[ Brèves de bobines ]

Petites réactions et conseils de sortie de salle



dimanche 19 mai 2013


Steven Spielberg
posté par Professor Ludovico

Comment ne pas triompher ? À l’heure où notre héros des années 80, Mr Dents de la Mer et Indiana Jones est descendu sur la Croisette pour consacrer la Palme d’Or des Alpes Maritimes 2013, le voilà encensé par la presse comme, je cite, « le meilleur réalisateur au monde encore vivant »…

Que de chemin parcouru par la critique, et par notre entourage, qui vilipendait le cinéma « enfantin » de Spielberg, son sous-cinéma à base d’extra-terrestres, d’aventuriers pulp, et de requins tueurs ?

Les mêmes rétorqueront Schindler, Munich, ou Couleur Pourpre. Mais c’est un grave contre-sens : le cinéma de Spielberg était déjà là en 1980, quand Starfix (O Starfix !) épluchait une scène de Duel à l’occasion de sa sortie en salle*. Et démontrait, plan par plan, le génie hitchcockien d’un réalisateur de 25 ans.

Car le talent d’un artiste ne se situe pas dans sa capacité à s’emparer de grands sujets de société (l’Esclavage, la Guerre de Sécession, la Shoah), mais bien de leur donner une forme. Spielberg faisait des films d’ados, il fait maintenant des films d’adulte. Il a formidablement réussi des films idiots (Jurassic Park – Le Monde Perdu) et parfaitement raté des films profonds (Always), mais ce qui compte c’est son génie d’artiste, sa capacité à transcender la forme, donner une forme à une idée.

Comme cette scène de Il Faut sauver le Soldat Ryan, zappée l’autre jour sur France4. On a enfin retrouvé Ryan. Il est avec sa section, vers Vierville. Tom Hanks le prend à part pour lui annoncer la nouvelle : tous ses frères sont morts, il va rentrer au pays. Il y a quelque chose qui cloche dans la scène, le spectateur le sait, mais Tom Hanks, lui, ne le sait pas. Tout est dans le casting : Ryan ne peut pas être cet acteur inconnu (Nathan Fillion, futur héros de Castle) ; nos héros ne peuvent déjà (au bout d’une heure de film) avoir achevé leur quête. Et puis il y a quelque chose de légèrement comique dans la mise en scène, dans le jeu de l’acteur. Dégingandé, il avance en crabe, un peu comme un imbécile. C’est drôle, et pourtant la scène est terrible. Spielberg joue avec nos nerfs, en étendant cette scène jusqu’à l’infini : les autres soldats de la Patrouille Hanks jettent des regards désabusés, et à vrai dire, franchement odieux, sur ce pauvre type qui a perdu ses trois frères. Ils s’en foutent, ils ont déjà failli mourir à cause ce pauvre connard. Un truc cloche donc, entre ce qu’ils pensent et ce que pense le spectateur, et puis le gag tombe : « Mes frères sont morts au front ? Mais c’est impossible ! Ils sont en primaire ! »

Un type qui sait faire ça est un grand metteur en scène, peu importe qu’il parle de dinosaure ou du 13ème amendement…

* Duel est un téléfilm et connut – fait exceptionnel – une sortie en salles en France




samedi 11 mai 2013


Barsoom !
posté par Professor Ludovico

C’est par ce mot magique que se termine John Carter from Mars, le film le plus sous-estimé de 2012. Sans les conseils de Conrad, le navigateur le plus sûr sur les eaux tumultueuses du Reik, je serais moi aussi passé à côté de cette petite merveille pulp. John Carter n’est pas un chef d’œuvre, loin de là, mais c’est un film fait avec beaucoup de cœur, et cela suffit. Andrew Stanton a peut-être gâché sa carrière à Hollywood avec ce bide pharaonique, mais il a rendu hommage à ses livres d’enfance, et ça, ça n’a pas de prix.

En revoyant John Carter sur Canal+ avec le Professorino (qui ne cesse de m’assaillir de questions sur l’échec du film – lui non plus ne comprend pas –), je n’avais qu’un souhait : revoir ce dernier plan, où Dejah Thoris (Lynn Collins) prononce le nom de Mars, face caméra.

Car si, pour le reste, John Carter est un film d’aventure très réussi et très drôle, il ne prend réellement son envol que dans les dernières minutes, là où les grosses machines s’arrêtent habituellement. Après avoir vaincu ce pauvre McNulty (euh pardon, Dominic West dans le rôle de Sab Than), Dejah et Carter se marièrent et eurent beaucoup d’enfants… Ça c’est la fin de Star Wars, mais pas de John Carter. Car beaucoup de questions posées dans le prologue, dans l’Amérique post-Guerre de Sécession, n’ont pas trouvé de réponse.

Andrew Stanton va compléter son puzzle brillamment*, en dix minutes chrono, inclure la réalité dans la fiction (en faisant de l’auteur, Edgar Rice Burroughs, un personnage de sa propre histoire) et apporter une conclusion humaniste un poil plus complexe que la production US habituelle. Le cynique John Carter ne pense qu’à son or, comme les pires ennemis de Mars, les Therns, qui voyagent de planète en planète pour s’emparer de toutes les ressources naturelles. Mais son aventure martienne, en forme de quête initiatique, le transformera en héros de tout une peuple. Et se débarrasser du médaillon qui permet le transfert vers la terre (et donc toute possibilité de retour) pour devenir John Carter, From Mars. Car on n’est pas d’un pays, ou de la terre de ses ancêtres, ou attaché par un quelconque lien du sang. Son pays, c’est celui où l’on défend ses amis, là où bat son cœur. Carter vient de Jasoom (la Terre dans le langage martien), il n’arrête pas de le répéter pendant le film, pourtant il deviendra un martien, par amour, et par amitié pour tout un peuple.

Le peuple de Barsoom.

* Rappelons que Stanton n’est rien de moins que le scénariste en chef de la meilleure période de Pixar, avant qu’elle ne devienne une parodie de Disney : il est l’auteur de Toy Story, 1001 Pattes, deux chefs d’œuvres, et des blockbusters Toy Story 2, Le Monde de Nemo, Monstres et Cie, WALL-E, Toy Story 3.




samedi 28 juillet 2012


Alien, le 8ème visionnage
posté par Professor Ludovico

Dans la cadre de notre programme « Transmission des Savoirs et des Compétences », nous avons montré Alien, le chef d’œuvre de Ridley Scott, à la Professorinette. D’abord pour éviter qu’elle ne le voit n’importe comment avec Kevin ou Klara, en mangeant des Chupa Chups tout en zappant sur Secret Story. Ensuite pour qu’elle voie la bonne version, c’est à dire pas l’horrible Director’s cut où Ridley Scott cru bon d’ajouter en 2003 tout ce qu’il avait bataillé pour enlever en 1979*.

Verdict de la Professorinette : « C’est bien, mais ça fait pas peur… »

Avant de hurler sur les ados blasés, incultes, drogués aux jeux vidéos et incapable de séparer le bon grain (les conneries des années 80) de l’ivraie (les conneries des années 2010), tentons d’analyser le phénomène. Et laissons parler l’adolescente.

« Je n’ai pas eu peur, » confie-t-elle à CineFast, « contrairement à Shining, qui lui, fait vraiment peur (brave petite !) Et l’Alien, tu m’avais dit qu’on ne le voyait pas du tout, pourtant on le voit plusieurs fois ! Et en plus, j’avais déjà vu la créature : dans Martin Mystère, il y a un type qui se déguise en alien. Et la scène des œufs, elle est aussi dans un dessin animé que j’ai vu petite. »

Voilà, tout est dit : Alien est tellement important qu’il a déjà laissé son empreinte dans la culture populaire, même enfantine. On ne peut avoir peur de quelque chose qui est déjà présent partout, on ne peut avoir peur de quelque chose que l’on découvre dans le confort du canapé**, et pas pas dans le noir absolu de l’espace… d’une salle de cinéma.


* pour l’anecdote, j’avais interdit à ma sœur de le voir sur une télé, lui promettant de l’emmener au cinéma dès qu’il ressortirait. Finalement, nous l’avons vu en 2003, dans cette maudite version.

** Moi qui le connaît par cœur, j’ai sursauté deux fois. Quand Ripley fait tomber une boite à l’infirmerie, et quand le chat s’échappe !




dimanche 15 juillet 2012


Hello, I’m Johnny Cash…
posté par Professor Ludovico

Ne ratez pas ce soir le documentaire sur la légende noire de la Country. Oubliez le dispensable Walk The Line. Oubliez Johnny Halliday, ses Harley et ses vestes à franges… Oubliez tout ce que vous croyez savoir sur la country (camions, rodéos et petites pépés), et écoutez l’authentique blues blanc du fond de l’Amérique :

When I was just a baby,
My Mama told me, « Son,
Always be a good boy,
Don’t ever play with guns, »
But I shot a man in Reno,
Just to watch him die

Plongez-vous dans l’album mythique du Man in Black : Cash, sortant de la drogue, cherche sa rédemption en allant chanter dans l’une des pires prisons des Etats Unis, Folsom, près de Sacramento. Cash ne sait pas qu’il va y enregistrer le meilleur album de sa carrière, le Live At Folsom Prison.

Johnny Cash at Folsom Prison
Arte, 22h15




jeudi 12 juillet 2012


Mélancolie sans fin
posté par Professor Ludovico

Revoir des bouts de Melancholia, l’Armageddon wagnérien, le Festen HD de Lars von Trier, voilà un plaisir qui ne se boude pas.

Dans dix ans, quand les polémiques cannoises (consciencieusement entretenues par l’insane punk danois) se seront tues, on découvrira enfin le chef d’œuvre Melancholia.




mercredi 11 juillet 2012


Stand By Me
posté par Professor Ludovico

C’est dur de retourner sur les douces prairies de l’enfance. J’ai revu hier avec le Professorino Stand By Me.

Bon, bof.

Oui c’est bien, oui River Phoenix délivre une performance exceptionnelle. Mais est-ce la VF ? La mauvaise qualité de la copie ? Le film m’a semblé simplissime, avec cette voix off ultra-explicative, et les situations plutôt convenues…

Le temps passe, héhé…




lundi 13 février 2012


Les Nouveaux Chiens de Garde
posté par Professor Ludovico

Tiré de l’excellent petit livre de Serge Halimi, Les Nouveaux Chiens de Garde est l’adaptation cinématographique – en moins réussi – de cette charge anti médiatique.

Même sil rate ses passages humoristiques (faussement premier degré, façon Canard Enchaîné), la charge reste intacte : monde media-politique en vase clos, formation identique (HEC-Sciences Po), manque de barrières déontologiques.

L’ensemble est passionnant, la critique sociologique est intéressante (élites droite et gauche unies pour « éduquer le peuple »), l’avertissement est clair (remember 1933) mais le tout mériterait d’être développé.

A voir donc et au cinéma, car il y a peu de chances que cela passe un jour à la télé.




jeudi 29 décembre 2011


Tron Legacy
posté par Professor Ludovico

Quel gâchis ! Assembler autant de talents : Jeff Bridges, Michael Sheen, Tron v.1.0, Daft Punk, des graphistes, des animateurs … Pour aboutir à une bouse pareille…

Incompréhensible scénario. Personnages inconsistants. Décalque, juste lifté, des éléments du décor 1.0.
Ne subsiste que des images splendides, des combats magnifiquement chorégraphiés, et l’excellente musique de nos deux Dafteurs, qui font même une apparition casquée…

Il y avait tellement à faire avec Tron, tellement à faire avec l’évolution des technologies, et du videogaming !

Disney avait raté Tron, elle se paye le luxe de rater le reboot.

Petit P.S. ironique et symbolique du déclin d’Hollywood : le jeu vidéo Tron 2.0 est sûrement le meilleur opus de la série. 




samedi 5 novembre 2011


Lone Star
posté par Professor Ludovico

A ne pas rater, lundi 7 sur Arte, la projection, trop rare, du chef d’œuvre de John Sayles. Lone Star, c’est la devise du Texas, et l’intrigue tourne autour de la frontière, où de nouveaux crimes réveillent les fêlures du passé. Une exploration des relations complexes Mexique-USA, sans concession de part et d’autre, et servi par des comédiens exceptionnels.

Vous savez quoi faire lundi soir…

Lone Star
lundi 7 sur Arte, 20h40




lundi 10 octobre 2011


Apollo 18
posté par Professor Ludovico

C’est la mode aujourd’hui des petits films à base d’images « récupérées » : le Projet Blair Witch, Cloverfield, Paranormal Activity illustrent quelque part la décadence du cinéma américain. Hollywood sait-il encore raconter une histoire ? Ecrire un scénario sans faire appel à la sacro-sainte réalité BOATS ? Sans utilisé cet artifice, artistique et technique, des pseudos bandes vidéos miraculeusement « retrouvées » ?

Ceci posé, Apollo 18 reste un produit très acceptable dans cette gamme. L’histoire de cette ultime mission secrète sur la Lune est plaisante, c’est remarquablement réalisée, chaque image copiant à la perfection les… imperfections des vidéos de la NASA. Même si le procédé fait un peu mal à la tête, on finit par l’oublier et se plonger dans l’histoire.

Et comme beaucoup de films de ce genre, Apollo 18 a le génie de s’arrêter quand ça devient un peu ridicule.




mai 2024
L M M J V S D
 12345
6789101112
13141516171819
20212223242526
2728293031