[ A votre VOD ]

Commentaires et/ou Conseils d’achat de DVD – Peut dégénérer en étude de fond d’un auteur



vendredi 13 juillet 2018


Tygra, la Glace et le Feu
posté par Professor Ludovico

Après avoir consciencieusement raté Tygra, la Glace et le Feu pendant toutes les années 80, ça y est, j’ai enfin vu le film héroïco-érotique de notre adolescence. Évidemment, il ne faut pas faire ça : le film paraît incroyablement pauvre, et l’intrigue aussi. Pour autant le film est de Ralph Bashki, c’est-à-dire l’assurance de quelque chose de clivant, qu’on ne verra nulle part ailleurs. C’est l’un des rares dessins animés mais qui soit authentiquement érotique, avec une princesse qu’on ne risque pas de croiser dans un Walt Disney.

L’autre intérêt, c’est l’incroyable qualité de l’animation grâce à la Rotoscopie : on filme des comédiens et on redessine par-dessus, ce qui donne une qualité inégalée de réalisme des mouvements et des corps.

Le documentaire, assez faiblard, qui accompagne le DVD, permet de valider l’idée qu’il ne fait pas bon, quand on est dans un genre populaire comme le fantastique, d’y rester. Malgré son immense talent, Frazetta sera condamné à être l’artiste-qui-dessine-des-Conan-le-barbare…




mardi 10 juillet 2018


Angélique Marquise des Anges
posté par Professor Ludovico

Il a fallu s’y reprendre en six fois, mais que ne ferait-on pas pour vous, les CineFasters ? Nous avons fini par achever Angélique Marquise des Anges, l’immense chef d’œuvre de Bernard Borderie, malgré ses décors ridicules, son duo d’acteurs Mercier-Hossein complètement nuls (heureusement il y a Jean Rochefort), et son intrigue de bric et de broc.

Il est difficile d’imaginer l’énorme succès que connut la série Angélique* à partir de 1964, et comment ça a pu rester à ce point une Madeleine de Proust. C’est beaucoup moins bien que Sissi Impératrice, déjà très cruche. Certes la Mercier est très belle, mais ça ne suffit pas. La seule théorie que l’on peut échafauder, c’est le trouble érotique. Pour l’époque, c’était le grand frisson au Pathé Louxor. Un peu de torse nu pour madame, des nuisettes mouillées pour monsieur, un bout de relation SM et tout le temps, les lèvres purpurines de Miss Mercier. De quoi faire frémir de désirs inavoués des générations de Roberts et d’Odettes.

Mais on n’est pas obligés de répéter les erreurs de ses parents.

*5 films en quatre ans, ce qui tua la carrière Michelle Mercier :
1964 : Angélique, Marquise des anges
1965 : Merveilleuse Angélique
1966 : Angélique et le Roy
1967 : Indomptable Angélique
1968 : Angélique et le Sultan




dimanche 10 juin 2018


Corpus Christi
posté par Professor Ludovico

27 intervenants. 7 ans de travail. 2 ans de montage. Tout ça pour étudier le texte plus connu du monde occidental, le récit de la crucifixion dans l’Evangile selon Saint-Jean*. C’est le projet fou de Corpus Christi, le documentaire en douze parties réalisé par Jérôme Prieur et Gérard Mordillat** et diffusé sur Arte en 1997. A CineFast, (dont personne n’ignore les origines finchero-chrétiennes, depuis l’AG fondatrice des quatre apôtres dans la crypte de Colombes), nous sommes depuis toujours sous la pression du Framekeeper: « T’as vu Corpus Christi ? T’as fini le Girard ? Quand est-ce que tu commences Les Origines du Christianisme ? »

Aussi, quand le Rupelien s’est mis à nous harceler sur le même ton, nous nous sommes sentis obligés de nous y atteler.

L’an dernier.

Car il faut bien un an de travail pour regarder attentivement ces 12 heures, à vrai dire assez ardues, pour ne pas dire monastiques. Des témoignages sur fond noir (que viennent égayer des chemises Desigual et des pull à motifs plutôt inventifs), tout cela pendant douze heures, il faut s’accrocher. On peut passer par exemple une heure sur le mot Judas. Est-ce un prénom ? une origine (« de Judée ») ? une métaphore : Judas, le double noir de Jésus ? En face, c’est pas moins de 27 chercheurs, théologiens ou laïcs, juifs, chrétiens, français, allemands, anglais… qui s’escriment sur un mot.

Si l’on a affaire à des spécialistes, chacun est capable de mettre sa foi de côté pour reconnaître qu’on en sait peu sur la vie de Jésus. Le sujet de Corpus Christi n’est pas là. Le documentaire vise plutôt à reconstituer la période, entre la mort de Jésus (30, 31, 32, 33 après JC ?) et la rédaction probable de ces textes (40 ans plus tard). Pourquoi par exemple, accuser les juifs sous domination Romaine de la condamnation de Jésus ? Ponce Pilate gouvernait la Judée, nous explique Corpus Christi. Il est donc peu probable qu’il ait laissé la décision à des juifs qu’il tenait sous son joug. Mais quarante ans plus tard, quand le christianisme commence à se répandre en Grèce et dans l’empire romain, il semble difficile d’accuser ceux que l’on veut convertir de la mort du prophète. Corpus Christi foisonne de ces débats, de ces contradictions, et son génie est de ne pas essayer de les résoudre, mais bien d’amener le spectateur à y réfléchir.

Une grande œuvre.

* « Ils prirent donc Jésus. Et il sortit portant sa croix, et vint au lieu-dit du Crâne – ce qui se dit en hébreu Golgotha – où ils le crucifièrent, et avec lui deux autres : un de chaque côté, et au milieu Jésus. »
** Tous deux absolus athées.




mercredi 6 juin 2018


Le Dossier Odessa
posté par Professor Ludovico

Le film sur le papier a tout pour plaire : la chasse aux nazis, une ambiance sixties, un film d’espionnage sérieux comme le Professore Ludovico les aime… Malheureusement c’est très mauvais, ça pris un énorme coup de vieux. Tout est irréaliste ; ça commence comme John la Carré et ça tourne James Bond, John Voight est pas très bon, et on a du mal à imaginer les gars du Mossad engager un journaliste aussi nul.

A fuir.




lundi 4 juin 2018


Baywatch
posté par Professor Ludovico

C’est la surprise du chef : ce film est très drôle. C’est l’un des plaisirs de la cinéphilie que de tomber complètement par hasard sur une petite perle. On se fiche depuis toujours d’Alerte à Malibu, même pour les seins de Pamela Anderson. Mais il faut confesser une trouble passion pour The Rock depuis Le Roi Scorpion.

Dwayne Johnson a toujours joué avec intelligence de la dichotomie physique hors norme / talent dramatique faiblard. Il n’a jamais cherché à interpréter un personnage qui ne lui ressemblait pas, alignant au contraire des rôles de gars musclé au grand cœur. De sorte que The Rock joue toujours plus ou moins la même chose : un grand benêt plein de valeur(s) qui essaie d’aider les autres, le plus souvent maladroitement. Mais il le joue aussi bien chez des gars arty (le Richard Kelly de Southland Tales), que chez les blockbusters (Fast and Furious) ou même dans l’incroyable autoparodie Bayenne de la gonflette qu’est No Pain No Gain.

Ici The Rock est chef maître-nageur de la Baywatch qui doit résoudre une enquête qui ne serait pas ridicule dans L’Amour du Risque. Une très belle (mais très méchante) entrepreneure immobilier / trafiquante de drogue veut s’emparer de la baie pour en faire une zone résidentielle privée*. Mais nos héros vont arrêter les méchants, dans un feu d’artifice tout aussi métaphorique qu’irréel. On allait oublier la love story improbable entre un petit canon en monokini rouge et le geek en surpoids, et la rédemption inévitable du beau gosse / petit con de service, qui n’a pas l’esprit d’équipe. On le voit, on n’est pas chez Kiekergaard.

Mais pour autant, c’est l’incroyable sincérité du film qui fait son succès. Baywatch est pile au niveau de son ambition, c’est-à-dire le pur divertissement familial, et se moque de lui-même, de ses acteurs, de la nullité de son scénario**. Tout cela rend Baywatch éminemment sympathique.

* Paradoxe habituel du cinéma américain, cette entreprise typiquement capitaliste est présentée comme l’empire du mal.

** « Tout ce que vous racontez, on dirait une série télé sympa, mais peu crédible » dit un des personnages…




samedi 2 juin 2018


Le Baiser du Tueur
posté par Professor Ludovico

On n’avait pas tout compris au Baiser du Tueur, le premier vrai film de Kubrick, quand on l’avait vu à la télé. Le premier vrai Kubrick, en effet, car le premier sorti en salles, en 1955, après l’autocensure Peur et Désir. Mais voilà, Le Baiser du Tueur repasse en salle, grâce à cette nouvelle cinéphilie du quartier latin qui propose des films en très bon état, restaurés, son et image. Que demande le peuple ?

Et la surprise, c’est non seulement que ce Baiser du Tueur est bon, mais il est même meilleur que le suivant, L’Ultime Razzia, beaucoup plus conventionnel. Nouvelle Vague avant la Nouvelle Vague comme le dit Michel Ciment, les obsessions de Kubrick sont à l’œuvre dans un New York naturaliste : Penn Station, Broadway, les docks, les entrepôts. Les expérimentations aussi. Le Kubrickophile partira donc à la chasse aux figures de style : le visage du boxeur derrière l’aquarium préfigure 2001, le combat à la hache, Shining, le match de boxe, les duels innombrables qui parsèment l’œuvre future du créateur…

L’histoire est par contre basique : un peu à la manière de Fenêtre sur Cour, sorti l’année précédente (et dont le dispositif inspire à l’évidence Kubrick), Davey, un boxeur, épie sa voisine. Gloria est une taxi girl, une fille qui danse avec des messieurs pour de l’argent. Harcelée par son patron, elle appelle au secours. Le boxeur se rue pour l’aider, mais le mafieux a disparu. Gloria décide de quitter son emploi, mais le patron du dancing l’enlève. S’ensuit une course poursuite poétique dans un New York désert, aux premières lueurs de l’aube. Le port, ses entrepôts, les toits et leurs réservoirs. Les images sont magnifiques, noir et blanc sépulcral et moderne, pour un film réalisé en pleine époque des studios. Ce New York, forcément réaliste puisque tourné sans autorisation en décors réels, fera ensuite école.

Le Baiser du Tueur se termine par le fameux combat médiéval, hache contre gaffe, dans un magasin de mannequins : c’est l’image qui illustre souvent le film mais elle ne rend pas grâce à la variété de son imagination. Un happy end, qu’on ne retrouvera plus jamais chez Kubrick jusqu’au fuckfinale de Eyes Wide Shut, vient conclure le film. Les amoureux réunis à la gare partent ensemble vers la Californie. Il ne reste donc qu’une chose très importante à faire* :

Fuck.

*Alice Harford: there is something very important we need to do as soon as possible.
Dr. Bill Harford: What’s that?
Alice Harford: Fuck.
Nicole Kidman à la fin de Eyes wide shut




vendredi 25 mai 2018


Cold Hell
posté par Professor Ludovico

Conseillé par le Framekeeper, Cold Hell (Die Hölle) est un petit polar allemand mélangeant à la fois clichés et originalités. Clichés parce qu’il surfe sur la dynamique habituelle « serial killer + témoin qui a tout vu + flics blasé » et qu’il enchaîne les poncifs du genre, parfois à la limite du vraisemblable.

Mais l’intérêt est ailleurs, dans un contexte assez passionnant. L’héroïne, chauffeuse de taxi d’origine turque mais totalement intégrée, se voit régulièrement rappelée à ses origines, par les allemands de souche comme par les turcs. Se cache pourtant derrière tout cela tout un ensemble de subtilités que le spectateur sera amené à décrypter. Idem pour le flic qui gère l’enquête et montrera un autre visage au fur et à mesure que l’intrigue avance.

Cold Hell est assez gore et mais sa mise en scène est raffinée et inventive. Un petit bijou, donc, à découvrir dans les recoins de votre VOD.




lundi 26 mars 2018


Grave
posté par Professor Ludovico

Il existe encore des croyants dans le cinéma ; Julia Ducournau, réalisatrice de Grave, en fait partie. Et elle pose la question à laquelle bien peu savent répondre : comment rester un artiste tout en faisant un film de genre, malgré ses codes et ses clichés ? Bien peu ont su répondre correctement à cette question (le Kubrick de Shining, le Jonathan Glazer d’Under the Skin…). On le voit, la barre est haute.

Grave se présente comme une chronique naturaliste : l’entrée d’une jeune élève en école vétérinaire, avec son bizutage afférent.

Mais subrepticement, quelques indices montrent que le fantastique n’est pas loin… Ou pas. La future vétérinaire est végétarienne… comme toute la famille : père, mère, et grande sœur. Celle-ci est déjà à la fac. Si elle aide d’abord «la petite », elle se met ensuite à la bizuter méchamment.

On le voit, on entre progressivement sur des terrains sombres et troublants, où se mélange veganisme et bestialité, sexe et enjeux de pouvoir… On n’en dira pas plus car le plaisir est dans l’exploration de ces continents inconnus. C’est, de plus, formidablement bien filmé et bien joué.

Mais vous êtes encore devant CineFast ? Qu’est-ce que vous attendez ?




samedi 17 février 2018


Eve
posté par Professor Ludovico

All about Eve fait partie des chefs d’œuvre de Mankiewicz, non sans raison. La fin, avec ses dénouements imbriqués (le film n’est qu’un immense flash-back de deux heures), le scénario machiavélique qui y mène, le tout est une merveille d’horlogerie cinématographique.

Oui, à la fin, on saura tout d’Eve, qui est-elle, d’où vient-t-elle quelle réelles motivations la poussent… Mais surtout, All About Eve aura offert une étude glaciale des caractères humains, de la comédie qui s’y déroule, sur scène et hors scène, puisqu’on est au théâtre et que, bien sûr, there is no business like showbusiness…

Et on se dit que cette Eve doit avoir inspiré bien des cinéastes. Tiens, au hasard, Asghar Farhadi. On a beau être dans les années 50 à New York, les similitudes sont nombreuses. Les personnages d’Elly ou ceux d’Eve sont enfermés dans les carcans de leur système de valeurs, coincés dans leurs petites magouilles, obsédés par les mêmes choses, et tout aussi incapables de s’en sortir, malgré le désastre qui point.

Eve Harrigton (Anne Baxter) va recevoir un prix pour son interprétation théâtrale. On sait donc déjà comment cette histoire se termine, mais qui est cette Ève ? D’où vient-elle ? Le flashback commence, dans une ruelle de Broadway, près de la sortie des artistes : la gamine, passionnée de théâtre, qui vient tous les jours voir la même pièce jouée par la grande dame du théâtre Margo Channing (Bette Davis, qui semble se jouer elle-même) va-t-elle pouvoir enfin rencontrer son idole ?

On est déjà, finalement, dans l’affaire Weinstein, pour la bonne raison qu’on y a toujours été : comment accède-t-on aux marches du pouvoir ? Comment grimpe-t-on en haut de l’affiche ? Comment y reste-t-on ? Le prix sexuel à payer, pour les femmes comme pour les hommes, est toujours le même. Bette Davis en cougar de quarante ans cherchant désespérément à garder son homme de trente ans, est incroyable dans cette partition-là. Mais tous les autres personnages le sont aussi ; ceux qui cherchent une compagne, ou veulent garder leur mari, ou leur situation, ou les deux…

Le propos de Mankiewicz est implacable, et il n’est pas atténué par le monde corseté de l’après-guerre. Malgré la bienséance très british de ce petit monde du théâtre, chacun usera de toutes les armes possibles ; acteurs, scénaristes, critiques, hommes et femmes, jeunes et vieux, personnes n’échappera au microscope Mankiewiczien

Chacun sombrera, même la plus gentille des femmes. Et tel Ouroboros, le serpent qui se mord la queue, l’histoire se préparera immédiatement à recommencer…




dimanche 4 février 2018


El Bar
posté par Professor Ludovico

Le pitch d’El Bar est simple et rigolo : des gens que tout oppose se retrouvent enfermés dans un bar populaire de Madrid. Le hipster barbu et branché, et la pépète sexy qui va à un rancard, la vieille joueuse de loto, etc. Enfermés pourquoi ? On ne le dira pas, parce que le film tutoye plusieurs genres à la fois.

Mais à partir de cette situation de départ minuscule, Iglesia lance son train fantôme à toute berzingue. Rebondissements à la chaîne et répliques cultes s’entrechoquent. Mais deux choses viennent amoindrir ce beau programme : un manque de confiance dans le cinéma. Tout est dit, répété ; il y a beaucoup trop de dialogues. Iglesia est très habile de sa caméra*, et pourtant beaucoup plus pourrait être dit cinématographiquement. En fait l’ennui point, car on perd vite intérêt pour ce babillage, même brillamment écrit, même brillamment filmé.

Deuxièmement, si El Bar démarre très fort (par un très beau plan séquence d’exposition), une fois les personnages rassemblés, l’explication est vite connue. Or on est habitués, dans ce genre de films, à plusieurs rebondissements, à plusieurs twists. Donc on guette jusqu’à la fin une autre explication qui ne viendra pas.

Ce n’est pas très grave car El Bar est un joyeux divertissement, et c’est déjà pas mal…

* On comprend alors ce qui a plu au seigneur Ostarc, toujours avide d’images bien léchées et de film bien foutu, et qui nous avait fortement incité à voir El Bar. A moins que ce ne soit la passion de Bianca Suarez pour l’huile d’olive ?




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