dimanche 18 août 2013


Elysium
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Quand on veut montrer le côté obscur d’Hollywood, le mal que l’Industrie du Rêve peut faire au cinéma, on peut prendre Elysium comme exemple.

Voici Neill Blomkamp, petit génie apparu in media res avec le coup d’éclat District 9 : une GCA intelligente – enfin -, pleine d’humour et de drame, d’action et d’effets spéciaux, proposant une Afrique du sud dystopique mais qui résonne curieusement comme l’Afrique du sud d’aujourd’hui, le tout emballé dans un package visuel éblouissant.

Hollywood s’est évidemment emparé du cas Blomkamp, et lui a demandé de refaire la même chose, american style. Et évidemment, le wonderboy sud africain y perd toutes ses aspérités, c’est à dire ce qui faisait son style. L’humour un peu glacial (malgré le même acteur, Sharlto Copley), la critique implicite de notre mode de vie actuel (le message ici est tellement gnangnan qu’on finit par être du côté des riches*), l’action un peu gore et dégueulasse.

Dans Elysium, il ne reste que le superficiel, le look global du film, et les items de la marque Blomkamp : favela ocres, véhicules antigravité, combats de robots… L’histoire est connue dans tous ses recoins dès les premières scènes, on sait de quoi sera fait la prochaine seconde, la prochaine minute, la prochaine heure.

Et comme la plupart des films américains, Elysium prend une demi-heure à bâtir un univers qui se tient pour le détruire consciencieusement pendant l’heure et demie qui suit. Un exemple : la Californie de demain est ultra policée et judiciarisée (on ne se moque pas d’un robot sans prendre de gros risques) mais Matt Damon peut courir partout pendant la deuxième partie du film sans être inquiété. Deuxième exemple : depuis l’enfance notre Matt est amoureux de Frey, il lui a promis de l’emmener un jour sur Elysium. Mais quand il en a la possibilité, il refuse de le faire. Inexplicable, sauf pour créer l’enjeu dramatique obligatoire issu du manuel de scenario.

Souvent, les réalisateurs perdus à Hollywood se sont fait piéger par la barrière de la langue, comme les Haneke français sont inférieurs aux Haneke autrichiens.

Ici, Blomkamp n’arrive pas à diriger Jodie Foster, une des plus grandes actrices de sa génération : c’est qu’il ne parle pas la langue. La langue d’Hollywood.


* Nous aussi, on veut bien vivre dans ces gigantesques villas blanches avec piscine, qui curieusement, rappellent Bel Air