samedi 22 janvier 2011


Faites le Mur
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... -Les films ]

Derrière ce titre nul, se cache un documentaire rigolo sur le Street Art. J’en vois déjà qui quittent la salle, ne partez pas, ca sera court !

Le titre anglais, moins précis, est plus rigolo : Exit Through the Gift Shop. Il est l’œuvre d’un artiste extrêmement intéressant, qui se cache sous le nom de Banksy. Son œuvre est éphémère : des graffitis, des pochoirs, mais aussi des canulars. Vous en trouverez quelques exemples ici, , ou . Ou dans son excellent livre Wall and Peace, conseillé en son temps par l’ami Julien.

Mais voilà, le mot clef est canular. Car si Banksy est un activiste, anti-capitaliste, anti-guerre, il est aussi engagé dans une critique de l’art, du moins de la façon dont celui-ci est consommé.

Et cet anarchiste, ce contestaire ferait un documentaire sur lui ? Pas si simple ! Au début, le sujet de Faites le Mur semble être Banksy, mais rapidement, le film change de héros : apparaît Thierry Guetta, aka Mister Brainwash, ou MBW, pathétique vendeur de fringues français installé à L.A., et qui se passionne soudain pour le Street Art. Et comme MBW filme sans arrêt tout et n’importe quoi (c’est parce que sa mère est morte quand il était petit (sic!)), il se met à filmer des taggeurs. C’est là qu’il rencontre Banksy, le filme et décide de faire un documentaire, qui se révèle très mauvais, sur le Street Art.

Banksy retourne alors la caméra sur lui, et l’incite plutôt que de filmer des artistes, à en devenir un lui-même. Aussitôt dit, aussitôt fait : copiant Banksy, Warhol, Damien Hirst, le frenchie se fait vite des couilles en or. Conclusion de Banksy : « Je n’aiderai plus jamais personne à réaliser un documentaire sur le Street Art !»

Vous n’avez rien compris ? C’est normal. Car tout ça – personne n’en est tout à fait sûr – est peut-être une énorme escroquerie. Thierry Guetta existe, il a fait une expo à succès à Los Angeles, mais n’est-il pas qu’un nouveau hoax de Bansky ? Car l’artiste est coutumier du fait. Il accroche lui-même ses œuvres dans les musées (et minute le temps qu’elles restent accrochées (record à battre : 12 jours)) ; il installe de vrai-faux panneaux qui n’ont d’officiel que le nom (« Zone de graffiti autorisée », « Les émeutes sont permises sur cette place»), etc.

Le documentaire, se détachant de lui, crée une frustration : on voudrait en savoir plus. Lui, au contraire, botte en touche. Est-ce comme ca que vous voulez « consommer » de l’art ? Faisant sien l’adage de Kubrick (les œuvres vivent d’elles-mêmes, elles ne sont pas là pour être commentées par leur auteur), il invite plutôt à ouvrir notre regard… Plutôt que de sortir du musée par la boutique.