lundi 25 mars 2013
102 minutes qui ont changé le monde
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Très beau et très simple documentaire en diffusion actuellement sur France4 : la compilation de toutes les images filmées le 11 septembre 2001 au moment de l’attentat, jusqu’à l’effondrement des deux Tours.
102 minutes donc, sans commentaire, sinon le doublage des voix. Pompiers désemparés, flics paniqués, new yorkais curieux ou abasourdis… il est difficile de s’extraire de l’idée qu’on est devant une immense GCA : bâtiments qui s’écroulent, américains en panique ou réclamant vengeance.
Mais cette fois-ci, pas d’extraterrestres, pas de météore tueuse, pas de complot d’un terroriste blondinet voulant s’emparer des réserves d’or des Etats-Unis. La réalité brute : un attentat, réussissant bien au-delà des espérances de ses initiateurs, en abattant d’un seul coup le plus grand des symboles : le Centre Commercial du Monde, le World Trade Center.
Ces images, par définition non censurées, on ne peut pas les voir au cinéma : les salariés du WTC, piégés dans les étages supérieurs, agitant des torchons blancs, comme s’ils se rendaient après un siège, ou le nuage de la tour qui s’écroule – énorme –, comme une créature douée de raison, envahissant les rues de Manhattan jusqu’à obscurcir toute vision. Et aussi, cette image, jamais vu ailleurs que dans la GCA, d’une Amérique en guerre, bombardée comme une vulgaire rue palestinienne ou irakienne, et ces milliers de réfugiés s’enfuyant par les ponts.
Même si l’on croit tous avoir vu le 11 septembre, on ne l’avait jamais vu comme ça.
dimanche 24 mars 2013
Hollywood Babylon enfin en français !
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -
Les gens ]
Après des décennies d’attente, le livre culte de Kenneth Anger est enfin traduit : Hollywood Babylon*, le brûlot trash que tout CineFaster se doit de lire dans sa vie. Et ceux qui pensent que c’était mieux avant devraient lire aussi, tiens !
Car on oppose souvent un Avant mythique – les années 20 ou d’autres -, que l’on pare de toutes les vertus, morale et bienséante, à notre époque moderne, soi-disant gangrenée de tous les excès, fric, drogues et sexualité débridée.
Hollywood Babylon a ce mérite ; ce n’était pas mieux avant, et parfois, c’était pire. L’Hollywood des années folles était une véritable Sodome et Gomhorre, où peu de gens finissent changés en sel. Pédophilie, partouzes, voyeurisme, drogue, alcool, meurtre, extorsion, tout est décrit par le menu dans Hollywood Babylon, y compris la complaisance de la presse.
Vous y retrouverez, au coin des chapitres, les héros connus ou (désormais) inconnus : Charlie Chaplin, Randolph Hearst, Eric von Stroheim, Frances Farmer, Fatty Arbuckle, Rudolph Valentino. Mais aussi un yacht, ainsi qu’une bouteille de coca, des couloirs secrets, une équipe de foot, et une Buick Electra…
Extraordinaire, implacable, trash, Hollywood Babylon est une lecture indispensable.
*Hollywood Babylon
Kenneth Anger
Editions Tristram
lundi 18 mars 2013
Lincoln
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Lincoln est encore la preuve de l’immense talent de Steven Spielberg : à partir d’un rien cinématographique (le biopic), il réussit à faire un film. A partir d’arguties parlementaires, il fait un film. A partir d’un personnage sans enjeu (Lincoln), il fait un film. Mieux, un film pas ennuyeux pour deux sous, mais pourtant extrêmement pédagogique. Un oxymore, dirait-on.
Bien sûr, Spielberg a dans sa besace un géant, Daniel Day-Lewis, qui livre, une fois de plus, une performance éblouissante, en faisant oublier le comédien derrière la statue imposante du Commandeur Lincoln. Bien sûr, il y a aussi une pléiade d’acteur AAA : Tommy Lee Jones en député radical irascible, David Strathairn en secrétaire d’état incrédule, Sally Field en épouse éplorée, James Spader en lobbyiste gras du bide, Joseph Gordon-Levitt en fils mal aimé, et notre chouchou Lane de Mad Men (Jared Harris) en général Ulysse Grant. Mais on le sait, tout ça ne fait pas un film.
Dès le départ, Spielberg semble même absent de sa propre œuvre, mettant en scène a minima son Lincoln. Filmé ras des pâquerettes, sans effet de manche… pour un résultat plutôt reposant ! Car il y a du boulot pour le spectateur, dans Lincoln. De la lecture, même. Des sous-titres à rallonge, façon De la démocratie en Amérique… Le film est tellement bavard que des mangeurs de pop corn (pas des jeunes, je précise) ont fui avant la fin, devant tant de travail, un dimanche soir…
Mais ce travail vaut le coup. Comme l’a très bien analysé Blandine Kriegel, dans une récente chronique de Libération « Abraham Lincoln ou la démocratie selon Machiavel », Lincoln est un travail de dessillement du peuple américain sur la démocratie. Après avoir encouragé l’héroïsme (Il Faut Sauver Le Soldat Ryan), magnifié le courage (La liste Schindler) ou l’avoir questionné (Munich), Spielberg tricote ici un film extrêmement mature : la démocratie c’est difficile, c’est un combat de tous les jours, et ce n’est pas un combat propre. Il faut, pour faire passer ses idées, acheter quelques consciences, convaincre l’aile droite et l’aile gauche de son parti (et donc mentir forcément un peu aux deux), voire même renoncer à la douceur d’une paix immédiate pour faire passer, au forceps, ses idées, i.e. ce fameux 13ème amendement.
C’est l’occasion d’une scène mémorable, où le spectateur doit s’accrocher à la locomotive Lincoln, pour comprendre les tenants et les aboutissants juridiques qui président à cette décision en urgence…
C’est là tout le talent de Spielberg : réussir un A La Maison Blanche 1865 de cinéma, sans le charme de Josh ou de Donna, sans joli drapeau américain battant au vent, sans caméra virevoltante, sans musique pompière, et pourtant, de nous accrocher au siège jusqu’au bout…
jeudi 14 mars 2013
Spielberg se prend pour Napoléon
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -
Le Professor a toujours quelque chose à dire... -
Les gens ]
Après AI, Steven récidive : il s’attaque au deuxième scénario abandonné par Kubrick : Napoléon. Un projet qui tenait à cœur au Maître, qui dut lâcher prise quand la Warner lui annonça qu’elle ne suivrait pas eu égard au retentissant échec de Waterloo, le film de Sergueï Bondartchouk avec Rod Steiger.
La mort dans l’âme, Kubrick renonça à son bébé, qu’il comparait auprès de Michel Ciment « à la campagne de Russie » ; arrêter le film avant l’hiver, éviter la bataille de trop, et échapper à la Berezina. Kubrick recycla le monumental travail de préparation dans Barry Lyndon.
La question, aujourd’hui, c’est qu’est-ce qui fait courir Steven ? Qu’est-ce qui pousse Spielberg à suivre, aussi obsessionnellement, les pas de Kubrick ? Dans son chef d’œuvre, Les Corrections, Jonathan Franzen nous met en garde contre la prétention des enfants à « corriger » les erreurs de leurs parents, sous peine d’immenses déceptions…
AI était, à cette aune, un demi succès. Une première partie Kubrickienne, glaciale, sur l’adoption, la parentalité, l’humanité… La deuxième, spielbergienne, partait dans tous les sens : le robopute Jude Law, Robin Williams Dr Know, mais se terminait en beauté avec la vision prémonitoire de New York, pris dans les glaces…
Napoléon est présenté par l’auteur des Dents de la Mer comme une mini-série, ce qui est déjà de bon augure. En 3 ou 6 épisodes, on pourra donner à ce Napoléon l’ampleur qu’il nécessite. Après, Spielberg est-il le bon réalisateur/producteur pour un sujet aussi peu consensuel ? On incline à penser que non. Lincoln, Amistad, Band of Brothers, The Pacific… Toutes ces séries ou films ont été des déceptions sur le plan historique, plombé par la volonté consensuelle de Spielberg.
Le problème de Spielberg, c’est qu’il fait trop de films. Si Kubrick a cette œuvre minérale, presque parfaite, c’est qu’il a fait très peu de films. D’autant moins de chance d’en rater un. Spielberg, lui, amasse les films, comme Hitchcock. Il aime tourner. Il ne pourra pas faire œuvre, il y a trop de taches dans son CV.
Il est temps pour lui de renoncer à devenir un grand cinéaste reconnu (ce qu’il est déjà), d’expier son péché originel (avoir coupé l’herbe sous le pied d’Aryan Papers (le projet de Kubrick sur la Shoah, mort-né avec le succès de La Liste Schindler).
Il est temps de tuer le père.
lundi 11 mars 2013
Manque de culture cinématographique et paranoïa australienne
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -
Le Professor a toujours quelque chose à dire... ]
Dès le titre, on comprend que CineFast ne pouvait manquer de vous narrer cette anecdote.
Rapportée par le Professora, et trouvée dans cette grande revue cinématographique qu’est Air et Cosmos, no 2344.
Dans un avion qui relie Sydney à Wellington, un jeune homme se promène avec un T-Shirt. Pas n’importe quel T-Shirt, non, mais portant l’inscription suivante :
– « My name is Inigo Montoya, you killed my father, prepare to die… »
Le CineFaster aura reconnu la réplique fétiche de Princess Bride, où Inigo Montoya, immortel Mandy Patinkin (le mentor de Carrie dans Homeland), recherche pendant tout le film le spadassin à six doigts qui « a tué son père »…
Si l’avion était empli de CineFasters, l’histoire se serait arrêtée là. Mais malheureusement, il était plein d’australiens, semble-t-il toujours tétanisés par le 11-septembre, et qui ont exigé le retrait du menaçant vêtement.
Le pauvre T-Shirt fut enlevé, et le vol reprit sa trajectoire normale. L’histoire ne dit pas quel film était programmé dans l’avion…
dimanche 10 mars 2013
Dr House vs Scrubs
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... -
Séries TV ]
Qu’est-ce qui distingue une grande série d’une série de consommation courante ? La même différence, finalement, qu’il y a entre un sandwich jambon-beurre de chez Paul, au goût millimétré, et celui que vous vous préparez en achetant, au cœur de l’Auvergne, le pain, le beurre et le jambon…
Hier, dans un de ces épisodes désordonnés dont TF1 a le secret (épisode 2 : machin a le cancer, épisode 3, il se porte comme un charme, et caetera, et caetera), Dr House soigne une jeune fille de multiples symptômes (dérèglement du foie, migraines, etc.)
Là, le CineFaster moyen se met à hurler : mais qu’est-ce que vous foutez devant Dr House, Herr Professore ???
Bon ça va, les gars, c’est les vacances ! Y’a que la TNT aux Arcs, et même la Ligue des Champions ne passe plus en clair…
Bref, Dr House soigne cette petite, dont la mère n’est autre que Sherilyn Fenn, qui a pris quelques kilos depuis qu’elle faisait des nœuds aux queues de cerises dans Twin Peaks…. Mais je m’égare… La Professorinette a beau pronostiquer que la gamine va sen tirer (« car ils s’en tirent tous », cf. le jambon-beurre de chez Paul), pas de bol, elle y passe.
Dans une des dernières scènes, la pauvrette jette un coup d’œil désespéré à Monsieur House (ou à une de ses sbires, peu importe), qui vient de lui annoncer qu’il a finalement trouvé la raison de sa maladie :
– « Je vais mourir, docteur ?? »
– « Oui. »
Voilà, c’est fini. La mère se jette dans les bras de sa fille, quelques explications entre toubibs, générique.
Immédiatement, j’ai pensé à Scrubs. Une série beaucoup plus légère, drôle, sympa, mais capable d’engendrer de la tragédie au coin d’un gag.
Dans un épisode de Scrubs, le chef médecin (formidable John C. McGinley) vient réconforter notre héros, JD Dorian, (génial Zach Braff), qui va bientôt perdre un patient en phase terminale. « On ne peut pas les sauver tous, JD. Certains patients viennent à l’hôpital pour mourir. En fait, un sur trois meurt à l’hôpital. » À ce moment, le spectateur se rappelle, comme notre héros, qu’il a trois patients, et que oui, il faut se résigner, il en a déjà sauvé deux.
Un quart d’heure plus tard, les trois patients sont morts. L’épisode, commencé comme une guignolade, finit comme un drame. L’auteur, Bill Lawrence, a installé sa dramaturgie, a laisse le temps aux sentiments de s’installer. Il ne s’est pas contenté de sa formule (les-patients-sont-comme-des-enquêtes-policières) pour délivrer ses quarante minutes de programme.
Dr House n’est pas une grande série. Scrubs l’est.
mardi 26 février 2013
Anonymous
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Les films ]
C’est la surprise de l’année dernière : un film intelligent sur Shakespeare, réalisé par… Roland Emmerich. Oui, l’artiste de 2012, l’esthète de Independance Day, le fin dialoguiste du Jour d’Après.
Un film sur Shakespeare, ou sur l’escroquerie ? Car on ne sait pas grand chose du Barde Immortel, si ce n’est des choses très contradictoires. Issu d’une famille de gantiers, il est devenu le poète et le dramaturge le plus respecté au monde. Il y a peu de portraits de lui, et ses œuvres ont été publiées à titre posthume. Comment, issu de la bourgeoisie, un simple acteur aurait pu en savoir autant sur l’histoire anglaise (Henry V, Richard III), la mythologie antique (Songe d’une nuit d’été), ou l’Italie (Le Marchand de Venise, Romeo et juliette) ?
Anonymous illustre une de ces thèses : Shakespeare n’aurait été que le prête-nom d’un grand noble, à qui l’écriture, la poésie, le théâtre, étaient interdits, passions inavouables dans l’Angleterre très puritaine d’Elisabeth Ière.
Cet argument, Emmerich le traite tout en finesse, grâce probablement à un excellent scénario original de John Orloff (Band of Brothers). Plutôt que de se focaliser sur le comte écrivain (formidable Rhys Ifans en Edward de Vere), ou sur Shakespeare (présenté de manière un peu trop caricaturale), il se focalise sur l’intermédiaire ; Ben Johnson, un autre dramaturge, qui a vraiment existé, et écrit notamment Volpone. Et c’est lui, l’idiot, qui refuse le pacte faustien proposé par le comte de Vere, car il espère bien faire carrière, et faire percer son œuvre. L’acteur Will Shakespeare n’aura pas ces précautions, il endossera le rôle avec talent, pour les cinq siècles à venir.
Entrelaçant finement la situation politique de l’époque (la succession à venir d’Elisabeth, ses mythiques bâtards), et le flashback amoureux entre la Reine Vierge et un noble de la cour, Anonymous joue sa partition à merveille, même si elle est parfois difficile à suivre…
Un seul reproche, l’image, trop travaillée à la palette graphique, qui tire une peu le film vers le bas. Mais tant pis, laissons nous entraîner par ces textes magnifiques qui résonnent encore à nos oreilles ; peut importe qui en est le véritable auteur !
lundi 25 février 2013
Oh My God !
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Les films ]
Qui ira dire à mademoiselle Tanya Wexler qu’elle filme au XXIème siècle ? Pire, qu’elle y vit ?
Sur un sujet rigolo (l’invention du vibromasseur dans la prude Angleterre victorienne*), Tanya Wexler – qui vient pourtant du cinéma indépendant – n’a en stock qu’une comédie fadasse à proposer, avec des dialogues que ridiculiserait ceux de My Fair Lady (1964).
Oh My God est mal joué, à commencer par ma chouchoute (Maggie Gyllenhaal), qui campe une suffragette hystérique. Et l’hystérie, c’est bien ce dont on l’accuse (le film s’appelle Hysteria en VO). Franchement, on serait plutôt d’accord. Idem pour mettre ce gandin de Hugh Dancy, bien pâle dans une comédie qui devrait être un peut hot.
Nous aussi, après 95 mn de ce régime basse tension : il est grand temps de changer les piles.
* based on a true story, évidemment
vendredi 22 février 2013
Hitchcock
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Pauvre Hitch. Il méritait mieux que ce pitoyable Hitchcock, réalisé évidemment dans une totale perfection hollywoodienne, mais sans l’âme – et le vice – nécessaire à ce beau sujet.
Il aurait fallu un auteur derrière la camera, et pas Sacha Gervasi*. Un David Lynch, un Fincher, un Sean Durkin** ou un Asghar Farhadi : bref un auteur passionné par les tréfonds de l’âme humaine, qui aurait questionné ce sujet comme il convenait. Pourquoi Alfred Hitchcock, au sommet de sa gloire, l’homme qui côtoie Grace Kelly et James Stewart, veut filmer un slasher movie ? Pourquoi, d’ailleurs, ce bourgeois british et bonhomme, marié depuis toujours à la même femme, est obsédé par le sexe et la violence ? Et refuse de faire une thérapie mais parsème son œuvre de références freudiennes ?
Le sujet est ébauché, par la présence d’un vrai tueur en série (Ed Gein) qui vient hanter l’inconscient du réalisateur. Mais il est esquissé, juste esquissé…
Hitchcock se contente d’ânonner ses anecdotes, sur le choix du sujet, les actrices, la censure, la promotion du film. Et se termine comme une belle success story, où un réalisateur mal-aimé de la critique réalise le plus gros triomphe de sa carrière, et où un couple dysfonctionnel (Hitch et Madame) finit par se réconcilier. Heureusement, les deux acteurs sont extraordinaires (Anthony Hopkins et Helen Mirren), ce qui fait passer le temps.
* Auteur du parait-il extraordinaire Story of Anvil, sur le groupe de heavy metal eighties
** réalisateur de Martha Marcy May Marlene
mercredi 20 février 2013
Il Était Une Fois Dans l’Ouest
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Les films ]
Croyez-le ou non : le Professore n’avait jamais vu de Western Spaghetti, malgré ses origines (la famille Ludovico est évidemment originaire de la campagne florentine, vers Sant’Andrea in Percussina), malgré sa génération, gavée de Sergio Leone, malgré la musique d’Ennio Morricone, malgré Claudia Cardinale… Et malgré le cadeau de Notre Agent au Kremlin : le DVD de Il Était Une Fois Dans l’Ouest attendait patiemment dans sa boîte le bon moment…
Jusqu’à ce jour. Maintenant, j’ai vu Il Était Une Fois Dans l’Ouest. Et ce ne fut pas facile. La première partie laisse la drôle d’impression de regarder un Tarantino, quarante ans plus tôt : perfection stylistique, dialogues ciselés, acteurs hiératiques (trop !), mais narration pas claire et fond inexistant.
Heureusement, l’action se déploie petit à petit, et on découvre le secret de McBain, le mari malheureux de Claudia Cardinale, qui devait, au passage, être la plus belle femme du monde à l’époque. On accepte alors plus facilement les incohérences du scénario (Morton, le semi paralytique, rejoignant miraculeusement Frank, alors qu’il était le prisonnier de Bronson et Robards quelques minutes avant).
Si Leone a les mêmes défauts que Tarantino (c’est à dire une perfection dans le réalisme, oxymoré au ridicule de certaines situations), il réussit en revanche à créer des personnages de chair et de sang. Cheyenne, Jill et Harmonica fournissant un triangle amoureux improbable, mais magique.
On reste scotché devant la perfection et le gigantisme des décors, le cadrage (chaque plan est sublime), les dialogues au couteau de Bertolucci et Argento, et la musique, devenue iconique (qui finit même par cannibaliser le film)…
On tombe amoureux de Claudia Cardinale, veuve courage, à qui Robards adressera ce compliment magnifique*.
La fin, belle et amère, entraîne le film du côté du chef d’œuvre.
* « You can’t imagine how happy it makes a man to see a woman like you. »