samedi 30 avril 2011


Inflation du nylon
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... -Pour en finir avec ... -Séries TV ]

Abondance de biens ne nuit pas ? Je ne suis pas sûr ! Par exemple, prenez le déluge actuel de films de superhéros : déjà vus, prêts à sortir ou en préparation… Thor est sorti cette semaine (dirigé par Kenneth Branagh, tout un symbole !), et on nous prévoit Captain America, les Avengers, un prequel aux X Men,un troisième Batman « Nolan », un premier Superman « Snyder » et même une nouvelle franchise Spiderman

Personne ne nous force, me direz vous… Mais sincèrement, cette programmation m’écœure (ou simplement m’éloigne) du cinéma. J’ai l’impression d’être dans un fast food où l’on me propose que quatre produits distincts : comédie américaine « Un Gars, Une Fille« , film d’animation avec des animaux « Rango&Rio, les Cars de l’Age de Glace« , film français « J’irais manger quelque part si tu ne m’embrasses pas » et… film de super héros.

Je n’ai jamais aimé les superhéros. Tandis que mes copains se jetaient sur Strange, un cousin imprimeur m’amenait des pelletées de Pif Gadget. Et dans Pif, il y avait certes Pif et Hercule, Placid et Muzo, mais surtout Glop! Glop! : Hugo Pratt, La Ballade la Mer Salée. Je ne veux pas frimer, je lisais aussi Battler Britton, et ses spitfires en flammes au dessus de la Manche.

Tout ça pour dire que je suis un cas assez unique chez les quadra : un réfractaire à la nostalgie en nylon. J’aimais bien L’Araignée en dessin animé, donc j’ai bien aimé le premier Spiderman de Sam Raimi. Mais pour le reste, le concept d’un type qui se déguise en justaucorps bien moulant m’a toujours paru absurde. Mettre un masque pour cacher son identité tout en choisissant une cape bien flashy, et, en général, d’un goût douteux, ma toujours laissé dubitatif… sans parler de cette propension à vouloir sauver le monde parce qu’on a un trauma familial (père tué, mort sur Krypton, ou dieu du Valhalla)…

Très logiquement, j’ai aimé les films destructeurs de cette mythologie : Incassable de Shyamalan, ou Hancock, de Mr Berg : pourquoi as-tu quitté le projet Dune, mon petit Peter ?? Oui, pourquoi ? Pour faire un autre film de Superhéros ?

Parce que le drame est là, en fait : Hollywood se mord la queue en tournant toujours les mêmes films, alors que des milliers de sujets géniaux attendent une adaptation ; Dune, confié à un tâcheron, Lovecraft, toujours pas de film à l’horizon, et les centaines de chefs d’œuvre de la SF toujours pas adaptés : le Cycle des Epées de Leiber, Elric de Moorcock, Ubik, de K. Dick, Demain les Chiens, de Simak, Les Monades Urbaines, de Christopher Priest, l’Orbite Déchiquetée de Brunner, les Princes d’Ambre de Zelazny, et à peu près tous les Frank Herbert…

Non, le cinéma Hollywoodien, depuis l’éclosion de Spielberg-Lucas à la fin des années soixante-dix, a décidé de ne s’adresser qu’au gosse qui est en nous.

C’est bien dommage.

*Hier soir, mon ami Philippe m’a proposé en avant première de voir Le Trône de Fer, la saga brillante de George Martin adaptée par HBO. Visuellement, scénaristiquement, ce pilote est une réussite : ambitieux et pédagogique à la fois, pour un livre aux intrigues multiples, complexes, et adultes. Un prototype de cinéma adulte inenvisageable désormais sur grand écran.