mercredi 23 juillet 2025


L’espion qui Venait du Froid
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Pour le Professore Ludovico, la seule véritable ambiance d’espionnage, c’est celle de John le Carré. Contrairement à Karl Ferenc, qui en pince toujours (30 ans après la Chute du Mur !) pour James Bond. Nous aimons l’ambiance Le Carré, mais pas vraiment les livres du Monsieur (sauf Le Tunnel aux Pigeons, sa géniale autobiographie).

L’an dernier, sur l’insistance de quelques amis, nous sommes retournés à la source, L’espion qui Venait du Froid, le livre. Encore agent du MI6 à l’époque, Le Carré décrit en 1964 les magouilles de la Guerre Froide avec une précision clinique.. Comment intoxiquer les Russes, comment faire passer les transfuges à l’Ouest… Le livre rencontre un immense succès, et surtout la reconnaissance de ses pairs. Martin Ritt en tire immédiatement un film, qui a autant de succès. Qu’en reste-t-il, soixante ans après ?  

Le propos est toujours abscons, et on a du mal aujourd’hui à suivre les circonvolutions des protagonistes. Mais il y a Richard Burton, impressionnant bloc de violence contenue, dans ce rôle de brute avinée qu’il tiendra partout, de Cléopâtre à Quand les Aigles Attaquent

Leamas (Richard Burton) est un agent du MI6 basé à Berlin Ouest. Riemeck, une source de Leamas, se fait tuer alors qu’il essaie de passer le Mur, et Leamas veut se venger. Le MI6 lui propose de passer à l’Est, et créé pour cela une « légende » : licencié, il devient un alcoolique, un asocial, vite pris sous son aile par une jeune militante communiste (Claire Bloom, pas terrible) qu’il entraine, malgré lui, dans cette aventure…

Mais il y a évidemment un plan dans le plan, ce que va découvrir Leamas, et c’est seulement là que le livre (et le film) deviennent intéressants.

Le principal mérite du film de Martin Ritt, c’est probablement d’offrir la matrice des films d’espionnage qui vont suivre. Cet éclairage expressionniste, ce noir et blanc poisseux, et ces zones de gris. Dans les dernières scènes, un blanc aveuglant évoque les projecteurs des miradors, qui piègent les protagonistes comme de mouches.

Et dans un final magnifique, parfaite métaphore de ce monde des ombres : un plan fixe du Mur de Berlin, éclairé par des lumières fantomatiques, comme la mort qui rode.