mardi 27 juin 2017


Hollywood ne répond plus
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -Le Professor a toujours quelque chose à dire... -Les gens ]

Voilà un excellent petit livre pour l’été. Olivier Rajchman a en effet la bonne idée de faire le pont, au plein cœur de la crise de la Twentieth Century-Fox, entre trois films qui vont devenir légendaires pour des raisons extrêmement différentes. Cléopâtre, le chef d’œuvre que Mankiewicz va renier toute sa vie, Le Jour Le Plus Long ou la revanche de Darryl Francis Zanuck, et Something’s Got to Give le film avorté de Marilyn Monroe, quelques jours avant sa mort.

Entre les trois films, un point commun : la Fox, au bord du gouffre au début des années soixante, qui met en chantier le plus de films dans l’espoir de tirer au moins le gros lot qui permettra de la sauver.

Petit film, Cléopâtre ? C’est en tout cas l’ambition de départ ; reprendre une histoire connue, et un scénario maison ayant déjà fait l’objet d’un film en 1923. Et un tournage, sous les ordres de Robert Mamoulian, sur… les bords de la Tamise, pour profiter des subventions anglaises. Bizarrement, le temps n’est pas clément et on tourne au mieux deux minutes par jour. Mamoulian est viré, on engage un bon, le Mank’ (All about Eve, Soudain l’Eté Dernier, L’Affaire Cicéron), qui a l’heur de plaire à Miss Taylor, la petite jeunette qui vient de faire un carton, justement, dans Soudain l’Eté Dernier. C’est le début des ennuis, car on recrute aussi un certain Richard Burton, gallois au sang chaud, et comme on dit au Portugal, il faut éviter de mettre la bûche près du feu. Le tournage part en vrille, entre le scandale (les deux sont mariés), les caprices de madame, les beuveries de monsieur, et le scénario qui s’écrit… au fur et à mesure du tournage, une excellente solution pour dépenser beaucoup d’argent…

Les autres films ne sont pas en reste côté anecdotes ; Zanuck, vexé d’avoir été éjecté de la compagnie qu’il avait fondée puis dirigée, rachète les droits du best seller sur le D-Day. Il a une idée de génie pour son Jour le Plus Long : faire un casting… uniquement composé d’inconnus.

Quant à Marilyn, elle ronge son frein contre la petite brunette aux yeux violets qui lui vole la vedette, elle la déesse blonde horriblement âgée de trente-deux ans, et décide de reprendre l’initiative en chantant Joyeux Anniversaire à JFK. Problème, elle est officiellement en congés maladie quand Cukor la demande sur le plateau de Something’s Got to Give. Virée dans les semaines qui suivent, elle prendra la route mortelle de Brentwood, route parsemée de médicaments, d’entourage défaillant et de menaces du clan Kennedy.




lundi 26 juin 2017


The Night of
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Quand on voudra analyser les années 2000, les historiens se pencheront sur HBO. Pour comprendre l’histoire des Etats-Unis post-11 septembre, ou de l’Occident en général, il suffira de regarder les Soprano, Sur Ecoute ou The Night Of. En huit épisodes, la série – sous le faux prétexte d’une enquête policière* – trace le plus précis des portraits de notre monde actuel. Un monde gangréné par la peur du terrorisme, la drogue, le racisme, et le fric.

En huit épisodes d’une subtilité incroyable (on est sûr que Nazir n’a pas tué la fille, alors qu’aucune preuve ne vient étayer cette idée ; la série va jouer avec ce préjugé), The Night of traitera tous ces sujets, la vidéosurveillance partout, les avocats des riches et les avocats des autres, Rikers’ Island, le dur boulot de flic ou de la procureure, miné par l’obsession du résultat, la médecine à deux vitesses, etc., etc.

Porté par le meilleur du casting d’HBO, John Turturro, qu’on ne présente plus, Riz Ahmed (Rogue One), Michael K. Williams (Omar de Sur Ecoute), Bill Camp (The Leftovers, Twelve Years a Slave), Peyman Maadi (Une Séparation, A Propos d’Elly), J.D. Williams (Sur Ecoute, Oz), chaque scène est un merveille de réalisme, de subtilité, d’intelligence, portée par des comédiens extrêmement sobres.

La mise en scène est au diapason : jamais spectaculaire, totalement au service du scénario. La base du cinéma, tout simplement : show, don’t tell. Un regard, et Turturro décide d’aider ce gosse perdu dans sa cellule du 21th precinct. Le visage fermé du flic remplissant sa déclaration de retraite : pas besoin d’une ligne de dialogue pour comprendre qu’on ne met pas trente ans de boulot aussi simplement aux archives. Ou la transformation visuelle de Nazir qui vient jeter l’ambigüité sur le personnage et nous obligent tout à coup, peut-être, à réviser nos préjugés sur l’innocence du héros.

The Night of est simplement l’une des plus grande séries de ces dernières années…

* Un jeune américain d’origine pakistanaise a-t-il ou non sauvagement assassiné son coup d’un soir ? Le spectateur comprend vite que ce n’est pas le sujet de The Night of




samedi 24 juin 2017


HHhH
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

« Ça fout pas les poils ! » Le jugement définitif de Karl Ferenc Scorpio, qui s’y connait en histoires tchèques, fait parfaitement l’affaire pour définir HHhH, l’adaptation speedée et inutile du formidable livre de Laurent Binet sur l’opération Anthropoid, et l’assassinat d’Heydrich à Prague en 1942.

HHhH, le film, est certes bien fait, respectueux du livre comme de l’histoire*, mais on n’éprouve ni peur, ni peine**, à cette déchirante et terrifiante histoire. La faute à Cedric Jimenez qui balade sa caméra à l’épaule en permanence, même quand il visite un poulailler (celui d’Himmler, sic !). A force de s’agiter tout le temps, les moments forts ne ressortent pas, comme l’attentat, ou le siège final de l’église Saints-Cyrille-et-Méthode.

Jimenez a des idées, mais il ne les mène jamais loin. Heydrich serait un jeune homme bizarre, mais rien ne vient l’étayer***. Heydrich aurait été humilié par son renvoi de l’armée ? Jimenez ne pousse pas cette idée. C’est Lina, sa femme, la vraie nazie, la grande inspiratrice ? Cette intention, un peu plus poussée par Rosamund Pike, s’arrête en rase campagne tchèque. Quant à la réelle utilité de l’attentat, qui va déclencher les plus terribles représailles, ce débat est torché en une seule scène, alors qu’elle est au coeur du livre…

Quand on ne sait pas vraiment ce qu’on veut dire, on se contente d’illustrer la Grande Histoire, qui fait office de scénario. Malédiction du biopic. Mais sans point de vue, pas de cinéma.

Tout cela est bien dommage parce qu’il y a beaucoup de talents et beaucoup d’argent dépensé, mais non, HHhH ne fout pas les poils…

* Même s’il renonce à ce qui faisait l’originalité du livre, c’est à dire la voix de Binet, et son analyse de sa propre subjectivité face à la grande Histoire.
** A quelques exceptions près ; l’attentat lui-même, très bien mis en scène, et le suicide du père et du fils résistant.
*** pas aidé par Jason Clarke (Everest, Zero Dark Thirty) bien pâle, peu ressemblant, et sans ambiguïté dans le rôle de Heydrich




lundi 19 juin 2017


Missions
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Bonne nouvelle : les Français se mettent à la série TV SF. Mauvaise nouvelle : les Français se mettent à la série TV SF. Bah oui, comme d’habitude, c’est très beau : générique splendide, décors incroyables (les images de Mars, on ne sait pas où ils les ont tournées*) et les vaisseaux en 3D, parfaits. La musique techno, French touch, magnifique.

Qu’est-ce qui cloche, alors ? Comme d’habitude : le moins cher. Les dialogues, écrits par une classe de cinquième. Et les acteurs qui les jouent : une classe de quatrième**. C’est dommage parce que les idées sont bonnes, à savoir une sorte d’anthologie-clin d’œil de tout ce qui fait la SF depuis 100 ans.

* dans le désert marocain, merci internet.
** malgré le génial Mathias Mlekuz, disparu depuis Nos Enfants Chéris




dimanche 18 juin 2017


Twin Peaks, s03 e1234
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

On aurait dû s’en douter quand on a appris, en mai, qu’à la projection des deux premiers épisodes, David Lynch avait été ovationné à Cannes. Les mêmes ayant probablement poussé des cris d’orfraie en 1990 contre La 5 et le pouvoir destructeur de la télé, qui venait d’absorber le plus grand cinéaste de sa génération. Cannes se trompe toujours d’une guerre.

Donc si elle applaudit le reboot Twin Peaks « 25 years later », c’est qu’il y a un problème. Et il y a un problème. Ce que les Alpes Maritimes applaudissent aujourd’hui, c’est la veine auteuriste de David Lynch. Et c’est tout ce qui ne va pas dans Twin Peaks.

Le génie de la série en 1990 était d’injecter au sein du format ultra classique du soap opéra, le poison d’un auteur, et pas n’importe lequel, le plus freak d’entre eux, l’homme d’Eraserhead et des courts métrages The Alphabet ou The Amputee. Le poison était dans la machine, et allait changer la machine pour toujours.

Aujourd’hui la télé a bien changé, mais elle reste toujours un média relativement conformiste. Lynch voit bien le parti qu’il peut tirer de ce retour tant attendu ; faire ce qu’il veut sans le moindre contrôle de la chaine. C’est à dire le contraire de 1990 où le rapport de force était inversé ; Lynch était à la ramasse, business-wise, et se remettait péniblement de l’échec dantesque de Dune, tout en conservant une aura critique (Blue Velvet, Sailor et Lula).

Aujourd’hui, il n’a plus rien à prouver, ne fait plus de cinéma, et donc peut se permettre n’importe quoi. Il a imposé ses choix à Showtime, menaçant de partir s’il n’était pas entendu. Il sait qu’il a des millions de fans derrière lui. Et Showtime s’en fout ; Twin Peaks ne booste pas l’audience, mais les abonnements, et c’est ça qui compte.

Lynch peut donc s’amuser avec les trucs de mise en scène expérimentalo-sixties de ses vingt ans. Tant pis pour le fan, tant pis pour le spectateur. Quatre premiers épisodes interminables, filmés à l’envers, gags étendus à l’extrême (« heeellllooooo ! »), drame raté (Bobby revoyant l’image de Laura à vingt ans), pas un plan de Twin Peaks, la ville. Pas de Badalamenti, qui a tant fait pour la série. Pas une goutte d’humour, pas une goutte d’amour.

Que du poison.




samedi 17 juin 2017


Girls, saison 5
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Problème de poils dans le dos, d’aisselles mal rasées, de canon esthétique « blanc / chrétien » pour un mariage : vous l’avez compris, les Girls sont de retour. Comme à chaque fois, on hésite avant de s’y remettre ; la peur d’être déçu par nos amoureuses, Hannah, Marnie, Jessa et Shoshanna.

Mais voilà, trente secondes après, le talent de Lena Dunham est toujours là. Personnages au cordeau, qui évoluent dans le chaos vers la vie d’adulte, description de la boboïtude newyorkaise ou des incompréhensions intergénérationnelles, tout est dans Girls.

Il faut dire que la série n’est pas seulement portée par des dialogues brillants, mais surtout par les comédiens incandescents, jusqu’au moindre petit rôle, qui les portent. Ainsi, Zosia Mamet venait de nous convaincre que transplanter au Japon le petit lapin Shoshanna était parfaitement génial ; il a suffi qu’elle se retourne face caméra, deux simples larmes dans les yeux, pour nous persuader du contraire.

Il ne manquait plus que la musique de David Bowie pour nous dire que Girls était la meilleure série du monde, parce qu’elle nous parlait, nous qui ne sommes ni filles, ni newyorkais, ni twentysomething, tout simplement de nos étranges vies.

Life on Mars.




mercredi 14 juin 2017


Le Serment
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Fascinés par les premiers épisodes de ce Serment, nous sommes allés voir sur IMDb pour y trouver le nom du réalisateur : Peter Kosminsky. Bon sang, mais c’est bien sûr, l’homme de Warriors, le chef d’œuvre sur les casques bleus en Bosnie, qui nous avait pris aux tripes en son temps. La définition même du cinéma pas gentillet.

Ce Serment est pareil, six heures de pédagogie décoiffantes sur la Palestine 1946, la naissance d’Israël et les Britanniques qui n’en peuvent mais. Le tout habilement mêlé, du moins au début, à une intrigue contemporaine. Une jeune britannique découvre le journal de son grand père aux portes de la mort, et son rôle dans cette histoire moyen orientale. Elle profite d’une invitation de sa meilleure amie israélienne qui part faire son service pour découvrir le pays. Les contradictions d’aujourd’hui étant évidemment celles d’hier, les deux histoires pinpongent plutôt bien jusqu’à la dernière heure, où, comme une bonne blague juive, on commence à se demander si ce n’est pas notre héroïne qui porte la poisse, tant l’inétgralité du conflit israélo-palestinien semble retomber sur ses épaules.

C’est la partie la plus artificielle du film. On voit bien que Kosminsky est plus attaché à transmettre son message qu’à s’intéresser à ces viles péripéties, love stories et autres problématiques Best Friend Forever.

Que cela ne vous décourage pas de découvrir ce serment-là…




samedi 10 juin 2017


Westworld
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Ce Mondwest défie l’analyse. Passionnant mais pas émouvant. Intéressant, mais sec comme un coup de trique. Surprenant mais sans cliffhanger. Cette série-là prend son temps, ne semble pas s’intéresser aux émotions du spectateur, mais pourtant on ne s’ennuie jamais. Westworld installe patiemment son puzzle et attend les derniers épisodes pour en révéler les contours.

Mais en même temps, elle offre trois mises en abîmes passionnantes, sur notre besoin de fiction, nos addictions aux jeux vidéos, et sur la psychanalyse.

Résumons. Westworld, c’est un parc d’attractions pour ultrariches (il y est dit que la journée y coûte 40000 dollars), où l’on peut faire absolument ce que l’on veut avec des robots ultraréalistes. Évidemment, les touristes ne font que deux choses : les tuer et les baiser.

Sur notre irrépressible besoin de fiction, le spectateur est indirectement confronté là-dessus, au travers de dialogues à double sens posés aux visiteurs du parc : « C’est bien ce que vous voulez vivre, non ? des aventures ? découvrir votre véritable vous-même ? » Une question qui pourrait être posée directement du showrunner au spectateur venu visiter, via HBO, le « parc d’attractions du sexe et de la violence », les arguments marketing de la chaîne depuis ses débuts*. Des questions qui sont posées en fait au spectateur ? Une vieille technique que J.J. Abrams a utilisé dans Lost et qu’il réutilise aujourd’hui.

N’est ce pas là la définition d’une œuvre d’art ? Faire réfléchir. Faire rêver. Faire vivre autre chose, par procuration ? Le sexe, la violence, l’exotisme ?

Mais c’est la deuxième partie de la phrase « découvrir votre véritable vous-même » qui est le fond de Westworld. La critique du jeu video est assez anecdotique, plutôt clin d’œil au gamer que critique en profondeur ; les niveaux, le « labyrinthe », comme boss de fin de niveau, etc. C’est sur la psychanalyse que Westworld est passionnante.

La série propose en effet cette figure de style régulière : un concepteur face à une de ses créatures, comme par hasard toujours nue (ne dit-on pas « se mettre à poil »?). Les concepteurs demandent au robot de « baisser le niveau d’émotions », ou les enjoint à passer en mode « analyse ». La créature (comme on parle de créature de Dieu**) doit alors faire le bilan de l’action qu’elle vient de décrire, dans une perspective mécaniste : « je me suis mis en colère parce que j’ai improvisé sur une des lignes de mon script ». Encore une fois, mélange de la fiction et du psy.

Qui suis-je ? D’où viens-je ? Mes perceptions sont-elles réelles ? Suis-je vivant ? Êtes-vous morts ? Les vieilles questions métaphysiques sont omniprésentes dans la série, et l’empreinte de Philip K. Dick, toujours royalement présente.

Ces questionnements éternels de l’humanité, Westworld y apporte des réponses, parfois troublantes. Au-delà de la formidable cathédrale romanesque qui se construit devant nous (et n’est visible qu’à la toute fin du dernier épisode), c’est bien ça qui passionne.

* HBO a commencé par être une chaîne de boxe puis est devenue, selon la légende, la seule chaîne où on pouvait dire « fuck » à la télé.
** Les robots étant programmés pour croire que les humains sont des dieux, et les moments où ils sont analysés / réparés, des rêves.




mercredi 7 juin 2017


La 317e Section
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Ça faisait un bout de temps que le DVD (Collection « Le Monde ») traînait sur la commode, et que le Lieutenant Jeg, du 3ème Cuir, me tannait pour que je regarde le « meilleur des films de guerre ».

Voilà c’est fait, et cette réputation n’est pas usurpée. On connaissait évidemment le cinéma particulier de Pierre Schoendoerffer (Le Crabe Tambour, L’Honneur d’un Capitaine) mais cette 317e Section nous avait, bizarrement, longtemps résisté. Et c’est vrai que c’est un choc.

Cette évocation réaliste, quasi-documentaire, de cette vie de section (une vingtaine d’hommes) qui retraite depuis Diên Biên Phu, on aurait dû la voir depuis longtemps au cinéma.

Le réalisme, ce n’est pas la question du bon bruitage d’un son de fusil, de la taille de costumes parfaitement raccords avec l’époque, ou de décors somptueux. C’est d’abord une question de personnages. Et là, il y en a deux, archétypes du jeune chef de section (Jacques Perrin) et du vieil adjudant (Bruno Cremer) qui en a vu d’autres.

Pierre Schoendoerffer n’en fait pas des tonnes sur le sujet. Parce que, comme lui (dans un contexte autrement moins dangereux), nous avons passé un an dans l’armée française, il fallait que cette évocation soit réaliste, sur ce microcosme bizarre qu’est une section de soldats, mélange éternel de camaraderies et de violences, de courages et de faiblesses.

C’est ce que réussit précisément Schoendoerffer. Il n’est pas le seul, ni le premier soldat-écrivain-cinéaste (Céline, Giraudoux, Jünger, Füller, Stone), mais sa réussite est particulière. Parce que l’on s’attache à la réalité de ses personnages, à leur véracité émotionnelle, on les suit sans difficulté dans leurs pérégrinations dans la jungle, et pas l’inverse. Le cinéma s’attache souvent à l’histoire, au détriment des motivations de ses personnages, souvent réduits à un cliché (le sergent cruel-mais-juste, le soldat-objecteur-de-conscience-mais-courageux).

Ici, pas de rédemption, mais quelques instants dans la vie de soldats traqués et défaits, mais qui reste des hommes. Malgré le harcèlement des Vietminh, reste l’espoir de s’en sortir, la possibilité de porter soi-même des coups à l’ennemi, la violence et la peur.

Le film se terminera abruptement comme se termine une guerre, comme se termine une vie. Cinquante ans après, le film n’est pas pris une ride sur ce plan-là. Qu’on ait fréquenté ou non l’armée française, il faut voir ce film.




mardi 6 juin 2017


That Thing You Do
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Quand on cherchera la définition d’un film qui n’est pas gentillet, on pourra toujours tomber sur film de Tom Hanks. That Thing You Do, un film d’époque où le mot gentillet semble pourtant le plus adapté : les fifties, jolies filles, belles bagnoles, Coca-Cola et rock’n’roll. Mais Tom Hanks voit plus loin que ça. That Thing You Do est une histoire de one hit wonders, ces chanteurs qui, malgré un premier hit, ne deviendront jamais des stars.

One hit wonder, c’est la réalité économique du showbiz. Un producteur, comme un éleveur de pur-sang, doit avoir des dizaines de chevaux dans son écurie, et tous ne peuvent pas gagner l’Arc de Triomphe tous les ans… pour un Rolling Stone, un U2, un Téléphone, combien de The Tornados (Telstar), Dexys Midnight Runners (Come on Eileen), ou de Patrick Coutin (J’aime regarder les filles) ?

Et comme le dit le vieux musicien de jazz, trois choses peuvent venir casser ta carrière ; les filles, l’argent et l’alcool. Ou les trois. That Thing You Do filme cette démonstration ; chacun des personnages y succombera. Et cette belle histoire qui semblait partie pour une happy end années 50 se terminera, pas forcément de façon dramatique, mais en tout cas par l’échec de cette proposition.

Tom Hanks filme cela très basiquement mais très efficacement, en se donnant le rôle du méchant : le pragmatique producteur des Oneders.