mercredi 14 mai 2008
Matrix, 37°2 Le Matin, même combat ?
posté par Professor Ludovico dans [ Pour en finir avec ... ]
Il est parfois utile de quitter le nid familial pour partir en déplacement professionnel, ou en vacances, et de s’arracher au doux cocon TV + Scope + Câble. On se jette alors dans des contrées qu’on croyait abandonnées : le réseau hertzien, ses rediffusions, sa VF, qui obligent le CineFaster à revenir sur ses films d’antan. Tiens, Matrix ! Regardons ça …
Disons-le tout de suite : je n’ai jamais aimé Matrix (mais je n’osais pas le dire trop fort à l’époque (10 ans déjà)… Dès le premier opus, je me suis senti complètement hors du coup : kung-fu, verbiage philosophico-religieux, courses-poursuites trop rapides pour moi.
C’est comme le rock, Matrix : c’est pas que c’est trop fort, c’est que t’es trop vieux ! Et grâce à mon sens inné de la perspective historique, je me suis souvenu, que moi-même, aux alentours de mes vertes années, n’avais-je pas succombé aux mêmes égarements ? Dune, pour ne pas le nommer ? Qui n’a pas, comme moi, appris par cœur les répliques du plus mauvais Lynch : « L’Epice est le Ver, le Ver est l’épice ! » Qui n’a pas théorisé sur la « Force », ou « L’Empire » ? Qui n’a pas écouté en boucle la BO de Conan ou de Star Wars ?
Matrix, c’est évidemment le Star Wars d’aujourd’hui, le bouleversement sémantique du XXI° siècle, la fin des images ou – en tout cas – de leur signification réelle. Bien sûr, il y a de quoi théoriser quelques heures sur ces sujets*, mais quid du film ? La trilogie est mauvaise, imbittable, et vieillit très mal (ce qui est la cas de Dune, mais pas de Star Wars)… Pourquoi, par exemple, ces combats de kung-fu interminables ? Quelle est leur signification dans le scénario, alors qu’on est censés être dans le virtuel ? Que veulent dire ces ennuyeuses discussions socratiques entre Neo et l’Oracle ? Entre Neo et le Mérovingien ? Entre Neo et la Matrice ? On ne comprend rien ; il faut avoir aujourd’hui le courage de le dire !
En parallèle, j’ai revu 37°2. Même motif, même punition, et ce n’est pas glorieux pour les Wachowski ! Le film est compréhensible, lui, mais extrêmement ridicule… Le romantisme échevelé qui nous avait tant séduit à l’époque, le cinéma pubeux, esthétisant, superficiel, tout cela est PA-THE-TIQUE
aujourd’hui ! (Beineix, Annaud, Jeunet, tout ça c’est de notre faute, ne l’oublions jamais)… Et même Béatrice Dalle, dont nous étions tous tombés amoureux, qui n’a pas envie, aujourd’hui, de la gifler dans 37°2 !
En parlant de mérovingien, sommes-nous donc Clovis, abjuré de brûler ce que nous avons naguère adoré ? Nenni. Mais grâce au temps qui, comme on le dit si bien « fait son oeuvre », nous voilà sommés de faire le tri, entre glorioles passagères et chefs d’oeuvres gravés dans le granit.
* Un prof de philo, semble-t-il, s’y est attaqué avec talent : Olivier Pourriol, « Cinéphilo », chez Haute Tension… chronique à suivre, Framekeeper ?
lundi 12 mai 2008
Iron Man
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Voilà un film-démonstration : comment, avec un thème riche (un vendeur d’armes, alcoolo, jouisseur, pris de crise de conscience va devenir superhéros au service de l’humanité), on peut faire une daube… Alors qu’avec un argument quasi nul (des robots, déguisés en camion de pompier et en radio cassettes, envahissent la terre) on peut faire un mini-chef d’œuvre !
La différence est très simple : le talent ! Talent des scénaristes, quasi nul dans Iron Man (qu’on prétend pourtant être le héros le plus intéressant de Stan Lee). Ici, les scénaristes (ils sont quatre), se contentent de dérouler les chemins balisés du film de héros en collant : première baston, deuxième baston, baston finale, redux…
Et talent de mis en scène : on aime bien Jon Favreau (acteur culte d’un personnage de Friends, millionnaire adepte du Freefight), mais on ne peut pas dire qu’il nous ait convaincu comme metteur en scène…
dimanche 13 avril 2008
Darjeeling Limited
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Bon, Wes Anderson, c’est un peu le chouchou. On a aimé La Famille Tannenbaum, on a adoré La Vie Aquatique, et quand il produit les copains (Les Berkman se Séparent), c’est toujours sur le même thème : la famille, la famille, la famille ! On aime bien ses marottes : le rock 70’s, la France (Joe Dassin, Jacques-Yves Cousteau), ses acteurs fétiches (Schwartzman, Wilson, Murray), bref, Wes Anderson est un cinéaste sympathique.
Darjeeling Limited, c’est bien. C’est formidablement joué, monté, mis en scène, décoré, etc. C’est toujours aussi barré, burlesque que le reste, mais à mon goût moins émouvant et moins drôle que La Vie Aquatique, et peut-être un peu moins profond, mais c’est bien.
Wes Anderson est un esthète Voltairien : il faut profiter de la vie, cultiver son jardin, et ressortir d’une salle de cinéma le sourire aux lèvres : mission accomplie.
Allez donc vous débarrasser de quelques bagages inutiles à bord du Darjeeling Limited…
samedi 29 mars 2008
Disco
posté par Professor Ludovico dans [ Brèves de bobines ]
J’ai vu la bande annonce de Disco, et je crois que je vais y aller. Je sais, j’ai honte.
samedi 29 mars 2008
Formidable Juno !
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]
Autant le dire : ceux qui n’auront pas vu Juno n’auront pas le privilège de dire quels seront les dix meilleurs films de l’année 2008. Car Juno concourt en bonne tête de ce premier trimestre.
Juno est une jeune fille de 16 ans, qui tombe enceinte dès son premier rapport sexuel. Que faire ? L’annoncer à la meilleure copine, aux parents, au père (16 printemps aussi) ? Avorter ? Garder l’enfant ? Lui trouver des parents adoptifs, de préférence aimants, chaleureux, voire … riches ? Juno est une fille de son temps, un peu dessalée peut-être, pas vraiment pom pom girl, mais toute sa tête sur les épaules. Elle va trouver une solution.
Dans ce film plein de bon sens et de bons sentiments (dans le sens noble du terme), on ne s’ennuie pas une seconde, on rit, on pleure et on réfléchit. Filmé simplement, mais avec élégance, Juno ne fait aucune faute ; Double-boggey, Strike, Fanny au comptoir ! Jason Reitman, réalisateur, confirme l’essai de Thank You For Smoking. Il bénéficie en plus d’un casting parfait, tiré de la Première Division de la Série Américaine : le père J.K. Simmons, vu dans Oz, la mère, Alison Janney, attaché de presse dans A la Maison Blanche, Jason Bateman le père (adoptif) et Michael Cera, le père (biologique), stars d’Arrested Developpement, et Jennifer « Alias » Garner dans le rôle de la mère adoptive. C’est évidemment sans évoquer la performance d’Ellen Page, Miss Juno herself.
Le film a fait un carton en France, et un carton aux USA.
Que demande le peuple ?
samedi 29 mars 2008
Dexter
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]
Autant le dire tout de suite : je n’ai pas fini la Saison Un, et je ne regarderai pas la Saison Deux. Dexter est une série assez ignoble, et fait partie de ces mystères critiques qui font qu’une fois passé l’Océan Atlantique, par les mystérieuses circonvolutions de l’esprit français, ces œuvres se trouvent parées par la presse de gauche (Libé, Télérama, Les Inrocks) de qualités qu’elles n’ont pas.
Comme 24, pour ne pas la nommer, Dexter est une série extrêmement réactionnaire. Elle se cache, contrairement aux pérégrinations de Jack Bauer, derrière une prétendue malpensance.
Dexter est un expert du sang dans la police de Miami le jour et… serial killer la nuit. Jusque là, on se dit Miam Miam ! On pense à The Shield, ou à Damages, avec ces héros ambivalents qui caractérisent la Nouvelle Série Américaine.
Et Dexter s’acharne effectivement à démonter quelques mythes : la famille, les relations homme-femme, la police embarquée dans des querelles médiatico-politiques. Tout cela est banal, mais fonctionne à peu près. Mais c’est le coté serial killer qui fait plonger l’ensemble. Car Dexter est un tueur d’exception : son père adoptif a décelé très vite ses pulsions, et plutôt que de faire soigner son fils, a décidé de canaliser cette énergie en l’autorisant à tuer… des coupables qui échappaient à la justice des hommes, grâce au laxisme de la justice américaine !
Moralité, Dexter est devenu un Justicier Dans la Ville, un Charles Bronson gay qui débarrasse la surface de la terre de tous les pédophiles, marchands de sommeil, psys dérangés. Serial Killer, oui, mais utile à la société !
Que ce genre d’arguments séduise occasionnellement le lecteur de Présent ou National Hebdo, pourquoi pas. Mais que cela n’interpelle pas la presse normale, cela dépasse l’entendement.
samedi 29 mars 2008
Wild Wild West
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD ]
Dans un genre plus léger, j’ai enchaîné sur Wild Wild West, film que j’avais détesté à sa sortie. Et bien, sur TF1, il ne s’en est pas mal tiré (comme quoi il existe bien un format télé pour certains films, qui ne méritent pas la salle, mais passent très bien le dimanche après-midi devant votre canapé).
Au rang des réjouissances, quelques scènes d’anthologie : le discours du lynchage de Will Smith devant une assemblée de blancs médusés, la parodie de la Voix de Son Maître Pathé Marconi, la paire de fesses hallucinantes de Miss East* (Bai Ling), la performance hallucinée de Kenneth Branagh en Arliss Lovelace (et un brit’ de plus dans ma liste des méchants de cinéma américain !).
J’ai même finit par trouver que WWW respectait au moins la lettre de la série : humour et délires steampunks. Je dis bien « à la lettre », car je ne leur pardonnerai jamais d’avoir remplacé Robert Conrad, l’Homme le Plus Sexy du Monde, par Will Smith, sexy mais PAS James West. James West est BLANC, les gars ! On peut faire beaucoup de choses contre le racisme, mais ça c’est vraiment du politiquement correct de bas étage…
Et puis ils n’ont utilisé la formidable musique qu’une fois…
Et puis globalement, le fim était assez nul, non ?
* qu’on comparera avec plaisir à la demi-seconde de nichons de Salma Hayek dans Frida. Comme quoi 12 images de film peuvent suffire à la plupart des spectateurs mâles de ma génération…
samedi 29 mars 2008
Ben Hur
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD ]
C’est toujours bien de revoir des vieux films. En ce Lundi Pascal, cloué au lit pour des raisons que je ne peux détailler ici, je tombe sur Ben Hur. Tiens, je vais zapper les nunucheries cathos en attendant la Course de Chars ! Et puis on s’attarde, on batifole, et on se finit par regarder tout le film.
Car Ben Hur est un grand film. D’abord c’est du William Wyler, qui n’est pas la moitié d’un imbécile, un pilier de Hollywood, même : Vacances Romaines, Funny Girl, La Maison des Otages…
Mais surtout, Ben Hur dépasse le péplum habituel, étant au contraire porteur d’un message pour le moins complexe, aussi complexe que l’itinéraire de Judas Ben Hur, son héros. Ce message, quel est-il ? Rien de moins que le passage de l’Ancien Testament au Nouveau Testament…
Ben Hur est un jeune juif conducteur de char, ami d’un romain, Messala. Mais Messala doit réprimer les révoltes juives, et ne fait pas dans lé détail : il emprisonne la famille de Ben Hur (mère et sœur), et envoie Ben Hur aux galères.
C’est là que ça se corse. Comme dans tout bon film de gladiateur, Ben Hur est doté d’une impressionnante musculature huilée, qui tape dans l’œil d’un général romain, qui le fouette, pour le mater. Mais lors d’une bataille, où Ben Hur est mystérieusement détaché de son banc de rame, le bateau coule. Le jeune juif, qui ne rêvait que de se venger, plonge à la surpise générale et sauve la vie du centurion. En échange, celui-ci l’affranchit, le convie à son triomphe à Rome et l’adopte !
Devenu « civilisé », Ben Hur finit néanmoins par retourner en Judée, au moment même où un certain Ponce Pilate y est nommé Procurateur. Ben Hur y trouve l’instrument de sa vengeance, dans un épisode grotesque où un cheik arabe (joué par l’improbable acteur gallois Hugh Griffith, maquillé au Nutella) lui propose de défier Messala à la course de char, et où il le tue accidentellement. C’est aussi le moment où il retrouve mère et sœur, lépreuses, et Esther, son amour d’antan récemment converti à la parole d’un certain Jésus de Nazareth.
Refusant le pardon, s’ancrant dans la vengeance old school (œil pour œil, dent pour dent, bref l’Ancien Testament), Ben Hur est incomplet. C’est en acceptant le pardon, en tendant la joue, que le miracle s’accomplit : Christ est mort, Christ est ressuscité et, au cours d’une dernière scène d’anthologie sous l’orage qui gronde sur le Golgotha, la mère et la sœur peuvent enfin guérir de la lèpre, tandis que le sang du christ, qui ruisselle au pied de la Croix, devient ruisseau et rivière, prêt à inonder le monde.
On le voit, Ben Hur (le film) mélange, au coeur d’un incroyable imbroglio, métaphores psychanalytiques (plonger dans l’eau en orphelin juif et en ressortir baptisé et fils de romain, tuer le père pour renaître juif), et messages philosophico-religieux : passer du judaïsme à l’Ancien Testament, de la Loi à la Philosophie, du primitif au civilisé, des dieux romains au Dieu Unique… Ben Hur dépasse largement le seul périmètre de sa course de char.
NB : Ben Hur, c’est aussi le grand film juif de Charlton Heston. Une ode au judaïsme, voire au sionisme. Etoile de David en boucle de ceinturon, nostalgie du pays une fois à Rome, phylactère dans la porte, etc. Charlton Heston est le plus mauvais acteur du monde, et en grand juif aux yeux bleus, il pique les yeux, mais on s’y fait, on finit même par oublier le gugusse de la NRA. Car Charlton est jeune, et Charlton est beau.
dimanche 16 mars 2008
Californication
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]
Avec un titre pareil, le Professor est obligé de regarder ! De la Californie, du Sexe, les Red Hot Chili Peppers ! Avec David Duchovny, l’acteur le plus sous-employé de sa génération ! Et puis la réputation qui précède Californication, son buzz, qui veut que cette série soit le pendant, versant mâle, de l’excellentissime Sex and The City. Le héros, écrivain new-yorkais paumé à L.A., avec l’angoisse de la page blanche depuis que sa femme l’a quitté. Son espoir, les reconquérir. Original, non ?
En attendant, ca baise à tout va. Et on va voir ce qu’on voir : du cul, du cul, du cul ! Et du cul, il y en a dès l’ouverture : des seins, des fesses, du sexe oral, bref, the whole nine yards. Pire, on fume ! Et pas que des cigarettes à nicot !
Mais bon, on voit vite que Californication se résume à ça. Montrer le sexe de manière frontale, dialoguer de manière incisive, mais pour ne rien dire. Là où Sex and the City montrait peu mais disait beaucoup, Californication fait le contraire.
Et qu’est-ce qui est plus excitant à votre avis ?
samedi 15 mars 2008
La Môme et la Marseillaise
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -
Le Professor a toujours quelque chose à dire... ]
Il y a quand même une très belle scène dans La Môme, chroniquée ci-avant. C’est celle où Piaf, enfant, chante la Marseillaise et vole la vedette à son père. D’abord, pour un peu, la caméra de Dahan s’arrête de virevolter, et l’émotion peut s’installer. Parce que la Marseillaise, ça marche toujours. « Allons enfants ! », et c’est reparti. La question, c’est le rythme : où couper ?
Dahan aurait pu le faire dès le premier couplet, mais il sait, même si c’est long pour un clipeur comme lui, qu’il faut continuer jusqu’au refrain. On ne coupe pas l’hymne national.
Bien lui en prend, car la petite actrice (Pauline Burlet) fait bien le boulot. Et Jean-Paul Rouve, en père jaloux, aussi. Et enfin, le public de ces artistes de rue, qui se laisse gagner par l’émotion. Là aussi Dahan évite la faute de goût classique de ce genre de reconstitution : le cliché. On sort de la Guerre de 14, et les français sont très patriotes. Dahan ne commente pas, n’ironise pas. Très bien.
Le message est passé : l’artiste c’est Piaf, pas son père.