jeudi 2 janvier 2014


Laura
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Mystère de la cinéphilie. On pense regarder Gilda, avec the wonderful Rita Hayworth et son gant de velours, mais en fait on regarde Laura, avec Gene Tierney. Même sans « put a blame on mame, boy », c’est quand même pas mal, Gene Tierney. Preminger aussi, c’est bien. Preminger c’est monsieur Rivière sans Retour, Carmen Jones, L’Homme au Bras d’Or, Autopsie d’un Meurtre… c’est pas du college football, c’est la NFL.

Pourtant Laura, ça commence mal, comme si le type n’avait pas lu Hitchcock/Truffaut : un whodunit minable. Laura a été tuée. Qui l’a tuée ? Car tout le monde aimait Laura !*. L’inspecteur chargé de l’enquête, McPherson (Dana Andrews), se retrouve devant une belle brochette de vainqueurs : Waldo Lydecker, un vieux beau british, fou d’amour pour Laura, Shelby Carpenter (Vincent Price, mesdames et messieurs !) un benêt de deux mètres de haut qui allait épouser la morte, et Ann Treadwell (une quinqua amie de Laura et déjà amoureuse de son ex-futur mari). Ça pourrait être un pitoyable Cluedo Agatha Christiesque, sauf qu’au bout de vingt minutes, Laura réapparait, pile au moment où ça devenait intéressant ; le flic était en train de tomber amoureux de la morte.

Mais si Laura est vivante, qui a été tué ? Il reste une heure à Preminger pour démonter cette petite intrigue, qui n’est à l’évidence qu’un simple prétexte pour créer des personnages magnifiques et des dialogues hors pair, comme celui-là, Ann Treadwell expliquant pourquoi il lui faut Shelby**. « Ce n’est pas quelqu’un de bien, mais c’est lui que je veux. Je ne suis pas quelqu’un de bien, Laura, et lui non plus. Il sait que je sais. Il sait aussi que je m’en fiche… »

Le cinéma des studios à son apogée.

* Une référence évidemment pour le Twin Peaks de David Lynch, basé également sur « Qui a tué Laura » et qui a aussi son Waldo (le Mainate)

** « He’s no good, but he’s what I want. I’m not a nice person, Laura, and neither is he. He knows I know he’s just what he is. He also knows that I don’t care. We belong together because we’re both weak and can’t seem to help it. That’s why I know he’s capable of murder. He’s like me. »




mercredi 1 janvier 2014


A Touch of Sin
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Qu’est-ce donc que ce film, sinon encore un emballement délirant de la critique ? Le même film américain serait jugé « pauvre » « faible, scénaristiquement parlant », mais non, là c’est un chef d’œuvre :

« Une œuvre aussi puissante que subversive »
Le Journal du Dimanche

« Pas un plan qui ne subjugue, pas une trouvaille de mise en scène qui ne suscite l’admiration. Du grand art. »
Le Monde

« Une maîtrise extraordinaire, sublimée par des envolées sidérantes, riche de moments inoubliables… »
Le Nouvel Observateur

« un « Short Cuts » oriental parfumé à la dynamite »
TeleCineObs

« Aucun autre film cette année n’a su avec un tel degré de maîtrise et d’art manier la couleur, le cadre, le plan, la durée, la composition. »
Les Inrocks

Evidemment, rien de tout cela n’est vrai. Le film est mal filmé, souvent flou, en vidéo HD et parfois, ça se voit horriblement. Alors oui, il y a quelque beaux plans, mais rien d’extraordinaire, dans une année qui nous a donné The Master, Le Passé, Zero Dark Thirty ou The Place Beyond the Pines.

Je ne sais pas pourquoi, mais la bande annonce m’avait donné envie d’y aller. Grave erreur : il s’agit de quatre courts métrages vaguement mis bout à bout et reliés par une thématique commune, la corruption et la violence en Chine. Où est Short Cuts ? Il n’y a pas ou peu de lien entre les histoires. Les personnages sont tout juste esquissés. Et on ne voit pas où Jia Zhang Ke veut en venir… Le tout est surtout prétexte à des scènes gores assez inutiles. On n’est pas dans un film de genre, mais bien dans un film politique. Pourquoi filmer les meurtres avec autant de complaisance ?

Certes, A Touch of Sin est sûrement intéressant sur la Chine d’aujourd’hui, mais pour le cinéma ?

L’escroquerie critique de 2013.