[ Le Professor a toujours quelque chose à dire… ]

Le Professor vous apprend des choses utiles que vous ne connaissez pas sur le cinéma



jeudi 10 septembre 2009


Eyes Wide Shut
posté par Professor Ludovico

J’avais pris des engagements Kubrickiens au début de l’année, et puis vous savez ce que c’est, le boulot s’accumule (The Wire-Lost-les Tudors), et on a le temps de rien. Et puis tout à coup hier soir, l’insomnie pointe : il est temps de regarder Eyes Wide Shut.

Ce qui est important de noter, tout d’abord, c’est que c’est le dernier film de Kubrick. On dit que les chats sentent leur mort venir, eh bien les grands cinéastes, aussi. Le grand Stanley se lâche dans Eyes Wide Shut comme jamais. On retiendra par exemple que le dernier mot proféré à jamais par le Maître (du moins, dans ses films, mais s’est-il jamais exprimé ailleurs ?), ce dernier mot, c’est « Fuck ».

Ça ouvre à toutes les interprétations possibles (fuck the studio, fuck la censure), mais pas besoin d’aller bien loin : Eyes Wide Shut est le 2001 du sexe. Du fessier de Nicole Kidman (plan 1), à cette dernière réplique, rien n’aura changé sous le soleil : on déclinera le fuck à toutes les sauces.

Alors Kubrick, pervers pépère sur le retour ? Sûrement pas, tant son œuvre est irriguée par le sexe : des sous-entendus graveleux de Spartacus, des orgies de Barry Lyndon à Orange Mécanique, des viols de Full Metal Jacket aux problèmes de fluides corporels de Dr Folamour, le sexe n’est pas ce qui manque aux films du sexologue SK. Avec en ligne de mire, l’irrationalité de nos pulsions, la sauvagerie bestiale du désir.

Mais là, dans EWS, il y a une ambition particulière : faire un film entier là-dessus, sur le désir et la jalousie, sur l’incompréhension entre les sexes. Et une autre ambition, plus perverse : faire tourner ensemble le couple le plus hot du moment, Cruise-Kidman. Un viol des conventions, deux giga-stars vont tourner ensemble, faire l’amour ensemble, puis avec d’autres, se déchirer, une prise de risque énorme pour des acteurs de ce niveau. Mais bon, qui refuse quelque chose à Kubrick ?

Ça commence donc très fort, comme un disclaimer de jeu vidéo : interdit au moins de 18 ans, on n’est pas là pour rigoler. Premier plan : les fesses de Mrs Kidman. Deuxième plan : Nicole s’essuie après avoir fait pipi. Troisième plan, elle remet sa culotte. En 1999, le choc est énorme : on entre dans les cuisines des Cruise. Imaginez aujourd’hui la même chose avec Angelina Jolie et Brad Pitt…

Mais cet effet de banalité, appliqué sur des stars habituées au Walhalla Hollywoodien, c’est à la fois une méthode de domination de Stanley (« Vous ferez tout ce que je vous demanderais »), mais aussi un introduction au propos d’Eyes Wide Shut : Qui suis-je ? Qui est réellement ma femme ? Où suis-je dans l’échelle sociale ?

Car Bill Harford a toutes les raisons d’être satisfait de lui-même : médecin new-yorkais réputé, femme superbe, petite fille gentille, appartement somptueux orné de toiles de maître*, et des amis hauts placés. Pourquoi semble-t-il aussi coincé, pendant cette première demi-heure du film ? Pourquoi sa femme semble-t-elle excédée, dès qu’elle n’est plus dans le champ de vision de son mari ?

Bill Harford va bientôt découvrir qu’il vit dans une illusion, et que, si haut que l’on soit dans l’échelle sociale, on est toujours le laquais de quelqu’un. Bill Harford, grand médecin, n’est que l’éboueur de gens beaucoup plus puissants que lui.

Comme l’a formidablement raconté Frederic Raphael dans son livre Deux ans avec Kubrick, le réalisateur n’a jamais vraiment expliqué le changement radical appliqué à la nouvelle de Schnitzler, Rien qu’un Rêve. Dans cette nouvelle, qui se déroule dans le Vienne du début du siècle, c’est d’antisémitisme dont il s’agit. Le bon docteur croit être introduit dans la bonne société viennoise, mais juif il est, juif il restera. Fasciné par cette nouvelle, Kubrick a rêvé toute sa vie de l’adapter, et a fini par le faire. Mais il a demandé à son co-scénariste de la goyiser au maximum, en insistant notamment sur le fait que le héros devait avait un nom WASP, et passe-partout. Bill Harford était né.

Cette volonté simplificatrice, outre l’espoir de gommer peut-être certains aspects autobiographiques douloureux pour Kubrick, a sûrement aussi pour but de renforcer l’aspect conte de fées d’Eyes Wide Shut. Car c’est bien d’un conte de fées dont il s’agit. Un conte pour adultes, pour adultes consentants, mais quand même un conte de fées.

Le héros, gentil prince, subira mille épreuves pour revenir à la maison, transformé mais heureux. On ajouterait bien « pour toujours », mais Nicole Kidman nous l’interdit : « Forever ? Je n’aime pas ce mot ».

Avant, notre petit poucet aura traversé toutes les tentations du sexe, sans y succomber. Toutes les perversions, même : triolisme (les deux filles à la fête), prostituées, pédophilie (la très jeune fille du loueur de costume), homosexualité (le gardien d’hôtel), nécrophilie (Amanda à la morgue), et bien sûr, la fameuse orgie.

Pourquoi Bill en est arrivé là ? Tout simplement parce qu’à la 33ème minute, Mme Kidman lance le film. Un peu shootée, un peu pompette, elle démolit soudain son benêt de mari, qui croit tout savoir sur les femmes, le désir, les aspirations humaines. Et qui – très mâle américain -, aime sa femme, ne peut envisager l’adultère, et ne peut envisager que sa femme l’envisage « I love you. You’re my wife. I know you. I trust you. I won’t do it because you’re my wife… »

Mais mon pauvre, lui répond-elle, tu connais que dalle ! Non seulement tu ne comprends rien à mes désirs, mais rien non plus aux tiens !

Cette révélation déstabilise le pauvre Bill, qui entame alors son odyssée nocturne. Auparavant, Kubrick nous a infligée trente minutes pénibles, à contre-temps du reste du film : la soirée chez les Ziegler. Les dialogues y sont longs, très volontairement étirés, Cruise et Kidman jouent faux. On se demande dans quelle galère on est tombé. Pourtant, les indices kubrickiens sont là : nous sommes dans une phase préparatoire : observe bien l’insecte Bill, ami spectateur, car c’est de lui le héros de cette histoire. Ce garçon est faux, mais pas mauvais au fond. Sa femme va lui donner la bonne leçon dont il a besoin.

Cette leçon, c’est Manhattan, l’île de la Tentation : abasourdi par les révélations, ivre de vengeance, ressassant inutilement les images fantasmatiques de quelque chose qui n’a pas eu lieu (sa femme et l’officier de Marine), Bill Harford dans ses pérégrinations nocturnes va avoir maintes occasions de se venger de sa femme. Il ne cherche rien ; les femmes viennent à lui… Bizarrement, il ne cède à aucune. Un coup de fil de sa femme ? Il lui ment, mais renonce à coucher avec la jolie prostituée. La vieille fille est prête à l’emballer dans la chambre même où son père vient de mourir ? Le professionnalisme du Dr Harford reprend le dessus. On lui propose une mineure pas farouche, il refuse. Il retrouve la pute toxico de chez Ziegler à la Morgue ; plus trop professionnel, il se penche pour embrasser le cadavre, mais renonce, à dix centimètres du visage. Quand on est en conflit avec son désir, dirait le psy, c’est qu’on ne se connaît pas bien. Le Professore confirme : Bill Harford ne sait plus qui il est. Il passe son temps, d’ailleurs, à justifier son identité : « Je suis le Dr Harford » en montrant frénétiquement sa carte de médecin.

Mais le vrai test, c’est évidemment l’Orgie, scène centrale du film, étendard de Eyes Wide Shut. Bill Harford croit être quelqu’un ? Comment mieux le prouver qu’en entrant dans le Saint des Saints, réservé aux initiés qui connaissent le mot de passe magique ? Malgré la gentille fée (à poil) qui tente de le dissuader, il persévéra au risque de perdre la vie. La fée devra se sacrifier pour le sauver. Mais, humiliation suprême, l’épreuve n’en était pas une, cette cérémonie terrifiante n’était qu’un jeu de rôles pour capitaines d’industries partouzeurs. Un, mon petit Bill, tu ne fais pas partie de ce milieu, et deux, tu es un sacré parano ! Si au lieu de fantasmer, tu allais baiser ta femme, pour commencer ?

Cette chronique ne serait pas complète sans un passage en revue des thèmes d’Eyes Wide Shut. Marchons en cela dans les traces du livre séminal de Michel Ciment, Kubrick – que toute personne considérant le cinéma comme un art – devrait lire une fois dans sa vie.

Le Diable

Pour un film sur la tentation, qui emprunte parfois ses codes au film d’horreur (musique, éclairage), la présence du Grand Fourchu dans Eyes Wide Shut n’était pas une surprise. Il apparaît par deux fois, en séducteur hongrois chez les Ziegler, puis sous la forme du pianiste (petite barbiche, sourire machiavélique, et éclairage en contre plongée…) Le satanisme n’est pas loin, dans la cérémonie initiatique de l’orgie, mais aussi dans ces étranges éclairage de Noël chez les Ziegler, qui font penser à des pentacles maléfiques. Mais après, tout, Victor Ziegler n’est-il pas le vrai diable dans cette affaire ?

Eros et Thanatos

On dit que la présence de la mort est indispensable à la mécanique du désir : Kubrick reprend en tout cas cette thèse à son compte. Avant d’être érotique, Eyes Wide Shut fait surtout peur. Musique glaciale de l’orgie (opposée à la soupe jazzy de la fête new-yorkaise), masques terrifiants, déclaration d’amour dans la chambre d’un mort, embrassade de cadavres, sans parler du sida qui traîne : Kubrick joue sur les contrastes. L’éclairage du film est à l’avenant, opposant le violent au pastel, et les beiges/orangées, couleurs chaudes de la vie, au bleus glacials de la nuit et de la mort.

L’odyssée

On pense évidemment à Homère, et son héros voguant sur des océans dangereux, tandis que son épouse est restée à la maison. Bill rencontre des sirènes et des monstres, et rentrera aussi à la maison, heureux après un beau voyage. Mais on pense aussi à Joyce, à l’errance de Daedalus, le cocu de Dublin, et au monologue de Molly.

Venise/Shakespeare

Pas à proprement parler un thème, mais plutôt un motif : Venise, ou plutôt une Venise de pacotille, une Venise shakespearienne, parcourt le film. Les masques bien sûr, Dom Juan et le Commandeur, mais aussi Fidelio, et la pizzeria Vérone, ostensible dans les rues de New York.

Le conte de fées

Sa femme s’appelle Alice, et elle l’entraîne dans un wonderland pour adultes. Mais d’autres emprunts signe l’aspect fabuleux d’Eyes Wide Shut : les deux filles proposent d’emmener Bill « under the rainbow », allusion au Magicien d’Oz. Il finit par y aller, seul : le magasin de costumes s’appelle Rainbow. On y trouve des japonais bizarres, dont l’un d’entre eux est même habillé en lapin ! Et là, la fille du costumier murmure, presque de manière inaudible (comme un sort, ou un code secret) : « Vous devriez prendre un col d’Hermine ». Mystère et boule de gomme…

L’orgie est aussi une cérémonie initiatique : mot de passe, déguisement, masque pour entrer au château. Une gentille fée essaie de le prévenir, comme dans un rêve. Mais il sera démasqué et humilié, par son talon d’Achille : il ne connaissait pas un mot de passe… qui en fait n’existe pas, comme le révélera le Magicien (Ziegler). Au final, nous réalisons de plus que tout cela n’est rien qu’un rêve…

Les masques

C’est le gimmick du film, sa signature, mais c’est surtout qu’Eyes Wide Shut est un film sur les apparences. Bas les Masques ! Derrière le gentil bourgeois, père aimant, mari attentionné se cache quelqu’un d’autre. Bill ne cesse de se cacher, derrière une multitude masques : son nom, sa profession, son professionnalisme froid et mesuré (porte d’entrée dans la haute bourgeoisie, ou porte de sortie chez la vieille fille). Il croit pouvoir se cacher en empruntant des codes (mot de passe, déguisement), mais est trahi par son ignorance (il n’existe pas de mot de passe), sa bêtise (le contrat de location), et sa basse extraction (il est venu en taxi).

Noël

C’est le positionnement dans le temps de cette histoire (la fin de l’année), mais c’est sûrement plus que ça. Dans presque tous les décors, il y a des sapins de Noël. Au début assez évidents, ils deviennent un sujet d’interrogations a posteriori, d’autant que le film se termine dans un magasin de jouets. Car en rentrant chez lui après son ultime épreuve, Tom Cruise éteint le Sapin. Il ne croit plus au Père Noël ? Sa femme va le ramener au magasin, et – gentille Mère Noël -, le rassurer et lui confier le fin mot de l’histoire : « Il ne reste qu’une chose à faire, (maintenant que nous ne sommes plus des enfants ?) : baiser ! »

Eyes Wide Shut, comme tous les Kubrick, fut une déception à sa sortie, pour les Kubrickiens en premier, tétanisés par la rumeur que le Maître, mort avant la sortie, n’aurait pas fini le film. Il déçut aussi la Warner, qui avait parié beaucoup sur le caractère porno de l’affaire et sur le scandale afférent : on masqua les corps aux USA, mais le film ne fut pas remonté. Au final, Eyes Wide Shut ramena de l’argent, comme tous les Kubrick : 55 millions de dollars (pour un budget de 65M$, et fini par gagner de l’argent à l’international). Comme tous les Kubrick, il est régulièrement diffusé à la télé, signe évident de la postérité qui s’annonce… Annonciateur de la vague porno-chic, le film a fait école. Mais surtout, il reste le dernier témoignage d’un auteur réputé misanthrope, et qui laisse pourtant un film plein d’humanité.

* signé par Mme Kubrick, comme dans Orange Mécanique




mardi 8 septembre 2009


La citation du jour
posté par Professor Ludovico

L’ami Guillaume vient de me prêter Les Six Samouraïs, de Sharon Waxman, qui s’annonce tout simplement comme la suite de Sexe, Mensonges et Hollywood, de l’incontournable Peter Biskind. En clair, les trajectoires des maverick Tarantino, Soderbergh, et autres Spike Jonze dans les années 90’s.

J’en ferais la critique une fois terminé, bien sûr, mais comme j’ai tendance à en oublier le quart, et que ce genre d’opus est bourré de déclarations fracassantes, autant commencer tout de suite. La (les) citation(s) du jour :

Rupert Murdoch à Bill Mechanic, le patron de la Fox qui venait de lui montrer Titanic :

« Je comprends maintenant pourquoi ce film vous a plu, mais tout de même, Bill, ça vaut pas Air Force One ! »

John Goldwyn, directeur du studio qui a produit L’Arriviste, premier film remarqué d’Alexander Payne : « L’Arriviste est le meilleur film que nous ayons fait ces dix dernières années. Et nous n’avons aucune intention de nous lancer à nouveau dans ce genre de projet »…

To be continued…

Les Six Samouraïs, Hollywood somnolait, ils l’ont réveillé
Sharon Waxman
Calmann-Levy




lundi 7 septembre 2009


Ce Glob est Plat
posté par Professor Ludovico

Séquence copinage : l’ami Ostarc, très actif sur CineFast depuis quelques jours, est aussi bloggeur. Il œuvre dans d’autres sphères, peinture, musique. J’ai pu ainsi découvrir qu’il existait d’autres arts avant le 7ème. C’est aussi un peintre très talentueux, bien qu’il fasse le coquet sur ce sujet. Je vous invite donc à passer le voir : c’est là que ça se passe




lundi 7 septembre 2009


Les Dents de la Nuit
posté par Professor Ludovico

L’humour c’est vraiment une question de génération. Je suppose que si j’avais vingt ou trente ans, Les Dents de la Nuit me ferait rire. Mais je trouve les comédiens mauvais, les gags ressassés, seulement sauvés par quelques minuscules inventions scénaristiques.

On s’ennuie, et comme il a déjà été dit, l’ennui, au cinéma, c’est interdit. On pourrait même étendre ça à tous les arts, en précisant que « l’ennui » n’est pas lié à l’idée galvaudée de « divertissement ». Certains s’ennuient à 2001, chez Haneke, en écoutant Ligeti, moi pas. Mais je m’ennuie chez Woody Allen, le cinéma iranien, ou Oasis… Il est tout aussi facile de s’ennuyer chez Christian Clavier ou chez Alain Chabat.

Ce doit être le critère numéro un en sortant du théâtre, en éteignant l’iPod, en sortant du Gaumont…




samedi 25 juillet 2009


Fog of War : 11 leçons de la vie de Robert MacNamara*
posté par Professor Ludovico

Voilà une autre mort éclipsée par celle de Grand Jackson. Si Robert MacNamara, qui vient de décéder à 93 ans est grand, ce n’est pas pour le cinéma, car il n’est le héros que d’un seul film, un documentaire d’Errol Morris, Fog of War , consacré à personne d’autre que lui-même.

Car Robert MacNamara est un immense monsieur, à qui un jour la postérité rendra grâce. Jeune boursier à Harvard, il redressa Ford dans les années quarante, puis on lui proposera – une première pour un étranger à la famille Ford – d’en devenir le président. Il démissionnera cinq semaines plus tard, appelé par un autre président John Fitzgerald Kennedy… il lâchera tout (carrière, argent (passant de 800 000$ par an à 25 000$),) pour prendre le Ministère de la Défense. Car selon lui, on ne refuse pas de répondre « à l’appel de son président », et c’est un devoir moral de servir son pays.

Ce sera le début de sa perte. Plaidant pour une retraite du Vietnam en 1963, il assumera pourtant ensuite, sous le président Lyndon Johnson, un engagement de plus en plus meurtrier des forces US, et sera voué aux gémonies pour cela… jusqu’à incarner, à lui seul, l’échec du Vietnam.

Il raconte tout cela, et bien plus encore, dans l’excellent Fog of War : de la difficulté – et de la nécessité – de la diplomatie et de la guerre, et des énormes responsabilités qu’endossent les politiques qui en sont chargés : MacNamara calculera par exemple, à 28 ans, le coût humain d’un bombardement incendiaire. Il faut voir les larmes d’un homme de 90 ans pour comprendre…

Vous l’aurez compris, Fog of War n’est pas pour les démagogues, les âmes simples, les adeptes du « Tous Pourris ! ». C’est l’équivalent cinématographique du Prince de Machiavel, de l’Art de la Guerre de Sun-Tzu, ou De La Guerre de Clausewitz. A l’Age Nucléaire, il faut repenser ces notions anciennes : on ne peut plus faire deux fois la même erreur, car la première est fatale.

Un visionnage indispensable hier, aujourd’hui et demain.

*Les 11 leçons tirés de la vie de Robert McNamara se suffisent à elles-mêmes :

1. Empathie avec ton ennemi
2. Etre rationnel ne nous sauvera pas
3. Il y a quelqu’un au-delà de soi
4. Maximiser l’efficacité
5. La proportionnalité devrait être la loi de la guerre
6. Trouvez l’information
7. Croire et voir ont souvent tort
8. Préparez vous à réexaminer votre raisonnement
9. Pour faire le Bien, vous devrez peut-être faire le Mal
10. Il ne faut jamais dire jamais
11. On ne peut pas changer la nature humaine




vendredi 24 juillet 2009


Don Simpson, bis
posté par Professor Ludovico

En faisant des recherches pour l’article précédent, trouvé cette citation du producteur défunt :

« We have no obligation to make history. We have no obligation to make art. We have no obligation to make a statement. Our obligation is to make money. »

No comment.




jeudi 23 juillet 2009


Box-office, Don Simpson, le producteur le plus déjanté d’Hollywood
posté par Professor Ludovico

Derrière ce titre ringard se cache la meilleure nouvelle de l’année, à savoir la traduction en français de du mieux titré High Concept: Don Simpson and the Hollywood Culture of Excess, la biographie de Don Simpson signée Charles Fleming.

Une biographie séminale pour CineFast, puisque suite à un extrait publié dans Vanity Fair en 1998 (merci Ingela), je cherchais à me procurer à tout prix ce livre, introuvable en France. Je le dénichais l’année suivante dans un Barnes & Nobles de Bakersfield (et croyez-moi, les vendeurs US sont bien plus incultes qu’à la Fnac).

C’est comme si j’avais trouve les manuscrits de la Mer Morte. Dans un genre où les américains excellent (la biographie non-autorisée), High Concept est passionnant à plus d’un titre. D’abord, c’est un livre qui parle de la production, alors que la plupart des ouvrages consacrés au 7ème art se focalisent sur les acteurs et les réalisateurs. Ensuite, il s’attaque aux Simpson-Bruckheimer, producteurs honnis car ultra-commerciaux et républicains : nous avons déjà eu l’occasion de dire ici tout le bien que nous en pensions. Enfin, fidèle à l’école américaine, c’est écrit de manière efficace (ça se lit comme un roman), tout en étant extrêmement bien documenté et étayé. Bourré d’anecdotes trash et en même temps analyse travaillée de l’évolution du business dans les années 80… ce qui nous change des équivalents français : un travail à la fois sérieux et agréable à lire.

On suivra donc avec passion les aventures de l’Oncle Don à Hollywood : attaché de presse dans les années 70, producteur hardboiled dans les années 80 (Flashdance, Le Flic de Beverly Hills, Top Gun), acteur mort-né (Jours de Tonnerre), cocaïné, lifté, dans les années 90 (Bad Boys, USS Alabama, The Rock). Il dépensait alors 60 000 dollars par mois chez le pharmacien. Sexe, drogue, et antalgiques…

Don Simpson est mort bêtement (meurt-on autrement ?) : dans ses toilettes, nu, un livre à la main. Il avait 52 ans.

Box-office, Don Simpson, le producteur le plus déjanté d’Hollywood
Charles Fleming
Edition Sonatine




dimanche 19 juillet 2009


Hallelujah !
posté par Professor Ludovico

Ça, c’est de l’or en barre ! Quand le Professore tombe là- dessus, il doit en faire profiter le CineFaster.

Dans Paris-Match daté du 29 juin (Bambi en couverture), critique dithyrambique (comme d’hab’) du dernier Woody Allen. Je passe : rien de nouveau sous le soleil. Suivi de deux pages d’interview du Maître : je lis, car si Allen est un cinéaste moyen, c’est un vrai amoureux du cinéma, et un excellent théoricien.

Et la, tatatatata (musique de Star Wars), question du journaliste, citant Philip Roth, écrivain US acclamé par les mêmes qui encensent Woody, accrochez vous : « Woody Allen n’existe qu’à cause de la naïveté européenne ! »

Je ne me vois pas ajouter quelque chose…

PS : Si, quand même : Je me souviens avoir lu dans Studio (oui, j’ai lu un temps cette revue glacée, personne n’est parfait), une interview technique très intéressante de Woody Allen : casting, cadrage, techniques de mise en condition des acteurs, le new yorkais était (et reste, je pense) passionnant…




vendredi 17 juillet 2009


Michael Jackson, une star Hollywoodienne
posté par Professor Ludovico

Bien que Bambi n’ait rien à faire dans CineFast – son œuvre cinématographique est proche de zéro -, il a sa place dans la grande légende Hollywoodienne, celle de l’Age d’Or (1920-1930), pour être précis.

On a du mal à imaginer, nous qui sommes si obsédés par l’idée de progrès des civilisations, et si fiers de nos libertés chèrement acquises, à quel point Hollywood ces années-là était plus décadent, sexe, trash, violent, que nos gentillets Tom Cruise d’aujourd’hui, dont les frasques se résument à une séance de prière à l’Eglise de Scientologie, une biture par ci, et un adultère par là. Pour comprendre il faut lire Hollywood Babylon de Kenneth Anger, ou s’intéresser à la vie de Michael Jackson, martyr des temps modernes.

Sans raconter à nouveau ce que tout le monde sait – contraint et forcé – des turpitudes de M. Jackson depuis un quart de siècle, force est de constater que la vie du gosse de Gary, Indiana, reste sa plus belle œuvre artistique, œuvre visionnaire de notre XXIème siècle débutant.

En cumulant scandales, lubies, frasques, tabous divers, Michael Jackson nous a présenté, avec vingt ans d’avance, le film de notre futur.

Le métissage

En brisant, le plus gros des tabou américains, à savoir la ségrégation, Michael Jackson n’à pas seulement réussi une performance artistique (être le premier noir au Top 50 blanc, le premier noir à passer sur MTV), il a aussi poussé la logique jusqu’au bout, et fini par devenir métis, puis blanc, jusqu’à l’absurde : le teint diaphane de la mort. Réduire les races à zéro, voilà un thème furieusement actuel.

L’auto-ingéniérie

Sans inventer la chirurgie esthétique (nombreux prédécesseurs à Hollywood), Michael Jackson en est le chef d’œuvre ultime : la peau, les cheveux, le nez, la bouche, le front, où est passé le playboy des années 70 ? Mais aujourd’hui, sans aller jusqu’à l’extrême Jacksonien, qui n’est pas prêt à remodeler un bout de son corps : refaire ce nez, réaligner ces dents, augmenter ses seins ?

La paranoïa pédophile

En étant à la fois victime (et probablement coupable), Michael Jackson anticipe notre monde actuel, entièrement tourné, (et de manière absolument insensée), vers les enfants, leurs besoins, la satisfaction immédiate de leurs désirs. Qui est MJ, sinon un enfant qui a grandi trop vite ? Ses fameux pantalons trop petits pour lui, ses socquettes blanches d’ado… lui peut tout s’offrir : peluches, jouets, et amis (plus trop) de son âge ?

Le village global

Avec un We Are The World prémonitoire (You are the World, Michael !), MJ s’est imposé comme la vraie star mondiale, que les Beatles, Elvis, avait préfiguré. Bien sûr ces derniers avaient rencontré un succès mondial, mais pas aussi universel que celui que Jackson allait rencontrer : Noir ou blanc, straight ou gay, riche ou pauvre, occidental ou pas, chaque foyer dans le monde avait une télé pour le voir danser, un CD pour passer ses disques, une radio pour l’entendre. Sa mort est un événement gigantesque, qui arrête le cours du temps, de l’actualité, ce à quoi n’arrivera jamais un Bob Dylan, un McCartney, un Bowie dont l’œuvre le mérite pourtant cent fois plus…

C’est dans ce sens-là que MJ est une star définitivement Hollywoodienne, qui égale Howard Hughes, dans la démesure, la célébrité… Fatty Arbuckle, pour les passions coupables… Gloria Swanson, pour les caprices… Erich von Stroheim, pour la démesure neverlandienne…

Les années 20, vous dis-je… Mais dans une Babylone Blade Runnerienne du troisième millénaire…




samedi 13 juin 2009


Dramaturgie du sport
posté par Professor Ludovico

Vous l’aurez compris, à CineFast – et contrairement au cinéphile moyen -, on n’a rien contre le sport, et même les sports de masse, comme le football, si souvent boudés de nos amis intermittents du spectacle*.

Ceci n’est pas un blog sur le sport, mais rien n’empêche d’en parler, la saison étant propice. Après un article sur rugby, il est intéressant de s’interroger sur leur cinématographie (voulue), et leur dramaturgie (non voulue, certes, mais quelque peu dictée par les règles). Le plus étonnant, en ce moment c’est sûrement le tennis, et Roland Garros en particulier. Pourquoi ?

On s’y attache rarement, parce qu’il fait partie de la culture française, mais le tennis est un sport très bizarre. Système de score alambiqué (15, 30, 40 au lieu de 1-2-3), limites de terrain ésotériques (on utilise les marques du Double alors que l’épreuve n’est pas retransmise), et organisation pléthorique : 9 arbitres, 6 ramasseurs de balles pour 2 pauvres joueurs.

Et surtout, un des rares sport où l’on ne connaît pas la durée de jeu : 40 minutes ou 5 heures ? Pourquoi ? Parce qu’au tennis, il faut blesser au moins deux fois l’adversaire de suite pour gagner. Blesser, plutôt que marquer, car le tennis s’apparente en fait à une joute (on dit d’ailleurs tournoi). Nous voilà revenu, pour ce sport aristocratique, au moyen âge !

Un sport tout à fait élitiste où il faut se taire comme à l’opéra, ou l’on tend la serviette au joueur, qui ne se baisse jamais pour ramasser une balle, et au fair play absolu (on attend l’adversaire avant de servir) ; toute cette considération pour le sport le plus cruel qui soit, qui ressemble souvent plus à une mise à mort qu’à autre chose.

Les larmes de Federer, dimanche dernier à Roland Garros, participent de cette dramaturgie. Le noble chevalier Roger, portant haut les couleurs de sa gente dame, a corrigé le soudard Söderling, et, triomphant enfin dans la lice du Roi de France, pouvait enfin verser de nobles larmes.

*anecdote personnelle : lors d’un week-end à la campagne avec des copains travaillant dans l’Usine à Rêves, et voulant organiser un match de foot, je fus obligé de racler les fonds de tiroir pour organiser un semblant d’équipe. Il fallut les tirer un par un de leurs transats. L’un d’entre eux se fit énormément prier « Je ne sais pas jouer / J’aime pas le foot ». Après un « T’as pas le choix » énergique, et une heure de jeu, le gus en question se révèle Zidane de la journée. Au retour, je complimente l’épouse de Zizou sur les talents de son mari. Réaction mi-étonnée, mi-effarée : « TOI, TU JOUES AU FOOT ??? » Quelle déception, après tant d’années de mariage !




décembre 2025
L M M J V S D
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
293031