[ Pour en finir avec … ]

On peut pas aimer tous les gens…



mercredi 4 avril 2012


Chroniques de désastres annoncés
posté par Professor Ludovico

C’est un des fardeaux du CineFaster ; sentir les viandes faisandées avant qu’elles n’arrivent chez votre boucher local, MK2 ou UGC…

Deux exemples qui ne sentent pas bon en ce moment : Twixt et Sur la Piste du Marsupilami. Twixt, c’est le nouveau Coppola. Dans notre beau pays où il-n-y-a-que-des-artistes-et-pas-d-odieux-producteurs, on s’efforce de croire qu’il existe encore un Artiste Maudit appelé Francis Ford Coppola. Pourtant, il n’a réalisé que deux véritables chefs d’œuvres, Le Parrain et Apocalypse Now!, et quelques films intéressants, Rusty James, Conversations Secrètes, Cotton Club ou Jardins de Pierre.

Cette fois-ci, le mangeur de spaghetti et viticulteur nous revient avec une sorte de polar mystique, avec comme tête de gondole Val Kilmer version Maïté (110kg), Twixt ! Un film craspec tourné en vidéo HD et avec des images-qui-font-peur-façon-Tim-Burton. Indice de tomates pourries dans la cagette : 90%.

L’autre, c’est la comédiepourenfantsfaçonalainchabat, Sur la Piste du Marsupilami. Là, plusieurs indices concordent : une bande annonce bien pourrie, très années 60, avec des gags rances qui font pas trop peur aux mamans, et une campagne de pub au contraire un peu trash, avec quelques sous-entendus sexuels douteux en vue des spectateurs visés ; mais surtout, nous disposons, en direct de Notre Agent au Kremlin, d’informations de première main sur le budget « images de synthèse », raboté par la production. Pas de bol, c’est le seul moment un peu magique de la bande annonce.

Après, c’est vous qui voyez…




samedi 10 décembre 2011


Intouchables : la non-critique
posté par Professor Ludovico

Voilà, c’est trop tard. Trop de monde me presse d’aller voir le Super Film de l’Année. Vaguement tenté au début, je n’ai plus du tout envie.

Pour comprendre, il faut entrer dans le petit cerveau schizophrène du Professore. Car dans ce cerveau, il y a un gros snob qui sommeille.

Un gros mot, snob. Élitiste, aussi. Des mots interdits dans notre culture démocratique, qui confond « accès pour tous à la culture », et « culture pour tous ». On n’est pas forcé, pas forcé du tout, d’aimer ce que la majorité aime. On n’est pas forcé de detester obligatirement non plus… Mais voilà, je n’aime pas les Chtis. Pas par atavisme social (le Professore vient du fin fond de la Beauce), mais par une trop grande cinéphilie. Si l’on va voir 5 ou 6 films dans l’année (moyenne nationale), les Chtis sont un divertissement comparable à d’autres, et même plutôt favorablement comparable à d’autres. Si on va en voir 5 ou 6 fois plus, on a des chances d’avoir vu des comédies plus drôles, plus fines, plus subtiles. C’est aussi mathématique que cela.
Pour en revenir aux Intouchables, il se trouve que lorsque j’ai vu la bande annonce, j’ai caressé l’idée d’aller voir le film : j’aime Omar, j’aime Cluzet, et l’histoire avait l’air suffisamment originale. Si je l’avais vu à l’époque, il est possible que je l’ai trouvé suffisamment sympa pour écrire une chronique élogieuse. Mais voilà, je n’y suis pas allé. Et son succès m’a dégoûté de le faire. Ce n’est pas bien dire ça, je le sais ce n’est pas très rationnel non plus, même pas subjectif, mais l’idée d’aller aimer le film que tout le monde aimait, c’était un repoussoir suffisant.

Pourquoi ? C’est dur à dire.

Il y a évidemment une volonté de s’extraire de la masse, de ne pas faire partie du Mainstream, qui est une caractéristique dominante chez moi : être de gauche à une table de sympathisants UMP ou vanter les vertus d’une Kalachnikov à la Fête des Voisins de Boboland, downtown Paris 11°. Mais aussi, sûrement, l’idée qu’un tel succès consensuel ne peut être que suspect. On m’opposera Titanic, ou Tintin (la BD) mais dans le fond, un tel succès touche forcément un nœud sensible de la psyché française, et ça me dérange.

Par ailleurs, et c’est formidablement analysé dans un récent article de Libé, le « chantage au vécu » que nous impose Intouchables (« c’est juste parce que c’est vrai, et comme c’est vrai vous devez rire et vous devez pleurer ») est tout simplement insupportable en tant que spectateur. On a le droit de manipuler le spectateur, mais pas celui de le prendre à la gorge pour lui imposer des sentiments…

Intouchable, en effet.




lundi 17 octobre 2011


3D : Apocalypse Now!
posté par Professor Ludovico

Non, ce n’est pas ce que vous croyez, Coppola n’a pas décidé subitement de convertir son chef d’œuvre pour faire plus de brouzoufs. C’est juste qu’on apprend dans un récent article de Libé sur le MIPCOM (un salon des programmes TV), que la 3D, ça va mal. Pas du côté de la production, qui continue d’aligner le répertoire en 3D (Les 3 Mousquetaires…), mais non, les téléviseurs. On devait en vendre de 7 à 20 millions, seulement 3 de vendus. La faute aux lunettes, qu’on ne veut pas porter à la maison, et le manque de programmes : un match de L1 par ci, un Cars par là, et du porno, du porno, du porno. Le genre, qui traditionnellement est précurseur des révolutions techno (ordinateurs, webcams, Internet…) ne semble pas suffisant pour tirer la stupide charrue 3D.

Pour une raison toute simple : la 3D ne sert à rien. Elle n’amène pas plus de réalisme, pas plus de confort d’utilisation, et aucune émotion supplémentaire.

Moi, j’vous l’dit, c’est mort !




vendredi 12 août 2011


Le Gamin au vélo, deuxième
posté par Professor Ludovico

Une des passions secrètes du Professore, c’est le scrapbooking. On achète des grands cahiers noirs destinés à la compta, on découpe des articles, des photos, des tickets de cinéma, et on colle ça au petit bonheur la chance. On fait ça en vacances, une fois qu’on a accumulé trois kilos de vieux journaux… Et là, au dos d’un article sur Lady Gaga qu’on est en train de découper, une perle : un article sur les frères Dardenne au Festival de Marrakech, pre-Gamin au vélo.

O joie ! Nos intuitions d’aujourd’hui soudain corroborées par un article venu du passé, on se croirait dans une nouvelle de Philip K. Dick adaptée par John Woo, avec Nicholas Cage dans le rôle du Professore…

Et là, je cite, Libération du 15 décembre 2010, « Marrakech ouvre l’atlas du cinéma » : « A chaque fois, on se dit pas de plan séquence… et puis on craque. On aime le plan séquence parce qu’on aime pas couper, on ne sait pas couper » On avait remarqué.
Et deuxième citation : « Il ne s’agit pas de peindre la vie, il s’agit de faire une peinture vivante […] De toutes façons, ce que l’on attend des acteurs, c’est qu’ils ne jouent pas… »

Merci les gars. On avait compris.




vendredi 5 août 2011


Le Gamin au Vélo
posté par Professor Ludovico

Allez, ça continue ! Malgré la Fatwa lancée par Faram el Keeper, St Jérôme, dit « le Serpent du Tout-Puissant » Michel le Vaillant, Maître du Temple de Saint-Jean d’Acre depuis 1213, je brave l’interdit : je vais voir mon premier Dardenne.

Que les choses soient bien claires :

– Je n’ai rien contre le cinéma français ; malgré les chroniques comminatoires, injustes, à charge, vachardes, méprisantes, condescendantes dont j’ai pu l’affubler ici, j’aime le cinéma français. Celui de l’Age d’Or des années 30-40, (Quai des Brumes, Les Enfants du Paradis, Le Jour se Lève, …), celui des classiques des années 50 (Les Diaboliques, La Traversée de Paris…) Ou pas classiques (Godard and co…), celui des années 60-70 (Rappeneau, Boisset…), des années 80, ou d’aujourd’hui (Desplechin, Audiard, Klapisch…)

– J’aime le cinéma d’auteur : Fellini, Antonioni, Welles, Kubrick, Despleschin, Lynch, Fincher…

– J’aime la Belgique : Hergé, Brel, Simenon, Poelvoorde, Eddy Merxcx…

Mais voilà, il faut le dire, le cinéma des frères Dardenne (sur la base d’un seul film, je le reconnais) est proche du degré zéro de la performance artistique.

Prenons un exemple extérieur, pour mieux nous faire comprendre; imaginons que l’on demande à des artistes de nous représenter un vélo. Oui, un vélo.

Gainsborough* magnifierait la campagne anglaise en posant le vélo le long d’un chemin du Sussex. Roger van der Weyden ne peindrait que sept rayons au vélo, voulant symboliser par là même les Sept Vertus Cardinales, tandis que Georges de la Tour les peindrait tous, pour montrer comment le reflet d’une bougie les affecte chacun différemment. Picasso dessinerait des roues carrées, pour montrer l’absurdité de la vie, et Damien Hirst détruirait au bulldozer un vélo par jour, pour dénoncer la société de consommation…

Tout ça, que vous l’aimiez ou non, c’est de l’Art. C’est un message, une position face à la vie.

Et les frères Dardenne, dans tout ça ? Les deux belges achètent un jetable chez l’épicier du coin, prennent le vélo en photo devant l’épicerie et se barrent avec la caisse en hurlant « Nous filmons la réalité !!! »

Ce qui prouve qu’ils n’ont rien compris à leur devoir d’artiste. Si on filme la réalité, c’est qu’on fait du documentaire, ce qui est un autre – et noble – métier. Comme le disait Emmanuel Krivine, le créateur du Village Français, «On ne va pas au cinéma voir comment les choses se sont exactement passées. ».

Aucun point de vue, aucun message, aucune espèce de travail sur l’image, le son, le cadrage, le jeu d’acteur : le cinéma des Dardenne, c’est en fait une ode à la fainéantise. Je déteste habituellement cette phrase, mais ici elle s’applique parfaitement : « N’importe qui pourrait faire pareil ». Essayez ! Prenez votre iPhone, trois-quatre copains, un vélo, un gosse, je vous jure que vous faites le même film.

Il y a pourtant de quoi faire dans le sujet : l’abandon d’enfant, le désir maternel, le recrutement des petites mains par les caïds des banlieues… Il y a aussi des pointures (Cécile de France, Jérémie Régnier) mais non, les frangins posent leur caméra, ça tourne, elle est bonne…

Ce cinéma de l’inutile que nous propose les frères Dardenne ne vise en réalité qu’un seul public, celui du cinéma lui-même, celui qui s’accorde des subventions (« banlieue »-« enfance »-« rédemption » étant les mots de passe pour accéder à l’Avance sur Recettes), et qui s’autocongratule dans le monde clos des célébrations professionnelles (César des Ours de la Mostra des Alpes Maritimes)… Un monde où l’on peut donner deux palmes déjà aux frères Dardenne, mais zéro à Kubrick, zéro à Welles, Bergman, Truffaut, etc.

Pas de quoi s’énerver, donc, car justice est déjà faite : les films des frères Dardenne n’ont jamais rencontré de succès public, ne passent pas à la télé (odieux complot contre la Culture), et seront vite oubliés comme de mauvais jambon-beurre de supermarché…

Les artistes officiels finissent toujours à la poubelle…

*Je sais, Gainsborough n’avait pas de vélo…




mardi 17 mai 2011


Tree of Life, l’Arbre médiatique qui cache la forêt critique
posté par Professor Ludovico

Nous avons déjà dit ici tout le bien que nous pensons de La Ligne Rouge, le chef d’œuvre militaro-rousseauiste de Terrence Malick. Nous avons aussi, ensuite découvert le reste de l’œuvre – parait-il culte – de Malick, Badlands, Les Moissons du Ciel… Comme nous avons dénoncé la pauvreté scénaristique d’Un nouveau Monde.

Nous n’avons pas encore vu Tree of Life, et nous irons le voir, évidemment, mais il est étonnant de voir la propension naturelle de parler d’un film que personne n’a vu. « Nouveau chef d’œuvre », « 2001 de Malick », « œuvre prophétique », : que n’avons nous pas entendu sur ce film que personne n’avait pu voir. Il y a deux jours, L’Express crevé l’abcès, avant la projection à Cannes ; le film est lourdingue, matinée de philosophie New Age, et trop long.

Tout ça pour ça.

C’est oublier que les films de Malick, en dehors de La Ligne Rouge, ne sont pas géniaux. Ils sont très beaux, élégiaques, pastoraux, tout ce que vous voulez, mais pas géniaux.

Mais la presse, et le public – son meilleur complice – ne veut pas rater la prochaine hype.

Voilà donc Malick bombardé Kubrick.

On attendra encore un peu pour se prononcer.




lundi 9 mai 2011


Le Jour le Plus Long
posté par Professor Ludovico

Enfant, j’ai trois souvenirs de cinéma : le premier, c’est Les Aventures de Bernard et Bianca, en salle – à Paris ! – avec mon parrain et ma marraine. Ensuite c’est Cléopâtre, à la télé, alors que j’étais censé être couché. Et ensuite, c’est les films de guerre, avec papa, au cinéma de Dourdan.

Probablement qu’il ne se forçait pas trop pour y aller, mais il n’en demeure pas moins qu’il m’a emmené en voir beaucoup : Le Pont de la Rivière Kwai, Les Canons de Navaronne, et Le Jour le Plus Long. C’est à mon tour, maintenant, de montrer le film de Daryl Zanuck, au Professorino. Je ne me force pas trop non plus.

Avouons-le, Le Jour le Plus Long est un film nul. Ce qui passe dans le livre (une suite d’anecdotes tour à tour croustillantes ou émouvantes) ne passe pas du tout en film. Pas de début, pas d’enjeux, pas de fin. Juste un défilé insupportable de cabotinages anglo-américano-franco-allemands.

Et surtout, une belle dose de propagande yankee.

Dans le film, les allemands sont bêtes, disciplinés, et antinazis évidemment (Guerre Froide oblige, il faut se réconcilier avec l’ennemi d’hier, qui gardent maintenant le Rideau de Fer). Les allemands n’ont pas prévu le débarquement, les allemands sont mal organisés, les allemands ne veulent pas réveiller le Führer.

Rien n’est moins vrai, bien sûr. On sait aujourd’hui que les allemands se doutaient d’un possible débarquement en Normandie, mais qu’ils n’y ont pas cru le 6 juin, et que leur objectif principal était de rejeter les alliés à la mer, ce qu’ils ont failli faire. Car contrairement à la légende propagée par les films américains des années 60, les allemands se sont battus avec courage et acharnement. Pendant tout le mois de juin dans le bocage, ils ont infligé de lourdes pertes aux anglais et aux américains, et désorganisant gravement le ravitaillement allié.

Ça, évidemment, Le Jour le Plus Long n’en parle pas, tant il se concentre sur l’enfilage de perles, c’est à dire les actions héroïques isolées. Ainsi les français (Bourvil, Jean-Louis Barrault, George Wilson) sont résistants et concons, les anglais, courageux mais un peu coincés, les écossais têtes brûlées, les portugais sont gais, les espagnols sont gnols…. et les américains… courageux et cools. On mâche du chewing gum, on balance des vannes (John Wayne, Mitchum), et surtout : on n’attache pas son casque !! Sommet de la coolitude ! Si j’ai appris quelque chose dans les cinquante semaines que j’ai passé dans cette vénérable institution qu’est l’armée francaise, c’est qu’on attache son PUTTTTAAIN de casque !

Moralité, le gratin d’Hollywood passe trois heures à mettre son casque, enlever son casque, ramasser son casque, remettre son casque… Rires garantis…

Passez donc votre chemin, même si, comme moi, la nostalgie vous y a poussé.




vendredi 6 mai 2011


Apocalypse, enfin Now!
posté par Professor Ludovico

J’ai failli attendre, comme disait Napoléon ou Louis XIV à je ne sais plus qui. Mais voilà : Apocalypse Now!, pas Redux, est enfin disponible ! Le chef d’œuvre de Coppola, le seul, l’unique, et aussi l’unique objet de mon ressentiment, car l’auteur du Parrain nous a joué une mauvaise farce. Voyant son ex-ami George Lucas (ex-ami, depuis que Coppola s’est foutu de sa gueule en créant, dans Apocalypse Now! – justement -, le personnage du foutraque Colonel Lucas, joué par… Harrison Ford), son ex-ami, disais-je, se faire des Etoiles Noires en platine avec son Star Wars’ Director’ cut, Coppola décida d’en faire autant avec son diamant vietnamien.

Las ! Ce diamant était déjà très pur, et difficile à tailler (ce qui n’était pas compliqué avec Star Wars : gnark ! gnark!) Apocalypse Now! Redux fut donc la daube que l’on sait : complexité pour rien (le monologue lourdement explicatif de Brando, in extenso), élargi sans raison (les scènes interminables dans la plantation française), changeant même de sens (Willard devenant un sympathique voleur de surf), bref une perversion totale de l’équivalent cinématographique du Voyage au Bout de la Nuit.

Pour vingt quatre malheureux euros (ça fait combien en francs, mademoiselle Le Pen?), vous disposerez donc d’un Blu-ray d’Apocalypse Now! Redux (vous pouvez l’offrir à quelqu’un qui n’aime pas le cinéma), un livre sur « les secrets du tournage » (idem), et surtout deux trésors absolus : Apocalypse Now!, l’unique, et Heart of Darkness, a Filmmaker Apocalypse, le seul veritable making of que je connaisse, réalisé par madame Coppola elle-même. Un doc à ne rater sous aucun prétexte : l’infarctus de Martin Sheen, les délires de Brando, Coppola baisant les Playmates, l’équipe qui carbure au défoliant, tout y est.

Seul problème : je n’ai pas de Blu-Ray.




samedi 30 avril 2011


Inflation du nylon
posté par Professor Ludovico

Abondance de biens ne nuit pas ? Je ne suis pas sûr ! Par exemple, prenez le déluge actuel de films de superhéros : déjà vus, prêts à sortir ou en préparation… Thor est sorti cette semaine (dirigé par Kenneth Branagh, tout un symbole !), et on nous prévoit Captain America, les Avengers, un prequel aux X Men,un troisième Batman « Nolan », un premier Superman « Snyder » et même une nouvelle franchise Spiderman

Personne ne nous force, me direz vous… Mais sincèrement, cette programmation m’écœure (ou simplement m’éloigne) du cinéma. J’ai l’impression d’être dans un fast food où l’on me propose que quatre produits distincts : comédie américaine « Un Gars, Une Fille« , film d’animation avec des animaux « Rango&Rio, les Cars de l’Age de Glace« , film français « J’irais manger quelque part si tu ne m’embrasses pas » et… film de super héros.

Je n’ai jamais aimé les superhéros. Tandis que mes copains se jetaient sur Strange, un cousin imprimeur m’amenait des pelletées de Pif Gadget. Et dans Pif, il y avait certes Pif et Hercule, Placid et Muzo, mais surtout Glop! Glop! : Hugo Pratt, La Ballade la Mer Salée. Je ne veux pas frimer, je lisais aussi Battler Britton, et ses spitfires en flammes au dessus de la Manche.

Tout ça pour dire que je suis un cas assez unique chez les quadra : un réfractaire à la nostalgie en nylon. J’aimais bien L’Araignée en dessin animé, donc j’ai bien aimé le premier Spiderman de Sam Raimi. Mais pour le reste, le concept d’un type qui se déguise en justaucorps bien moulant m’a toujours paru absurde. Mettre un masque pour cacher son identité tout en choisissant une cape bien flashy, et, en général, d’un goût douteux, ma toujours laissé dubitatif… sans parler de cette propension à vouloir sauver le monde parce qu’on a un trauma familial (père tué, mort sur Krypton, ou dieu du Valhalla)…

Très logiquement, j’ai aimé les films destructeurs de cette mythologie : Incassable de Shyamalan, ou Hancock, de Mr Berg : pourquoi as-tu quitté le projet Dune, mon petit Peter ?? Oui, pourquoi ? Pour faire un autre film de Superhéros ?

Parce que le drame est là, en fait : Hollywood se mord la queue en tournant toujours les mêmes films, alors que des milliers de sujets géniaux attendent une adaptation ; Dune, confié à un tâcheron, Lovecraft, toujours pas de film à l’horizon, et les centaines de chefs d’œuvre de la SF toujours pas adaptés : le Cycle des Epées de Leiber, Elric de Moorcock, Ubik, de K. Dick, Demain les Chiens, de Simak, Les Monades Urbaines, de Christopher Priest, l’Orbite Déchiquetée de Brunner, les Princes d’Ambre de Zelazny, et à peu près tous les Frank Herbert…

Non, le cinéma Hollywoodien, depuis l’éclosion de Spielberg-Lucas à la fin des années soixante-dix, a décidé de ne s’adresser qu’au gosse qui est en nous.

C’est bien dommage.

*Hier soir, mon ami Philippe m’a proposé en avant première de voir Le Trône de Fer, la saga brillante de George Martin adaptée par HBO. Visuellement, scénaristiquement, ce pilote est une réussite : ambitieux et pédagogique à la fois, pour un livre aux intrigues multiples, complexes, et adultes. Un prototype de cinéma adulte inenvisageable désormais sur grand écran.




samedi 5 février 2011


Shining
posté par Professor Ludovico

Parmi les promesses non tenues du Professor, il y avait celle de chroniquer – en un an – tout Kubrick.

Essayons d’avancer dans cette vaste tâche en visant l’Hôtel Overlook, ses charmants concierges (Nicholson, Duvall) et le petit Danny (Danny Lloyd), qui voit des choses qu’il ne devrait pas voir à son âge : en un mot, Shining !

L’occasion nous en est donnée par la diffusion de la version longue, inédite en France, par les merveilleux petits gars de TCM. Cessons d’ailleurs la polémique tout de suite : la version longue n’apporte rien à Shining, si ce n’est de l’eau à notre moulin anti-director’s cut... Les segments ajoutés (essentiellement des scènes d’exposition) desservent plutôt la magie du film, explicitant des choses qui sont plus excitantes si elles restent dans l’ombre. Autrement dit : dis-moi ce que tu as coupé, je te dirais si tu es un grand cinéaste…

Shining, version courte donc.

Après le flop public et critique de Barry Lyndon, Kubrick a certainement besoin de remonter sa cote, en adaptant cet auteur de best-sellers qui monte, Stephen King. Seul Carrie a été adapté à cette époque-là, et les films d’horreur commencent à faire florès. Mais c’est aussi un principe chez Kubrick : « Je préfère adapter des romans de gare, que les chef-d’œuvres de la littérature : il y a moins de respect pour le livre, on peut faire ce qu’on veut ». Stephen King appréciera*

Mais, surtout, Kubrick est bien décidé, comme ailleurs, à édifier l’œuvre maîtresse du genre en apportant sa vision du film d’horreur. Pour cela, comme d’habitude, il travaille dur. Embauche Diane Johnson, une spécialiste de la littérature gothique, pour écrire le scénario. Se renseigne sur les phénomènes para-normaux, fantômes, poltergeist, etc. Et en tire une conclusion toute simple, et pourtant inédite : les gens qui disent avoir vu des fantômes ne décrivent jamais des figures éthérées, avec un grand drap blanc, qui crient houhou ! Shining proposera donc des fantômes « normaux », qui ressemblent à vous et moi.

Et ce n’est pas parce qu’on est dans un « roman de gare » – excellent au demeurant – que Kubrick va renoncer à ses obsessions : au contraire, comme Shining est une œuvre simple, elle sera un véhicule encore plus idéal de la pédagogie Kubrickienne.

Le Masque
Chez Kubrick, tout fait masque. Le visage, grimaçant, ironique, rieur, ou chargé de conventions sociales, est présent dans tous les films du maître : le singe grimaçant de 2001, le sourire sardonique d’Alex ou de ses ennemis, la morgue de Lord Bullingdon, les 3 rôles de Peter Sellers dans Dr Folamour, la War Face du Soldat Baleine ou du Joker de Full Metal Jacket, tout est dit. Sans compter le nombre incroyable de vrais masques emplissant l’œuvre kubrickienne : les masques-pénis d’Orange Mécanique, les masques vénitiens d’Eyes Wide Shut, les masques des gangsters de L’Ultime Razzia

Shining, le livre, est très inspiré par Le Masque de la Mort Rouge, de Poe ; on trouve d’ailleurs ce masque, à un moment, dans un ascenseur de l’Overlook… Bizarrement, Kubrick s’est délesté de cette intrigue dans sa version de Shining. Peut-être parce que avec des acteurs comme Jack Nicholson, Shelley Duvall, ou même le jeune Danny Lloyd, on n’a pas besoin de masques ; ils sont des masques eux-mêmes. Danny, dans ses silencieux cris de terreur, face aux visons des sœurs Grady ou de l’ascenseur déversant des hectolitres de sang, Wendy dans son visage de Bugs Bunny desperate housewive, puis ensuite, de Bambi aux abois, et enfin, Nicholson, qui trouve certainement son apogée dans ce rôle, où il enchaîne les masques du début à la fin. Le masque de la conformité sociale (son entretien d’embauche), ses premiers sourires sataniques, sourcils en accent circonflexes (quand il raconte, avec une jouissance évidente, une histoires de cannibalisme à son fils), au masque du possédé (hurlant dans les couloirs déserts), au loup (dans ce rêve atroce où il prévoit le massacre de sa famille, son seul moment touchant du film), et enfin, évidemment, en masque de la mort blanche, zombie ridicule, car ridiculisé par sa propre descendance…

Le conte de fées
Thème spécifique à Shining, mais qu’on retrouvera aussi dans Eyes Wide Shut, le conte de fées est la préoccupation centrale du film. Durant sa préparation, Kubrick s’est beaucoup intéressé à Freud, et à La Psychanalyse des Contes de Fées de Bruno Bettelheim. Très classiquement chez Kubrick, le film aborde les thèmes habituels de la psychanalyse, mais ne propose aucune explication psychologisante quant aux agissements de ses personnages…

Mais ici, c’est le conte est omniprésent : Shelley Duvall en Petit Chaperon Rouge dans le labyrinthe, Danny en Petit Poucet camouflant ses traces dans celles de son père (je marche dans les pas de mon père ?), Jack jouant au Grand Méchant Loup (« Little pigs, little pigs, let me come in. I’ll huff and I’ll puff, and I’ll blow your house in ! ») Le film d’horreur, qu’est-ce d’autre qu’un conte de fées des adultes ? Kubrick comprend que cette histoire est universelle, comme les contes de fées : le père veut tuer le fils, de peur de perdre sa place auprès de sa femme, le fils doit le tuer le père pour survivre…

Les mythes grecs
Autant que de contes, Shining est nourri de mythes grecs, à commencer par Œdipe, évidemment, le fils qui tue le père… Comme dans Lolita, comme dans Barry Lyndon, l’enfant est l’obstacle de la vie de couple. Ici, on voit comment l’enfant-Shining, l’enfant qui brille, efface le père et accapare l’attention de la mère. Dans ce cas, il ne reste au père castré que désoeuvrement, boisson, et rêveries… Ce qui ramène vite vers les mythes ancestraux, Thésée-Danny et Ariane-Wendy luttant contre le minotaure dans le(s) labyrinthe(s) : « Cette cuisine est un vrai labyrinthe », dit Wendy à Halloran, le cuistot noir. « Vous n’aurez pas à vous en servir, Mrs Torrance ». En fait si, pour s’emparer de l’épée magique-couteau de cuisine… Mais il y a aussi Eros et Thanatos….

Le sexe
Thème Kubrickien par excellence, la sexualité est ici dans son rôle classique d’Eros : l’opposant, le complément à Thanatos : avoir peur pour être excité, ou avoir peur d’être excité ?

Au début de Shining, on ne pense pas que le sexe va être très important, vu le casting mis en place : Shelley Duvall n’est pas Debra Winger, c’est le moins qu’on puisse dire. C’est même l’antithèse des grandes prêtresses Kubrickiennes : Lolita, les putes vietnamiennes de Full Metal Jacket ou Madame Cruise
dans Eyes Wide Shut… Non Shelley Duvall, c’est l’anti-femme : une petite fille, habillée n’importe comment, ou une mère un peu trop protectrice de son fils ; dans tous les cas, une hystérique… On comprend que son mari se réfugie dans l’alcool, ou, discrètement, mate les serveuses de l’Overlook dans le dos de sa femme.

Mais le problème est-il là ? Car on apprend plus tard, lors d’une conversation à bâtons rompus avec Satan lui-même (ou, Lloyd le barman, son avatar dans les Rocheuses), que Jack a des petits problèmes avec sa « banque du sperme »… Jack n’a donc pas que des problèmes de créativité… Et voilà l’homme impuissant, supplanté par son fils dans le cœur de sa femme, bientôt boiteux, qui cherche l’excitation là où il le peut… Dans le sport, en lançant bruyamment sa balle de baseball contre le mur (un appel à madame ?), ou dans ses fantasmes, qui se superposent bientôt aux fantômes de l’hôtel : la femme de la baignoire, l’ours câlin, etc.

Et il y aussi, de manière très appuyée, deux plans sur les pinups blacks de la chambre d’Halloran à Miami. Quel sens donner à ses plans, très insistants (deux fois le même mouvement de caméra, en champ contre champ, sur le cuistot couché sur son lit ? Quel sens, sinon, celui d’un homme sûr de sa sexualité ; Halloran est en effet l’homme fort de Shining, le vrai père, le vrai mari. Celui qui traverse les États-Unis, brave la tempête, et sera tué pour sauver Danny et Wendy. C’est l’ennemi à abattre pour Jack Torrance, le « nigger » dont parle Grady, le type qui peut te piquer ta femme et ton gosse… Grady, le type, qui lui aussi n’a pu contrôler sa femme et ses filles…

Le Mal

« Satan, prends pitié de ma longue misère… » Quand on veut réellement quelque chose, cela arrive. Envie de boire un coup dans un hôtel vide ? Pensez-y très fort, et le bar s’illumine, empli de bouteilles « pourtant enlevées pour des problèmes d’assurance »… Un bar étrangement éclairé comme l’enfer, par en bas, et tenu par un étrange mais aimable Bartender, Lloyd, ou Satan lui-même… Du whisky ? Pas de problème ! On the rocks ? Ça roule ! Combien je vous dois ? Mais rien monsieur, votre argent n’a pas cours ici… Dans le pacte faustien, on veut plus que quelques dollars : votre âme, tout simplement ! Et quelques missions à accomplir : « corriger votre femme et votre fils, Mr Torrance » comme l’explique Grady, lui qui a déjà signé, il y a dix ans, le pacte avec l’Overlook.**

Le miroir
Le miroir est une figure très présente dans Shining. Symbole de la Porte vers l’Autre Côté, il permet d’accéder à d’autres réalités. Danny parle à Tony, son alter ego imaginaire, via le miroir de la salle de bains de Boulder. Le miroir ouvre aussi les portes de la conscience : REDRUM ne prend du sens (« Murder ») qu’une fois vu à l’envers, c’est à dire de l’autre côté du miroir, là où précisément se trouve Tony, et d’où il envoie ses prédictions à Danny. C’est aussi dans un miroir que Jack comprend qu’il n’embrasse pas une très belle femme, mais bien le cadavre putréfié de la chambre 237. Et on peut y ajouter le troublant effet de miroir Torrance/Grady dans les toilettes, où les rôles de chacun s’inversent à ce moment là : Torrance peut maintenant « remplacer » Grady…

Les problèmes de communication
Antienne Kubrickienne : malgré tous nos moyens de communication, nous restons des animaux, soumis aux aléas et aux caprices de la nature. Wendy – qui ne communique plus avec son mari – cherche un peu de contact humain grâce à la radio de l’hôtel. Malgré l’attitude amicale des Park Rangers, ces échanges resteront vains, extrêmement codifiés (la répétition mécanique du mot « over »…)

Car malgré la technologie, tout cela ne sert plus à rien quand la mécanique se détraque : on pense alors aux messages glaçants, décalés dans le temps à cause de la distance, des astronautes-robots de 2001. Comme Wendy, ils essaient de rester humains en partageant un gâteau d’anniversaire virtuel à des millions de kilomètres de là… Ou à Dr Folamour, quand un misérable incident Kafkaïen ruine le tout-puissant système de télécommunications de l’US Air Force et détruit l’humanité toute entière…

A un moment ou à un autre, la technique vous lâche (HAL 9000, une machine à crypter sur un B-52, un ou deux transistors dans un poste radio à l’Overlook Hotel). L’homme retombe alors à l’état de nature, perdu dans les solitudes glacées de l’espace, des Iles Aléoutiennes, ou des Montagnes Rocheuses…

Les relations sociales
C’est une figure de style, un passage obligé de l’œuvre kubrickienne… La complexité, la rigidité, l’extrême codification des relations sociales… Une préoccupation constante, étonnante chez ce fils de bourgeois, probablement pas si intégré que ça dans le New York des années 40… Barry Lyndon, Eyes Wide Shut sont centrés sur ce thème (comment accéder aux strates supérieures de la société ? quels usages respecter ? quels sésames, quels mots de passe pour appartenir cette noblesse supérieure ?) D’autres films comme Shining, se contentent de l’évoquer. Ici, tout commence dans l’entretien de recrutement ; Jack Torrance joue le jeu de la convivialité, s’efforce de ne donner que les réponses attendues, bref il se « conforme ». En face, pourtant, on lui tient un discours de franchise : « quelqu’un s’est déjà suicidé dans cet hôtel, vous êtes sur que vous tiendrez le choc ? » Mais non, passage obligé du film d’horreur, Torrance élude le problème « Ma femme adore les films d’horreur… » On notera dans cette scène le dispositif en triangle, un classique chez Kubrick : le manager, Ullman, parle à Nicholson. Dans un coin, un personnage subalterne se tait, et observe Torrance comme un insecte. Cette scène existe plan pour plan dans Orange Mécanique : l’écrivain parle à Alex (dont la nourriture est droguée) ; une femme, dans un coin, l’observe. Quel est leur rôle, si ce n’est souligner les ambiguïtés des liens sociaux ? Qui fait quoi ? Malgré la franchise, les sourires en coin, l’apparente décontraction, qui va manger qui ? Retour à la nature, au territoire, à la bestialité ? Shining est l’écrin parfait pour cette thématique-là…

L’auteur
Terminons par la thématique la plus importante, et la plus troublante sûrement, de Shining, celle de l’auteur, et de la créativité. Troublante, car on ne peut s’empêcher d’y voir la projection de l’ego angoissé de Kubrick lui-même, d’autant que cette thématique est unique dans l’oeuvre de Kubrick. Aucun autre film ne s’est penché sur les mystères de la création artistique, et il n’existe aucun personnage, dans toute l’oeuvre SK, si ce n’est le terrifiant Jack Torrance, pour représenter l’Artiste…

Alors pourquoi ? Stanley Kubrick vit-il un passage difficile à ce moment-là, comme nous le supposions dans l’introduction ? Est-il lui aussi emmuré dans son manoir, cherchant une inspiration qui ne vient pas, après l’échec de Barry Lyndon ? Se trouve-t-il un frère dans ce « petit roman de gare » ? est-il lui aussi, entrain de jeter une balle de toutes ses forces, de tout son désespoir contre les murs de son Overlook personnel ? Rappelons une anecdote connue : entre deux films, Kubrick travaillait seul dans son bureau, et lisait des pléthores de livre en vue d’une prochaine adaptation… Il ne lisait en fait que les premières pages, convaincu qu’il pouvait se faire une idée très rapidement de l’intérêt du livre. Si celui-ci ne lui plaisait pas, il le jetait bruyamment contre le mur. « Quand je n’entendais plus de « bong » caractéristique pendant vingt minutes, je savais que le prochain film de Stanley Kubrick était en route » raconte sa femme…

Difficile de ne pas faire le rapprochement entre Jack Torrance, sa femme et son fils, enfermé dans un gigantesque hôtel désert, visité par les fantômes, et Kubrick le « reclus » volontaire de Childwickbury, son manoir anglais, entouré de sa femme et de ses filles. Lui aussi essaie d’écrire (rappelons également qu’il n’y a AUCUN scénario écrit par Kubrick, que des adaptations, souvent écrites à quatre mains). Lui aussi est sûrement ennuyé par les interruptions de sa femme, de ses filles, lui aussi a peut être envie de les « corriger », lui aussi est visité par tous les fantômes qu’il a lui-même créé, Alex, Dr Folamour, Lord Bullingdon, Hal 9000, …

Cette vision terrifiante de la création ne laisse d’interroger. Torrance s’ennuie, Torrance meugle comme un loup, bave, retape sans arrêt « All work and no play makes Jack a dull boy** », mais n’arrive a rien sur son roman, si ce n’est à susciter les commentaires incompétents de sa femme « ce qu’il faut c’est travailler un peu tous les jours ! »… A la fin, Jack va fournir sa plus belle création : une galerie de personnages terrifiants, un hôtel hanté, des fêtes, une femme en petite tenue, tout est là, dans sa tête, et ne demande qu’à éclore du labyrinthique cerveau du créateur…

Une image splendide est là pour le rappeler ; tandis que Wendy et son fils explore pour la première fois le labyrinthe végétal de l’hôtel, jack contemple la maquette de celui-ci dans le hall de l’hôtel. En une coupe, Kubrick passe de la maquette à un plan vertical, irréel, vu d’oiseau, du vrai labyrinthe ; en tout petit, deux silhouettes s’animent, Wendy et Danny : « Nous sommes arrivés ! »

Car toute cette histoire ne se passe-t-elle pas seulement à l’intérieur du cerveau torturé de l’écrivain ? Ce qui fit notamment le succès du film à sa sortie, ce sont les ambiguïtés du film : Torrance devient-il fou d’isolement, ou l’hôtel est-il hanté ? Brutalise-t-il son fils, ou est-ce l’œuvre de la femme de la chambre 237 ? Grady existe-t-il, ou Jack n’est-il qu’une énième incarnation, comme semblerait le prouver l’énigmatique photo finale, montrant Torrance présent au bal du 4 juillet … 1921 ?

Ou Jack a-t-il simplement, en mourant, rejoint la fête éternelle de l’hôtel Overlook ?

A-t-il rejoint son « Home », comme le chante Henry Hall et son Gleneagles Hotel Band, en lointaine musique de fond, comme perdu dans l’espace, en contrepoint de la fameuse scène des toilettes ?

*Stephen King se vengera en se démolissant Shining, le film, dans la presse américaine, avant de se raviser, vu le carton au box office. Des années plus tard, toujours plein de bile, il dirigera « son » Shining, une tentative pathétique d’adaptation ultra-fidèle et donc, parfaitement ratée !

**Pour le fun, on notera aussi que cette scène se déroule dans une pissotière incroyablement reconstituée aux Studios Shepperton. Pourquoi des toilettes ? Pourquoi celles-là ? Autre coïncidence troublante, Grady qui apparaît dans ces toilettes, s’est suicidé en se mettant un fusil dans la bouche. 7 ans plus tard, dans Full Metal Jacket, le Soldat Baleine fait la même chose… Dans les toilettes de la caserne des Marines… Fantasme morbide de Stanley !?

*** autre mystère : qui a tapé ces milliers de ligne à la machine ? Stanley lui-même, ou un obscur assistant ? on peut se poser la question, quand on voit que ces dizaines de pages sont adaptées dans la version française « Un Tien vaut mieux que deux tu l’auras »…




décembre 2025
L M M J V S D
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
293031