[ A votre VOD ]

Commentaires et/ou Conseils d’achat de DVD – Peut dégénérer en étude de fond d’un auteur



lundi 14 décembre 2015


Barbary Coast
posté par Professor Ludovico

On poursuit exploration de l’œuvre d’Howard Hawks, avec un film peu connu des années 30 : Barbary Coast. Le pitch est assez simple : un homme (Joel McCrea) tente sa chance à San Francisco pendant la ruée vers l’or. Et évidemment, il y a une femme (Miriam Hopkins) qui essaie de sortir de Barbary Coast, le quartier mal famé et, en particulier, des griffes du terrible Louis Charnalis (Edward G. Robinson). Une fois qu’on a dit ça, on a tout dit de Ville Sans Loi.

La ruée vers l’or est une des obsessions de Hawks, lui qui avait même voulu adopter L’Or de Blaise Cendrars. Probablement parce que cette épopée est un idéal Hawksien : un monde d’hommes, dangereux mais totalement libre, où les audacieux font leur trou comme lui la fit dans l’usine à rêves, l’expression inventé justement par Cendrars pour designer Hollywood.

À vrai dire Barbary Coast est difficilement visible aujourd’hui ; au sens premier du terme, il est flou. Son principal intérêt est d’y retrouver les figures hawksiennes classiques. La femme forte. Le héros un peu mou. Le grand méchant qui rappelle le Lacenaire (Marcel Herrand) des Enfants du Paradis. On y trouve aussi un vieux marrant (baptisé Old Atrocity dans le film) qui n’est interprété par personne d’autre que Walter Brennan, le futur Stumpy de Rio Bravo.

Il y a aussi quelques belles scènes, une très belle pendaison dans la brume et la boue, et une scène d’évasion sur une barque. Tout cela ne nous empêche pas de dormir, mais c’est bon pour la culture générale du CineFaster.




vendredi 11 décembre 2015


Kingsman
posté par Professor Ludovico

Deux choses qu’il ne faut pas dire aux Professore Ludovico : « Ça ressemble à James Bond en beaucoup mieux », et « C’est hyper bien filmé, ça pète dans tous les sens ». Deux défauts majeurs qui m’ont empêché d’aller voir Kingsman quand c’est sorti au cinéma .

Heureusement, il y a le cinéma dans les avions, cette séance de rattrapage pour cinéphiles fainéants qui permet de revoir tout l’été ce qu’on a refusé ne voulait de voir l’hiver : Connasse, Fast and Furious 7, La Famille Bélier, etc.

Donc on regarde Kingsman entre un Poulet à la Française surcuit au milieu de petits pois décongelés, et une Tarte aux Pommes de ma Grand-mère qui sort de l’usine ; on le termine avec un café lavasse, Air France style.

Révélation : super film, super drôle, supers dialogues. On avait juste oublié que Kingsman: Services secrets était signé Matthew Vaughn , l’immortel auteur ou producteur d’Arnaques, crimes et botanique, Snatch, Layer Cake, Kick-Ass, X-Men: Le commencement ou même L’affaire Rachel Singer.

Kingsman est le concentré de la méthode Vaughn : filmage épique, acteurs au top (Taron Egerton, Colin Firth, Samuel L. Jackson, Mark Strong, Michael Caine) et répliques cultes, dont la réplique finale !

Mea culpa, mea maxima cool pas.




mercredi 9 décembre 2015


’71
posté par Professor Ludovico

Recommandé à l’époque par Notre Agent au Kremlin, nous n’avions pas vu ’71 en salle.

Grave erreur. Très grave erreur.

’71 délivre non seulement pour ce que sa prometteuse bande-annonce annonçait : un film de guerre trépidant dans les rues de Belfast avec soldats British, IRA, et gamins à cocktail molotov. Mais il propose bien plus que ça : une version arty du thriller. C’est-à-dire, en deux mots, tout ce que Sicario rate.

’71, c’est une histoire simple : un jeune soldat anglais débarque en Irlande du Nord et se retrouve plongé dans les méthodes brutales des soldats britanniques, et les arrangements souterrains avec certaines factions de l’IRA.

Voilà notre héros perdu pour une nuit dans l’un des pires quartiers de la ville. Il erre de refuge en refuge, soutenu par quelques irlandais protestants, mais aussi catholiques. Le temps de se dégoûter de cette drôle de guerre avant de repartir chez soi.

Le tout est filmé avec une grâce infinie, les lumières vertes des HLM répondant au rouge des incendies qui la dévastent.

Un film extraordinaire, dans le premier sens du terme, qui, avec une grande économie de moyens, raconte une histoire, décrit des sentiments, fait frissonner.

Du cinéma.




lundi 30 novembre 2015


Le Juge
posté par Professor Ludovico

Cabotinage. Cabotinage au carré, même. C’est ce qu’on peut retenir de ce Juge qui, s’il est par ailleurs est un film regardable, ne mérite pas que l’on se déplace dans une salle de cinéma pour lui.

On aime beaucoup , et depuis longtemps, Robert Duvall (Le Parrain, Apocalypse Now, Colors), Robert Downey Jr. (Une Créature de Rêve, Zodiac, Sherlock Holmes, Iron Man) et aussi Vera Farmiga (Les Infiltrés, Esther, In the Air)

Mais même si le film est sympathique, les ficelles sont trop grosses pour qu’on puisse accrocher. Le fils, en conflit avec le père. Le père, bougon, incapable de communiquer avec le fils. Le fils qui fait du pognon dans le privé, le père droit comme la justice publique qu’il incarne. L’ex copine qui préfère son trou dans l’Indiana à la vie à Chicago. Le fils qui a réussi sa carrière mais pas sa vie. La rédemption de l’avocat connard. Pitié ! N’en jetez plus ! On a déjà vu ça cent fois.

Il ne suffit pas de laisser des comédiens excellents en roue libre pour faire un film. Il faut un vrai scénario comme dans Orange County, pour ne pas le nommer. Et pas juste terminer par un procès et une petite ode à la campagne américaine, seul repaire des vraies valeurs face à la corruption de la cité.




samedi 28 novembre 2015


Gangster Squad
posté par Professor Ludovico

1949. Los Angeles. Mickey Cohen.

Qui a lu James Ellroy ou John Fante, ou visité une fois la Cité des Anges ne peut pas résister à l’appel californien de Gangster Squad. C’est l’application pure et dure du Théorème de Rabillon.

Mais pire, on jette un coup d’œil à IMDb (premier indice de l’ennui qui point) et on apprend que Gangster Squad est réalisé par Ruben Fleischer, le mec qui a fait Bienvenue à Zombieland, et qu’on avait promis de suivre comme le lait sur le feu. Donc on continue de regarder, sous le haut patronage de Karl Ferenc Scorpio, qui nous a mis sur écoute depuis longtemps.

Le pitch (en deux mots parce qu’on n’a pas que ça à faire) : face à la corruption généralisée des forces de police à la fin des années 40, le Chef Bill Parker (Nick Nolte) crée le Gangster Squad, une équipe de police undercover prête à utiliser tous les moyens pour faire tomber Mickey Cohen, le baron de la pègre locale, un psychopathe sans foi ni loi (Sean Penn).

Malheureusement, le résultat n’est pas à la hauteur de ces promesses. Certes les années 40 de notre Los Angeles de rêve (bagnoles, clubs, et petites pépées) est parfaitement reconstitué. Mais le scénario enfile les perles. Un petit garçon très mignon ? Son père va mourir. Mickey Cohen a l’air magnanime ? Le sous-fifre gaffeur va mourir dans d’atroces souffrances. La femme du héros se plaint, elle-ne-veut-pas-élever-un-enfant-dans-une-ville-corrompue-comme-Los-Angeles (on a déjà entendu ça quelque part, non ??) ; elle va regretter amèrement d’avoir dit ça. Et cætera, et cætera…

De plus, le scénariste Will Beall (qui officiait avant sur Castle, ça vous muscle tout de suite un CV), fait la grossière erreur de s’attaquer à Mickey Cohen et de raconter la fin du grand bandit de manière à la fois ultra classique (duel final au coup de poing, décadence dans la pauvreté d’une prison californienne…) et totalement ridicule. Car un simple clic sur Wikipédia, bien assis au fond du canapé, permet de vérifier que Cohen est tombé pour fraude fiscale et qu’il est mort en liberté.

Mais qui connaît Mickey Cohen aujourd’hui ? Personne. Il aurait suffit de raconter la vie d’un gangster mythique sans nom, et ça faisait le plat pour saucer.

Et sinon, d’où vient cette idée stupide de voir chercher un mec comme Sean Penn, une bonne gueule d’irlandais taillée à coup de serpes, pour incarner le rondouillard Cohen ? En réussissant au passage l’exploit de rater son maquillage ?

À vrai dire, L.A., James Ellroy, Sean Penn, Ryan Gosling, Nick Nolte, et même Mickey Cohen méritaient mieux que ça.




dimanche 22 novembre 2015


Macbeth
posté par Professor Ludovico

Comment a-t-on découvert Shakespeare ? La plupart du temps, par Orson Welles.

Au-delà de Citizen Kane, LE chef d’œuvre réputé du cinéma, Welles a été le grand pédagogue du barde éternel. L’homme de Falstaff, Macbeth et Othello a su mettre en images, avec une créativité inouïe, (et souvent en les raccourcissant de moitié) les grandes œuvres shakespeariennes.

Macbeth, nous l’avons découvert au Cinéma de Minuit. Il y en avait deux à l’époque, et on ne se rappelle plus bien s’il s’agit du Ciné-Club de Claude-Jean Philippe, du Cinéma de Minuit, encore animé aujourdhui par Patrick Brion sur France 3. Peu importe, car on se rappelle du choc visuel, en plein milieu de la nuit, de l’intro hallucinée de ce Macbeth de monsieur Welles. Qu’on en juge : trois sorcières psalmodient une étrange prédiction autour d’un chaudron puant ; When shall we three meet again? In thunder, lightning, or in rain?

Et puis vient l’étrange prédiction ; aucun homme né d’une femme ne blessera Macbeth, personne, en fait, tant que la forêt de Birnam ne bougera pas.

Comme chacun sait, ces deux prédictions se réaliseront pourtant à la fin.

Aujourd’hui quand on revoit le film, soixante-dix ans après, on reste toujours stupéfait par le génie bricoleur de Welles. Avec seulement 75 000 dollars, Welles bâti son décor, filme des contre-jours époustouflants (les meurtrières, les crucifix, les arbres), puis enchaîne plan séquence sur plan séquence avec une facilité déconcertante. En utilisant le grand angle, qui est sa marque de fabrique, Welles crée de la netteté partout en produisant d’étonnantes perspectives : le très gros visage de Macbeth au premier plan semble être un ogre dément prêt à dévorer un petit soldat minuscule perdu en contrebas.

Reste le miracle shakespearien, une langue ourlée, à la limite de l’incompréhensible, mais qui cinq cent ans après touche toujours l’âme humaine, à l’image du désespoir existentiel qui possède son héros :

– « Eteins-toi, brève chandelle !
La vie n’est qu’une ombre qui passe,
Un pauvre acteur qui s’agite et parade une heure sur la scène,
Puis on ne l’entend plus.
C’est un récit plein de bruit, de fureur,
raconté par un idiot et qui n’a pas de sens. »*

Shakespeare est éternel, Orson Welles aussi.

*Out, out, brief candle!
Life’s but a walking shadow, a poor player
That struts and frets his hour upon the stage,
And then is heard no more.
It is a tale told by an idiot, full of sound and fury,
Signifying nothing.




vendredi 13 novembre 2015


The Affair, S02e03
posté par Professor Ludovico

On n’osait pas reprendre la saison 2 de The Affair. On avait tellement aimé la saison 1, qu’on se demandait comment Sarah Treem et Hagai Levi allait pouvoir à la fois surpasser cette saison-là, et lui trouver une suite correcte, tout en résolvant les mystères savamment entretenus de l’intrigue policière. Pour cela, nous renâclions tel un vulgaire jockey tombé à l’orée du rail ditch and fence du Grand Steeple Chase de Paris.

Mais Notre Agent au Kremlin nous ramena aux dures réalités cinefasteuses ; le premier épisode était très bien, et nous devions remonter sur notre monture. Une fois lancé, en effet, nous voilà incapable de nous arrêter de dévorer cette deuxième saison.

Car cette Affair est le parfaite antidote à la morosité cinématographique. Après avoir enfilé la même semaine Sicario, Everest, Seul sur Mars, tous mauvais pour des raisons différentes, un peu de cinéma – même sur un écran d’un seul mètre de large – satisfaisait nos besoins essentiels. Une histoire, des personnages, des enjeux. Nous n’en demandons pas plus, en vérité. Pas besoin de montagne à vaincre, de narcotrafiquant ou de martiens, le désastre d’un couple, la construction compliquée d’un autre, fournit plus de cinéma que les trois autres réunis…

Et c’est surtout dans cet épisode 3 que le génie de The Affair éclate de sa noire luminescence.

Si le procédé est désormais classique (la perception de l’homme (30mn), puis celui de la femme (30mn)). C’est la matrice de The Affair ; cela pourrait devenir artificiel, un peu répétitif. Non seulement les auteurs jouent avec cette contrainte, mais ils offrent au passage le plus beau cadeau que l’on puisse faire un acteur. D’abord lui donner des scènes longues, sans coupes, concentré sur le visage, pour exprimer l’étendue de son talent*. Et ensuite lui redonner l’opportunité de rejouer cette même scène, en proposant une deuxième version de soi-même : le fantasme absolu de l’acteur ! On verra ainsi un Noah tendre et généreux et un connard imbu de lui-même, une Helen sûre d’elle-même ou complètement à la ramasse, et une Alison (Ruth Wilson) psychotique ou amoureuse.

Les acteurs se régalent. Le spectateur aussi.

* Qui est immense : le mari, c’est Dominic West, notre tête brulée de de Mc Nulty de The Wire. Son épouse, c’est Maura Tierney qui brillait il y a vingt ans dans Urgences et qui ose ici exposer sa détresse (et son corps) de quinqua comme peu d’actrices en sont capables…




mercredi 11 novembre 2015


Hippocrate
posté par Professor Ludovico

La vie est courte, l’art est long.
L’occasion fugitive, l’expérience trompeuse.
Le jugement, difficile…
*

« Médecin, ce n’est pas un métier, dit Abdel, le personnage de Reda Kateb (excellent comme d’habitude), c’est une malédiction » ; nous voilà donc maudits dès les premières minutes d’Hippocrate, dès que l’on a accepté de suivre Benjamin (Vincent Lacoste), l’interne-point de vue d’Hippocrate dans les Sept Cercles de L’Enfer hospitalier. Benjamin n’est pas un idéaliste, c’est le fils du patron. En tant que tel, il se demande s’il va bénéficier d’un traitement de faveur du paternel, ou au contraire d’un bizutage en règle. Il aura l’un et l’autre, souvent dans le mauvais timing. Il va apprendre le métier à la dure ; et la vie, tout simplement.

Le film de Thomas Lilti est doté de nombreux atouts : un excellent casting d’acteurs pros (Vincent Lacoste, Jacques Gamblin, Reda Kateb, Marianne Denicourt) et des acteurs inconnus qui jouent des malades tout aussi bons. Filmé dans un vrai hôpital, presque dans les conditions du réel, il offre aussi un réalisme qui plombe souvent le cinéma français.

Tragi comédie, Hippocrate est d’une finesse comique et tragique qui devrait inspirer certains. Naturaliste, il cerne parfaitement son sujet et relègue à des années-lumière le cinéma prétentieux des frères Dardenne. Hippocrate a des messages à faire passer, et notamment un : le médecin ne peut pas tout, même s’il le croit. C’est pourtant le plus beau métier du monde.

Hippocrate, c’est un petit film qui cache un grand film à l’intérieur.

*citation d’Hippocrate, dénichée dans Les Mille automnes de Jacob de Zoet, de David Mitchell




lundi 26 octobre 2015


Connasse, Princesse des Cœurs
posté par Professor Ludovico

Dans la série des films d’avion, Connasse, Princesse des Cœurs est aussi un parfait candidat, certes à l’opposé de Fast & Furious 7, mais pour des raisons inverses (VF directe), parfaitement visible en l’état. Et de toute façon, on ne serait pas aller le voir au cinéma.

On regarde aussi sous la pression du Professorino et de la Professorinette, porteurs d’un début de buzz (« Tu vas voir ; elle est folle, c’est trop drôle »). La Connasse, c’est évidemment Camille Cottin, qui tente en long métrage les sketches du même acabit qu’elle faisait sur Canal. L’exercice est risqué, comme on le verra. Car Connasse, Princesse des Cœurs fait partie du genre de film « caméra invisible », ce qui sont toujours drôle, mais qui a longue peuvent finir par lasser. C’est le cas de celui-ci.

Camille (comme une certaine catégorie de citoyens de notre beau pays), en a marre de ce pays de merde qui empêche les gens de réussir. Cette partie-là est réjouissante, car l’ambition business de Camille se résume vite à épouser le Prince Harry ! La voilà partie en Grande Bretagne (tout en oubliant pas une petite parodie de Titanic sur les ferries Sealink).

On suit les aventures de notre princesse de cœur, qui va enchaîner provocation sur provocation auprès de populations variées (horseguards, polo men, hôteliers et taxis londoniens…)

Si au début c’est drôle, au bout d’un moment nous voilà lassés de notre Connasse. On a compris le principe, et on a presque pitié de ce pauvre prof de maintien. Bref, les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures.




vendredi 23 octobre 2015


Quatre de l’Espionnage
posté par Professor Ludovico

Hitchcock n’aimait pas Quatre de l’Espionnage (Secret Agent), c’est bien dommage parce que nous on aime bien ce film. Il ne l’aime pas parce que son personnage principal (Edgar, joué par une jeune John Gielgud) a un objectif négatif : il refuse de faire ce qu’on lui demande ; tuer un agent secret allemand pendant la guerre de 14-18. Et ça, ça ne marche pas avec le public, dit le grand Hitch. Il n’a pas tort, c’est le truc un peu bizarre du film.

Mais Quatre de l’Espionnage est quand même passionnant. D’abord parce qu’il y a le toujours génial Peter Lorre, ici dans un rôle délirant de séducteur-obsédé sexuel-tueur à gages, et Madeleine Carroll est pas mal non plus, une des premières blondes hitchcockiennes.

Mais surtout, il y a une scène culte ; celle du personnage tué en montagne. Les deux espions (Gielgud, Lorre) emmènent en randonnée un british bien sous tous rapports qu’ils soupçonnent d’être l’espion allemand. Mais Gielgud est soudain pris de doute, tandis que Lorre, véritable psychopathe, veut le tuer à tout prix. Gielgud fait demi-tour et assiste au meurtre depuis un observatoire, mais Hitchcok cache la scène au spectateur au dernier moment*. Il filme en parallèle une autre scène, un cours d’allemand improvisé pour distraire la femme du randonneur qui se déroule dans leur chalet suisse. Le chien cherche frénétiquement son maître et hurle à la mort, évidemment, au moment pile où celui-ci tombe dans le vide.

Une excellente utilisation du son comme ressort dramatique. Il y en a d’autres dans Quatre de l’Espionnage : un orgue qui joue à vide (l’organiste a été assassiné) ; des cloches qui sonnent dans le clocher où se sont refugiés nos espions, les obligeant à se parler de la bouche à l’oreille – un gros plan que David Lynch n’aurait pas renié -, une course poursuite dans une usine uniquement rythmé par le bruit assourdissant des machines à chocolat et de l’alarme incendie, etc.

Mais au-delà de ce montage plein de suspense cher à Hirtchcock, le réalisateur montre quelque chose de rare au cinéma : les remords. Ces agents secrets sont terriblement affectés par ce qu’ils viennent de faire (sauf Lorre, inévitablement) ; on ne tue pas impunément sans porter ce fardeau, même quand on est dans les services secrets. Ce genre de regrets, si souvent esquissés dans les films d’action (une simple grimace de Bruce Willis peut faire l’affaire), occupe ici un bon quart d’heure du film.

La fin, elle aussi, est excellente : un terrible accident de train (avec les effets spéciaux 3D de l’époque (un train miniature, des pétards, et les acteurs font semblant d’être gravement blessés)), mais qui fait son petit effet, malgré un happy end convenu.

C’est tellement bon que ça n’a pas vieilli d’un pouce : on pourrait en refaire le remake aujourd’hui sans problème.

* Cette scène montagnarde est reprise en partie par Wes Anderson dans son Grand Budapest Hotel




décembre 2025
L M M J V S D
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
293031