et aux salauds si les pauvres sont dans la merde car sans la communion de la petite, Bob n’aurait tué personne), et bien le monde tournerait plus rond…
Moralité 2: les hommes n’ont pas toujours besoin de religion pour s’étriper et Land of freedom prouve qu’on y arrive très bien même entre copains. En revanche, on a toujours besoin d’une religion, quelle qu’elle soit, pour justifier son orgueil et ses crimes… Mais si in fine, il ne reste plus comme solution que d’accuser la religion d’être à l’origine du mal..
Moralité 3: je ne sais pas pourquoi mais quelque chose me dit que finalement, la culpabilité judéo-chrétienne, depuis le gardiennage de son frère jusqu’au soleil qui brille pour les bons et les méchants, ça n’a peut-être pas que des mauvais cotés…. mais bon ce que j’en dis..
Ken LOACH lui a eu un prix à Cannes et un hommâge ému de Télérama qui a salué sa délicatesse dans l’exposition de la scène de racket au domicile de Bob.. c’est vrai quoi n’importe quel cinéaste aurait cherché à exploiter la peur pour l’enfant… aurait montré les voyous frappant la mère devant la fille, ou l’inverse… Pas Ken, non il ne mange pas de ce pain là… mais son pain n’est pas pour autant nécessairement plus frais.. ni plus comestible…
mardi 28 juin 2005
Peter Jackson : le retour du ROI
posté par snake
Peter Jackson a porté plainte contre New Line Cinema, qui l’aurait escroqué de 100 millions de dollars. Sur un montant total de 4 milliards de dollars générés par la trilogie de l’Anneau, Jackson n’a touché que 200 millions de dollars. Or, il est censé toucher 20 % des revenus bruts, moins les taxes. C’est marrant comme ça ne me fait ni chaud ni froid…
jeudi 23 juin 2005
The Schisme
posté par FrameKeeper
Autant vous dire la vérité et agir dans la transparence… La Rédaction de CinéFirst est divisée, déchirée par des courants souterrains, quatre au moins, qui se disputent le leadership:
1- Tendance « Kubric-patient anglais » auto-écartelée entre Niestzsche et Jésus
2- Mouvement « Woddy Allen-Carpenter » désespéré depuis sa rupture avec le situationnisme
3- Club « Irmavep – Michel Vaillant » englué dans ses contradictions marxisto-freudiennes
4- Secte « Ozu-Fincher » enfermée dans ses certitudes girardiennes.
Ne vous étonnez pas donc des violents débats fratricides générés par chacune de nos prises de position successives, car jusqu’à présent chaque congrès trimestriel a permis de reconstituer l’Union Sacrée.. Tant que Libé-Rama et autre MGP (Masque-Goudron-Plume) seront diffusés, nous serons solidaires. Ciné First et vive la Critique Libre.. Never Give up, Never Surrender…
En attendant, quelques coups de griffe au Professeur Ludovico…
1) Jeunet est un chic type: c’est mal de se moquer de lui… d’accord ses voix off posent problème, son système narratif est archi-stylisé, ses personnages instrumentalisés… et alors ? Au moins il fait du cinéma.. du vrai, avec des images… des émotions… des trucs de ouf comme un dirigeable en feu dans un hôpital, un ricochet dans l’eau qui n’en finit pas, un nain de jardin interlope et cosmopolite, un panier de basket marqué à l’envers par une fille … et ce gant rouge, c’est une trouvaille ce gant rouge.. un peu Grand Meaulnes.. ouais des trucs de gosses… mais sans trucs de gosse.. que serait le cinéma…. ? Une immense dissertation toujours inachevée sur la difficulté de vivre en couple sans tromper sa femme ou être trompé par elle ? Un long plaidoyer pour les gens qui n’ont pas d’emploi ou qui ont perdu un enfant ? A Dieu ne plaise..
Donc j’ai infiniment plus de respect pour un Jeunet qui va passer une semaine minimum à régler un plan de 14 secondes sur un improbable champ de blé à la Van Goght, même si c’est bâteau et si ça fait fête foraine, que pour un constipé labellisé FEMIS qui va se torturer et torturer son chef-op nuits et jours pour trouver un moyen pour que bordel ça fasse crade un peu sur l’écran Chié Merde, on n’est pas chez Besson putain… Qu’il se rassure, a priori ça fera crade quoiqu’il fasse et ça lui permettra toujours de finir sa carrière chez Hamster Production..
Jeunet c’est bien, Jeunet c’est la France qui gagne, avec les Jaouaac, les Clavier et les Besson, on n’en a pas suffisamment pour en dire du mal.. Merde quoi..!
PS: un bémol toutefois M. Jeunet. Vous direz à votre scénariste qu’en 1914, jamais un Corse n’aurait dit qu’il n’était pas français et les statistiques de mortalité, très supérieures à la moyenne nationale, le prouvent sans possibilité de démenti. Sans rancune…
2) J’attends ta démonstration sur la première trilogie de Lucas de pied ferme… les épisodes 4 à 6 sont inattaquables, même celui avec les bisounours… c’est le seul cas dans l’histoire d’Hollywood, avec se7en, qui permette d’affirmer raisonnablement qu’un scénariste américain au moins a lu les annexes de la Bible.. ouais, tu sais, les évangiles…
3) D’accord Ridley Scott a un genoux à terre, Mac Tiernan n’est pas très vaillant, Beinex a été enlevé par des extra-terrestres, Annaud capturé par le Cirque Pinder… mais bon quand tu as fait Alien, Blade runner, Predator, Diva et la Guerre du feu, t’as quand même le droit d’aller te coucher sans recevoir des pierres.. D’ailleurs y’en a un qu’a bien pigé le truc et qui ne fait plus rien, c’est l’ami Cameron.. Je sais bien qu’il dirige activement l’association des film’s Director anti Petrol Hann mais bon .. it’s not a full time job…
Ceci dit tu as tout de même raison: un gros succès t’amène une carte blanche sur le projet suivant et avec une carte blanche, tout le monde se plante.. même Clavier.. même Serreau..
Bon quand est-ce qu’on écrit un hit, pour voir si on pourrait faire mieux après ?
Biz
jeudi 23 juin 2005
Jeunet : Objets inanimés, avez-vous donc une âme ?
posté par Professor Ludovico
Ce qui est bien avec Jeunet, c’est comme chez Mc Do, on sait à l’avance ce qu’on va manger. Au menu, des personnages sympas, style BD : le méchant boucher, les enfants perdus, le jeune amoureux transi, etc. Des belles images, avec plein de couleurs dedans… Des fantastiques mouvements de caméra (et tout ça sans payer plus cher qu’un film ouzbek en Super8 !). Jusque là, cette méthode a relativement bien collé au propos ludique de Jeunet : la farce cannibale (Delicatessen), le conte enfantin steampunk ( La Cité Des Enfants Perdus), la belle histoire d’amour (Amélie Poulain).
Mais voilà, Jean-Pierre vieillit, il pense avoir mûri et décide de se colleter aux Grands Sujets : avec Un Long Dimanche de Fiançailles, c’est la Grande Guerre. Sujet casse-gueule, car déjà filmé, et pas par des stagiaires de l’IDHEC : Les Sentiers de la Gloire, Les Croix De Bois. C’est aussi un sujet de littérature abondante, et un sujet très documenté.
Mais Jean-Pierre, il s’en fiche, lui il est contre la guerre (position courageuse) et puis il sait tout ça, les mutineries de 17, Pétain, les pauv’ gars envoyés à l’abattoir, etc. Il a lu un très beau livre là-dessus, signé Japrisot, et c’est parti mon kiki. En plus, ce livre, c’est un peu « Amélie Poulain Fait Le Chemin Des Dames », puisque l’équivalent littéraire du style de Jean-Pierre.
Alors on se lance, fort de son bon droit. Car Jean-Pierre, les années 10-20, il connaît ! Dans sa cave, il collectionne plein de vieux téléphones bizarres, des costumes d’époques, des trains électriques, sans parler d’une collection de cartes postales défiant toute concurrence. Alors autant que ça serve ! Car comme Ridley Scott, Jean-Pierre est un formidable décorateur. Il sait filmer les objets, leur texture : le vieux bois… la boue de la tranchée… le sang qui gicle… la belle mousse verte sur le calvaire breton… l’étron de l’âne corse… Tout fait vrai, tout sonne juste, sauf les sentiments…
A force de filmer des objets et de reconstituer le palais du Trocadéro en 3D, Jean-Pierre a oublié qu’il y a avait un truc, là, au premier plan, qu’on appelle des personnages. Aussi se contente-t-il de filmer des faciès, des expressions : la Colère, l’Indignation, le Désespoir, la Tristesse, illustrant ainsi l’évolution de son héroïne, et espérant retrouver ces émotions chez le spectateur.
Tout ça a peu d’importance puisque de toutes façons, ces « personnages » ne sont là que pour permettre à l’histoire d’avancer, et cette histoire, elle est déjà torpillée dès le début : Mathilde doit retrouver l’amour de sa vie. Pourtant, le jeune Manech est officiellement mort. (Pas d’inquiétude, cher spectateur, on ne craint pas une seconde : a) qu’elle ne le retrouve pas, b) qu’il soit mort).
La question donc se pose ainsi : Pourquoi l’amoureux de Mathilde ne serait pas mort ? La réponse étant : « ON S’EN FOUT ! » Une réponse qui n’est pas de moi, mais d’Alfred Hitchcock, un obscur cinéaste londonien. Lequel ayant théorisé en son temps (dans les années 20, justement), que le spectateur se fout du pourquoi, mais qu’il préfère s’identifier aux personnages, même dans des situations rocambolesques. « la question, disait-il en substance, n’est pas de savoir pourquoi bon dieu ces gens ne vont pas prévenir la police ? ? ? Mais plutôt, comment faire pour le spectateur soit avec Jimmy Stewart, qu’il vibre avec lui, qu’il s’inquiète pour lui ? »
Mathilde va-t-elle réussir à la retrouver ? On s’en fiche pour deux raisons. D’abord parce qu’il est difficile de vibrer avec un faciès. Audrey Tautou est belle, mignonne, attendrissante. Mais on ne sait rien d’elle. Il faudrait un vrai personnage, pour qu’on s’identifie un peu. Ensuite, on n’est pas très inquiet, parce qu’elle n’a pas beaucoup d’opposition, la Mathilde ! Elle reçoit des courriers, en envoie, prend le train, visite les halles, visite l’Opéra, etc. Mais aucune force du Destin, aucun opposant ne risque d’empêcher la vérité d’éclater…
Bon vous me direz, c’est pas Usual Suspects non plus. Mais dans le mélo, il y a aussi besoin d’opposition : le sens moral de Meryl Streep dans La Route de Madison par exemple, ou la pression sociale sur Richard Gere dans Pretty Woman.
C’est peut-être un film de guerre, après tout ? C’est là que sa se gâte. Ca aurait pu être un film de guerre. Ou un film contre la guerre. Tout occupé qu’il est à sa reconstitution (pas un bouton de guêtre, pas une tache de boue qui manque), Jean-Pierre fait de l’histoire avec un petit h et des stéréotypes à majuscule partout : les Généraux Incompétents, les Courageux Soldats Insoumis, le Boche Qu’est Comme Nous, etc. De sa collection, Jean-Pierre nous ressort un vieux livre des années 30 : « La Grande Guerre Expliquée aux Enfants » : il était une fois, un guerre voulue par de méchants généraux, faite par de pauvres bougres qui n’aspiraient qu’à boire de la bière et courir la gueuse ou faire partie du mouvement ouvrier, et qu’on a envoyé, comme ça, lâchement, à l’abattoir. Sur place, ne voyant pas d’issue, ils décident de se mutiler pour éviter les tranchées, mais de méchants généraux (je vous aide, ça commence par un P.) les condamnent odieusement au peloton d’exécution.
Je me permets de fournir quelques fiches de lecture pour le petit Jean-Pierre, afin de l’aider à approfondir la question :
- « Si c’était si chiant à faire, la guerre, on trouverait pas autant de mecs pour la faire. » (Francis Ford Coppola). Relire à ce sujet Orages D’acier, Voyage Au Bout De La Nuit, Les Croix De Bois, La Peur, Ceux de 14… Plein de gens sont partis avec l’envie de tuer du boche, avec un réel sentiment nationaliste, et le plaisir animal de se battre.
- « On ne fait pas la guerre (ni du cinéma) avec de bons sentiments » : Pétain a condamné pour l’exemple des mutins, souvent innocents. Mais en même temps, il a amélioré l’ordinaire du soldat, organisé les relèves automatiques sur le front, et très probablement gagné la guerre.
- « La guerre est une chose trop sérieuse pour être confié à des réalisateurs de clip » (Clémenceau, de mémoire)
Car le problème fondamental de Jeunet est là, il est dans tous ses films et il est particulièrement criant sur un sujet sérieux. La guerre a beau le dégoûter le Jean-Pierre, il aime quand même drôlement bien la filmer. Y’a pas à dire, une explosion ; c’est beau, ça fait un beau son THX. Les tranchées, c’est idéal pour faire des travellings arrières et de zolis effets de Louma.
Mais une fois de plus, à quoi ça sert ? Avoir des moyens et les utiliser, ce n’est pas la même chose ! Un cinéaste, c’est un œil qui regarde, qui décide, parce qu’avant tout un cinéaste c’est un conteur : il maîtrise ses effets. JP Jeunet, c’est un chef-op. Il faut que le conteur lui dise où filmer, sinon il filme tout ce qui lui plait. Et comme il a un super jouet dans les mains (la Warner, le plus gros budget de l’histoire du cinéma français), il s’en sert : travellings, Louma, 3D, tout y passe, même si ça n’apporte rien à son histoire.
Deux exemples comparatifs :
- le plan séquence : dans tous les cas de figure un plan-séquence est très dur et coûteux à réaliser : c’est une performance. Dans Un Long Dimanche, JPJ en réalise un très beau dans les Halles de Paris. Pour quoi faire ? à la fin, Audrey Tautou rencontre Jodie Foster. Qu’a-t-on appris qu’on n’aurait pas appris d’un banal gros plan ? Rien. Aux Halles, en 1920, y’a de la viande et des choux fleurs.
Dans Les Affranchis, un plan séquence suit Ray Liotta à l’intérieur d’une boîte de nuit. Il évite la file d’attente, et sans payer, se retrouve au premier rang, ce qui lui permet d’éblouir Lorraine Bracco. En un plan, on a compris : Ray Liotta connaît du monde, il connaît tout le monde, et on ne peut plus rien lui refuser. Ce plan clôture la première partie : il est devenu un wise guy.
- Plans aériens. Dans le film de Jeunet, toutes les 30 secondes, la caméra survole les tranchées, virevolte entre les crucifix et les cadavres. Le premier est superbe : on découvre en un plan l’horreur de 14, la boue, le sang, la mort. Mais au troisième on a compris et ça commence à fatiguer.
Dans Titanic, Cameron fait la même chose : il filme de manière virtuose le bateau, la caméra tourne autour de cet indestructible oiseau des mers. Au milieu du film, au contraire, c’est un plan fixe, filmé de très loin, qui vient rappeler la fragilité du Titanic au milieu de l’immensité glacée. Et une fois coulé, la caméra de Cameron ne virevolte plus. Elle est fixe, dans l’eau, au milieu des naufragés : nous sommes avec eux. Pas de fioritures : ces gens sont en train de mourir. Le héros nous dit adieu. Cameron a les moyens de faire mieux, de faire plus. Il décide de ne pas le faire. Car il sait, parce que c’est un grand conteur, qu’il doit ménager ses effets.
A ce moment-là, Monsieur Jeunet, derrière l’extrême économie de moyens, il n’y a plus que l’émotion.
jeudi 23 juin 2005
Ridley Scott, ou le Cinéma de Décorateur
posté par Professor Ludovico
Ô amours défuntes ! Ô doux oiseaux de jeunesse ! Il fut un temps, pré-matrixien, où l’on ne pouvait vivre sans Ridley Scott. Un temps où les films de SF se comptait sur les doigts d’une main… Ridley fut notre seul prophète, notre espoir, le temps de deux films … Il joua si bien son coup que l’hypothèque, chez les quadras de ma génération, ne se lève que maintenant, après une bonne dizaine de déceptions.
Je ne vais pas vous la faire : pour moi, l’affaire était entendue depuis longtemps. Depuis 1987, pour être précis, le jour où notre barbu quitta la Kubrick League pour rejoindre la 2ème Division John Badham, celle des gentils faiseurs d’Hollywood. Ce jour-là s’appelle Someone to Watch Over Me, un polar poussif qui révéla au grand jour l’incompétence crasse de Ridley, et sa spécialisation désormais certaine dans ce que j’appellerai le film de Décorateur.
Qu’est-ce qu’un film de décorateur ? Il y a des films de réalisateur (c’est à dire qu’on s’y préoccupe surtout de travelling et de cadrage) et les films de décorateur, où, en plus, on s’occupe de faire beau : beau travelling, beau cadrage, mais aussi beau décor et beau costume. Comme par hasard, ça vient souvent de la pub : Russel Mulcahy, Jean-Jacques Beineix, Tony Scott.
Ridley Scott est un ancien publicitaire ; il sait l’importance du réalisme dans le décor, dans les costumes. Ce réalisme permet au spectateur une plus grande identification à l’univers du produit. Mais Ridley ignore l’importance d’un bon scénario, d’une bonne direction d’acteur et surtout, d’une véritable histoire à raconter. Il est d’ailleurs intéressant de comparer la carrières des frères Scott. Tous deux publicitaires, tout deux réalisateurs « décorateurs »… Pourtant, Tony a fini par surpasser Ridley. Car Ridley s’y croit, quand Tony admet n’être que l’employé de producteurs talentueux (Simpson/Bruckheimer, pour ne pas les nommer).
C’est là que le bât blesse. Ridley a la grosse tête. Brillamment entouré au début de sa carrière, piloté par des scénaristes/producteurs sérieux, c’est bien ce qui manque aujourd’hui. Mais reprenons depuis le début…
Ce fut le temps de deux chefs d’œuvre, évidemment : Alien et Blade Runner. (Les magnanimes ajouteront Duellistes). Deux œuvres séminales et fondatrices. Alien fut pour tous un choc, la traduction de visions entrevues dans la littérature SF : nos cauchemars d’un futur sordide et mercantile se concrétisaient enfin. Quelqu’un voyait comme nous !
A l’époque, le cinéma n’offrait que du space opera ridicule, en jupettes de cuir, tuniques blanches et sabres laser (je ferais un jour un sort à la prétendue « œuvre » de Georges Lucas). Il y avait aussi quelques films sombres (L’Age de Cristal, La Planète des Singes…), mais la déco faisait tellement défaut (et coûtait tellement cher) que ces films, à la revoyure, font encore rire aujourd’hui…
Quand Alien vint, on sut que plus rien ne serait pareil. L’espace n’était plus un lieu d’aventures extraordinaires dans des vaisseaux rutilants mais bien le reflet punk de notre époque. Les cargo spatiaux étaient sales, pleins de cambouis. Le motivations : sordides et mercantiles. La sexualité : refoulée et triste*.
Blade Runner fut une suite logique au formidable succès commercial d’Alien. Ridley Scott adapta dans son univers le roman de Philip K. Dick, transformant une Californie désertifiée en Los Angeles sous une pluie éternelle, en dé-castant Harrison Ford en anti-héros mature, et surtout en créant cet univers urbain encore pillé, vingt ans après, par la plus minable des séries B de M6. Personne, dans le milieu du cinéma, n’est sorti intact de Blade Runner, malgré son échec commercial**.
Legend annonça le déclin du cinéma scottien. Les images étaient toujours aussi belles (peut-être les plus belles qu’il ait tournées). Mais il n’y avait plus de scénario, plus de producteur, derrière les enluminures.
Pas une seconde, Ridley Scott ne se préoccupe de son histoire, tellement basique qu’elle en devient ridicule. Il passe visiblement peu de temps avec ses acteurs, et leurs personnages sont vides. Par contre, on l’imagine en studio, en train de reconstituer cette forêt magnifique, de choisir avec amour chaque pierre, chaque fougère… imitant en cela un certain… Stanley Kubrick. A Hollywood tout le monde respecte, envie et veut devenir Kubrick. Sa filmographie exceptionnelle, sa capacité unique à obtenir le final cut, le réalisme de ses productions : décors, costumes, accessoires… Je sens un frémissement dans l’assistance… Kubrick ferait-il partie de cette infâme caste des « décorateurs » ? Erreur, cher public, mais rassurez vous, vous n’êtes pas seuls…
Ils sont nombreux à avoir compris de travers les enseignements de Maître Stanley. Kubrick était mégalo, frustré, maniaco-dépressif : il se préoccupait de tout ! Bien sûr, il voulait savoir quel type de brosse à dent pouvait utiliser Barry Lindon, ou connaître le nombre exact de millimètres carrés des pubs pour Full Metal Jacket dans la presse thaïlandaise… Il voulait tout contrôler, et c’est pour ça qu’il a fait peu de films. Mais tout contrôler, c’est aussi polir pendant des années son scénario, ou tourner pendant un an avec Cruise/ Kidman pour Eyes Wide Shut. Et recommencer tant que ce n’est pas bon… Le scénario, les acteurs, ce ne sont pas des détails…
Après Legend, le cas Ridley ne fit que décliner. De succès en échec, rien n’y change : films de décorateur à succès, comme Gladiator, ou des films de décorateur à échec, comme Legend ou 1492. A chaque fois perce pourtant son unique motivation : l’envie de reconstituer, avec un talent certain, un univers qui le fascine : les appartements yuppies new-yorkais de Someone to Watch Over Me, le japon yakusa de Black Rain, l’Espagne de 1492, la Rome antique de Gladiator, et ce, jusqu’à la dernière fibule de centurion romain.
A chaque fois, ses projets sont très excitants sur le papier, il propose de véritables challenges au spectateur. On l’imagine aussi excellent pitcher à Hollywood, capable de vendre un projet clefs en mains : Depardieu en Colomb, Demi Moore rasée, etc. Des films qu’on a instantanément envie de voir. Mais une fois dans la salle, c’est une autre affaire…
Il reste le plus bel enlumineur du cinéma américain. C’est là sa constance, c’est là son honneur… Il fait partie de la longue liste des réalisateurs en qui nous avons espéré, le temps d’un ou plusieurs films. Tels des étoiles filantes, ils nous abasourdissent de leur chef d’œuvre instantané. Epoustouflé par tant de génie, nous ne savons pas entrevoir derrière eux le producteur discret ou le scénariste talentueux. Puis un jour, ce complice disparaît, et notre jeune espoir révèle sa vrai nature de tâcheron de seconde zone : j’aimerais citer Bryan Singer, George Lucas, Jean-Jacques Annaud, Ang Lee, Jean-Jacques Beineix***…
A l’instar de Ridley Scott, ils offrent souvent du régal pour les yeux, mais nos cœurs affamés d’un peu d’humanité restent sec…
P.S. J’ai volontairement laissé de côté Thelma et Louise, un film tellement stupide, abject et démago, qu’il mérite une critique à part entière.
*Alien, le plus grand porno de l’histoire du cinéma, transpercé -si j’ose dire- de pénétrations en tout genre, fellations, viols et orgasmes divers
**Avec, 10 ans après, le plus beau Director’s cut de l’histoire du cinéma : Comment, en UN SEUL PLAN, changer l’intégralité d’un film ? Je rappelle le principe. La version 1982 était ambiguë, on ne savait pas si Deckard était un flic ou un répliquant … Un plan inexpliqué montre un flic laisser un origami de licorne dans la chambre de Deckard. Dans son Director’s cut de 1992, Ridley Scott rajoute un rêve de Deckard : une licorne qui gambade dans la forêt. La boucle est bouclée : si le flic connaît les rêves de Deckard, c’est donc un répliquant. CQFD.)
***Message personnel à l’attention du Frame Keeper : j’ai longtemps intégré David Fincher à cette liste peu recommandable. Puis un soir de 2003, vers 3 heures du matin, lors d’un comité Cinefast, la lumière vint. David F. était bien un cinéaste chrétien, et ses films avait du sens. Une œuvre était en cours… To be continued.
jeudi 23 juin 2005
Who is the best living film’s Director ?
posté par FrameKeeper
Réponse évidente: David FINCHER
Palmarès : » Alien 3, Seven, The Game, Fight club + Panic Room » 5 films = 5 chefs- d’œuvres ?
Mais au fait, comment peut-on avoir réalisé 5 films apparemment de pure commande, sauf peut-être Fight Club, et néanmoins être ainsi titulaire d’une œuvre (appelons un tigre un tigre) dont la cohérence donne littéralement le vertige ?
A ce stade de l’exposé quand il est oral, généralement un de vos amis vous interrompt et vous dit
a) Ouais mais non pas The Game, la fin est vraiment trop catho ,
b) Ouais mais non, la fin de fight club, c’est vraiment débile, on n’y croit pas une seconde
c) Ouais mais non, Se7en c’est vraiment trop complaisant
d) Heu Alien 3, t’es sur que c’est de lui ?
e) Panic room, je l’ai revu l’autre jour à la télé, aucun intérêt,
Ok Guys, on se fixe un RV chez moi, je loue tout ça, on se les passe en boucle et on discute….
CinéFirst ne reculant devant aucun sacrifice a tenté l’expérience et dans mon souvenir, mais je suis partial, après trois films et quelques extraits, certes tout le monde était crevé mais plus personne ne mouftait… et la proposition « FINCHER est un génie » sans nécessairement provoquer une adhésion immédiate n’amènait plus ce sourire amusé et interrogateur si souvent affiché sur le visage des mes interlocuteurs.
Alors je repose la question : quel autre candidat au titre envié et enviable de « Best living film Director ? »
En attendant la réponse et d’éventuels contradicteurs … un petit jeu à vous proposer..
Prenez le DVD de Se7en, calez-vous sur la scène quasi-finale de la voiture pie où Morgan et Bratt emmènent John Doo vers le lieu du dénouement … Pour les besoins de la cause, imaginez un instant qu’ils ne discutent pas des crimes commis mais du film Se7en et des critiques suscitées..
Vous y êtes…. ? Alors ? Amazing isn’t it ?
Biz
