A l’opposé de ce que l’on pourrait croire de ses goûts cinématographiques, le Professore n’aime pas les lire de bestsellers. Il aime les voir. Il se réjouira toujours à 2012, ou à Fast & Furious, même si c’est très mauvais. Mais refusera de lire Guillaume Musso ou Marc Levy, Dan Brown ou Harlan Coben.
En clair, le Professore aime la littérature. Pire, il aime la littérature française.
Hors là, il vient d’enchaîner deux livres de débutants : La Meilleure Part des Hommes, de Tristan Garcia, et La Centrale, d’Hélène Filhol. Dans les deux cas, une écriture nerveuse et précise, et des thèmes forts (le Sida, le Nucléaire)…
Dans les deux cas, une performance : Tristan Garcia arrive à nous faire croire qu’il est une femme des années 80, perdue dans le Marais, entre amis gays et amants hétéros… Hélène Filhol, qu’elle est un jeune intérimaire du nucléaire. Garcia n’est pas une femme, et n’était pas né dans les années 80, Hélène Filhol n’est pas un homme, et affirme n’avoir jamais mis les pieds dans une centrale.
Où est la performance, me direz vous ? Lire ces deux livres vous en convaincra peut-être, tant sont incroyablement bien décrits ces deux univers. La réponse se cache peut-être dans la réponse de Zadie Smith, coupable de la même performance dans Sourires de Loup ; on lui demandait comment une jeune londonienne de 19 ans pouvait se mettre dans la peau d’un pakistanais sexagénaire : « J’ai lu beaucoup de livres » se contenta-t-elle de répondre…
Quel rapport avec CineFast ? Disons que ces livres me semblent se rapprocher du mouvement actuel des séries US : témoigner, à leur façon d’une époque, en explorant des strates inexploitées de la société : les croque morts de Six Feet Under plutôt la sempiternelle histoire de flic dépressifs new yorkais, la vie d’Un Village Français à l’heure de l’occupation, plutôt que Une Famille Formidable, et le nucléaire, façon EDF, plutôt que et pas les sempiternels errements de la bourgeoisie du sixième arrondissement…
Ça ferait des films formidables, mais qui aura le courage ?
posté par Professor Ludovico
Malcolm McLaren is dead. On pourrait en faire un T-Shirt, comme Sid Vicious: Dead. Si McLaren a sa place dans CineFast, ce n’est pas en tant que Manager des Sex Pistols, mais bien en tant que producteur de cinéma, de l’OVNI filmique La Grande Escroquerie du Rock’n’Roll, le vrai-faux biopic des Pistols…
Vrai, car avec de vrais morceaux de Pistols dedans : le God Save the Queen sur la Tamise, les derniers concerts calamiteux au Texas, l’émission de Bill Grundy… Et le faux aussi, où le Malcolm, en bon situationniste, esbaudit la Société du Spectacle en réécrivant son histoire des Sex Pistols : j’ai tout fait, j’ai tout inventé, tout était prévu depuis le début…
Comme chacun sait, c’est « un petit peu plus compliqué que ça… », mais quand les événements nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs…
Bref, le film est rigolo, varié, sûrement très bizarre à regarder aujourd’hui, submergés que nous sommes par les clips, et blasés par toute forme de provocation…
Si le grand mérite du Punk, c’est d’avoir dit : « Toi aussi, tu peux le faire : tu peux être chanteur, graphiste, écrivain. Prends ton stylo et fais-le… », son deuxième – et pas le moindre – c’est d’avoir démonté les rouages du rock’n’roll circus : après les Pistols, toute provocation a désormais un petit parfum marketing…
Malcolm McLaren était un grand déconstructeur, et même s’il n’était pas le seul, il a changé nos vies…
jeudi 11 mars 2010
La Rafle : cinéma, abjection, et réalité
posté par Professor Ludovico
Une affiche, signée de la Mairie de Paris, a attiré mon attention ce matin : « Rafle du Vel d’Hiv’, Paris se souvient »
Effort louable et pédagogique me direz-vous, sauf que la rafle ayant eu lieu le 17 juillet 1942, l’anniversaire est encore loin. Je me rapproche, et, oh, surprise ! Le visuel utilisé n’est autre qu’une photo tiré de La Rafle, le film qui sort aujourd’hui sur le même sujet.
Je n’ai pas d’avis sur le film de Roselyne Bosch, que je n’ai pas vu, mais la récupération politicienne (et promotionelle ?) me sort par les yeux.
Car si les mots et les images ont un sens, cette affiche est tout simplement une faute de goût et un scandale.
Faute de goût, parce qu’on ne peut pas illustrer une tragédie réelle (13 000 déportés, femmes et enfants compris, dont seulement 800 en reviendront) avec une photo de fiction. Quel plus beau signal envoyer aux révisionnistes de tout poil ?! Il existe pourtant des photos de cette rafle… Mais montrer des vrais policiers parisiens en pleine action pique peut-être un peu trop les yeux…
Quand au message, qui se souvient exactement ? L’anonyme « ville » de Paris ? La Mairie de Paris (dont le logo est très visible en haut de l’affiche) ? Les Parisiens eux-mêmes ? Et de quoi se souviennent-ils ? Du film dont l’image est en dessous…
En pleines élections régionales, cette récupération sentimentaliste est abjecte…
samedi 6 mars 2010
Césars, Rugby et Opéra…
posté par Professor Ludovico
Le Professore, qui n’aime rien tant que l’observation des petites cruautés sociales, n’a pu manquer cette petite anecdote aux derniers Césars…
Comme chacun sait, Canal+ est désormais le grand ordonnateur de la cérémonie des Césars. Un rôle qu’elle a longtemps brigué – avec raison – et qu’elle anime aujourd’hui, avec un talent et un sens du professionnalisme quasi Hollywoodien.
Mais Canal+, c’est d’abord, selon la formule célèbre, la Chaîne du Cul et du Foot. Sans ses 4 millions d’abonnés à 30€ par mois, pas de cinéma français, du moins au niveau où il est aujourd’hui.
Samedi dernier, les caméras de Canal nous offraient des plans de coupe sur le petit monde du cinéma. Terzian et Meheut (P-DG de Canal+) encadrant la minaudante Présidente Cotillard, Harrison Ford se demandant s’il était si vieux que ça pour se retrouver honoré par un César, et Plastic Adjani – un signe – reléguée au second rang. Vers 23h, un de ces plans de coupe attira mon attention. C’était Jean Trillo. Jean Trillo, oui, le sémillant animateur des Spécialistes Rugby, pour ceux que ça intéresse…
Que faisait-il là ? Probablement sur la liste des invités de Canal… Mais où ? Au perchoir, dans les loges pas chères, sûrement derrière un pilier. Dans le temps, à l’opéra, c’était en bas que se trouvait le peuple, et dans les loges, les riches, assis.
Les gars qui financent le cinéma français relégués au balcon : tout un symbole.
samedi 6 mars 2010
Sherlock Holmes
posté par Professor Ludovico
Sherlock Holmes illustre les leçons d’Alfred Hitchcock, ou ce que j’appelle plus prosaïquement « Le Théorème d’Olivier » du nom d’un CineFaster illustre exilé en Suisse, et qui dit en substance : « Le réalisateur ne peut être le seul Dieu omniscient de son Univers. » C’est beau, mais qu’est-ce que ça veut dire ? En d’autres termes, c’est que les spectateurs doivent être mis du côté du réalisateur, et pas du côté des personnages… Ils doivent avoir quelques clés (que n’a pas le héros) pour comprendre l’intrigue*. Pour garder une petite longueur d’avance et ressentir quelque chose : peur, énervement excitation.
Ici Holmes résout toutes les énigmes parce qu’il est trop intelligent, et nous on ne comprend rien, parce qu’on est trop cons… Une fois qu’on a compris ça, on laisse Guy Ritchie faire son petit film dans son coin, parce qu’on sait qu’à la fin, il nous expliquera tout, et on s’ennuie donc un peu… Un tout petit peu en fait, car les reste de Sherlock Holmes est plaisant, drôle, bien filmé, bien joué, avec des bagarres créatives et des jolies filles pointues. Un peu trop pushy sur le sarcasme (les amerloques qui s’essaient à l’humour british), mais bon ça passe…
Et puis selon une autre Loi CineFasteuse, dite Théorème de Rabillon (un autre CineFaster théoricien) : « A-t-on vraiment le choix ? » Ce qu’il entend par là, le Rabillon, c’est que le choix est assez faible quand il s’agit de nos thèmes geek favoris : combien de films de Space Opera ? D’Heroic Fantasy ? De Spartiates en jupettes ? Pas tant que ça.
Alors un film qui parle de la Golden Dawn, de l’Inspecteur Lestrade, du Londres occulte de Jack l’Eventreur, on prend.
*Prenez Lost, par exemple. On ne comprend rien, certes, mais JJ Abrams abreuve en permanence le spectateur d’indices ; le pôvre essaie de comprendre, s’inquiète à l’avance des horreurs annoncées par Ben à Kate, s’énerve des atermoiements de Jack, etc. Les scénaristes font ce qu’ils veulent, mais mettent le spectateur de leur côté.
mercredi 3 mars 2010
Nine
posté par Professor Ludovico
Je ne sais pas trop pourquoi, je n’ai pas envie d’aller voir Nine. Trop de buzz, trop de stars, trop de glamour, trop de sexe…
dimanche 28 février 2010
Césars 2010
posté par Professor Ludovico
Ouille ! Ouille ! Ouille ! Quand les césars se mettent à penser comme vous, ça fait peur. Eh oui, moi aussi j’ai trouvé que Un Prophète était le meilleur film de l’année, même devant Disctict9 ! Bon, pas la peine de faire la fine bouche, je suis content pour Audiard, un vrai pro, pour Tahar Rahim, qui mérite ses deux césars, et pour toute l’équipe, qui a fait un aussi bon travail… (De toutes façons, je n’avais pas vu les autres films en compétition…)
C’est juste qu’une sourde angoisse m’étreint : serais-je vieux ? quand on se met à penser comme les Césars, c’est peut être qu’on a plus l’âge de voter pour Les beaux Gosses, non ?