dimanche 18 juin 2017


Twin Peaks, s03 e1234
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

On aurait dû s’en douter quand on a appris, en mai, qu’à la projection des deux premiers épisodes, David Lynch avait été ovationné à Cannes. Les mêmes ayant probablement poussé des cris d’orfraie en 1990 contre La 5 et le pouvoir destructeur de la télé, qui venait d’absorber le plus grand cinéaste de sa génération. Cannes se trompe toujours d’une guerre.

Donc si elle applaudit le reboot Twin Peaks « 25 years later », c’est qu’il y a un problème. Et il y a un problème. Ce que les Alpes Maritimes applaudissent aujourd’hui, c’est la veine auteuriste de David Lynch. Et c’est tout ce qui ne va pas dans Twin Peaks.

Le génie de la série en 1990 était d’injecter au sein du format ultra classique du soap opéra, le poison d’un auteur, et pas n’importe lequel, le plus freak d’entre eux, l’homme d’Eraserhead et des courts métrages The Alphabet ou The Amputee. Le poison était dans la machine, et allait changer la machine pour toujours.

Aujourd’hui la télé a bien changé, mais elle reste toujours un média relativement conformiste. Lynch voit bien le parti qu’il peut tirer de ce retour tant attendu ; faire ce qu’il veut sans le moindre contrôle de la chaine. C’est à dire le contraire de 1990 où le rapport de force était inversé ; Lynch était à la ramasse, business-wise, et se remettait péniblement de l’échec dantesque de Dune, tout en conservant une aura critique (Blue Velvet, Sailor et Lula).

Aujourd’hui, il n’a plus rien à prouver, ne fait plus de cinéma, et donc peut se permettre n’importe quoi. Il a imposé ses choix à Showtime, menaçant de partir s’il n’était pas entendu. Il sait qu’il a des millions de fans derrière lui. Et Showtime s’en fout ; Twin Peaks ne booste pas l’audience, mais les abonnements, et c’est ça qui compte.

Lynch peut donc s’amuser avec les trucs de mise en scène expérimentalo-sixties de ses vingt ans. Tant pis pour le fan, tant pis pour le spectateur. Quatre premiers épisodes interminables, filmés à l’envers, gags étendus à l’extrême (« heeellllooooo ! »), drame raté (Bobby revoyant l’image de Laura à vingt ans), pas un plan de Twin Peaks, la ville. Pas de Badalamenti, qui a tant fait pour la série. Pas une goutte d’humour, pas une goutte d’amour.

Que du poison.


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