mercredi 23 janvier 2013


Mad Men, saison 5
posté par Professor Ludovico dans [ Séries TV ]

Qui arrêtera Mad Men? La cinquième saison est en train de s’achever sur Canal+, sans montrer le moindre signe d’essoufflement. Au contraire, elle emprunte aux meilleures séries les recettes du succès.

Comme Sur Ecoute, elle étend progressivement son emprise sur tous les sujets imaginables (ségrégation, régimes amaigrissants, musique pop…) Comme Six Feet Under, elle investigue tous les dysfonctionnements familiaux.

Et comme A La Maison Blanche, elle change de point de vue sur ses personnages principaux. Betty Draper, icône sexy 50’s, est devenue une desperate housewive abonnée au Weight Watchers et à la dépression. Sa rivale, la nouvelle Madame Draper, révèle toutes les subtilités de son personnage. Certains personnages, pourtant cultes (la bomba Christina Hendricks), s’éclipsent provisoirement. D’autres se ringardisent, Don Draper en tête.

Qui oserait faire ça dans sa propre série ? Quelqu’un qui est bien sûr de lui, ou de son immense talent.




lundi 21 janvier 2013


Django Unchained
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Et voilà ! On s’est encore fait avoir par Quentin T., le roi du pitch, comme deux autres grands escrocs : Luc Besson, ou Ridley Scott. On a beau savoir ce que c’est, une escroquerie à grande échelle, un faux chef d’œuvre, on y va quand même. Comme quand Luc B. nous proposera un super film sur Valerian, on ira, ou Ridley S., le film définitif sur Alien ou Blade Runner, on s’y rendra pieds et poings liés. C’est inexplicable, c’est comme ça.

Le Professore a beau dire pis que pendre sur ce diable de Tarantino, mais pour autant, il y va quand même ! Un film « double feature » de bagnole ? Il y va ! Un film sur la seconde guerre mondiale ? Avec Brad Pitt ? Allez on y va ! Sur le western spaghetti (le Professore n’a vu aucun western spaghetti : on y va aussi !

Pourquoi ? Parce que l’on sait que le gars est sincère, qu’il y aura beaucoup d’amour dans le film de QT, un amour irréductible pour le cinéma, mais malheureusement rien que ça.

Pendant la première heure, pourtant, on croit que le mec a grandi, qu’il s’est acheté une conscience, qu’il veut faire un film sur les horreurs de l’esclavage, lui le petit rital blanc qui aime tant les noirs et leur culture (Jackie Brown, Pulp Fiction). C’est plutôt réussi, ça avance pas mal, mi-comédie, mi-pastiche. Mais QT ne peut résister à une bonne scène de cinéma : quand il récupère Leonardo di Caprio au mitan du film, il lui confie les clefs du camion et l’autre les prend, dans une performance extraordinaire.

À partir de là, le film devient n’importe quoi, mais Tarantino s’en fiche, parce que lui, son truc, c’est le pastiche ! Peu importe que l’histoire ne tienne pas debout, que les gags ne soient pas terribles, que ça commence à traîner en longueur. « Je suis dans le PASTICHE, vous dis-je ! » semble-t-il hurler au spectateur. Et comme à chaque fois, on commence à s’ennuyer… tout simplement parce qu’il est impossible de regarder quelque chose qui ne veut rien dire. Même les films les plus ringards de Michael Bay ont un petit quelque chose à dire, ce ne sont pas juste des jouets de cinéma. Même quand Spielberg s’amuse avec des dinosaures, ou la bio de Lincoln, il raconte quelque chose. Ça peut être ridicule (les messages républicains de The Rock, chronique à venir), prétentieux (Le Lincoln de Spielberg pèse déjà très lourd, et on n’a vu que la bande annonce), mais au moins il y a un adulte derrière, qui essaie de nous raconter quelque chose.

Un jour, j’étais dans un taxi marseillais ; il ne cessait de crier sa vindicte sur ses congénères automobilistes « Regardez moi ces côônards, monsieur ! Espèce de côônard, qui roule à 120, dans le tunnel du Vieux Port !!! Si c’est pas un côônard ! » Comme je lui fais remarquer que lui-même roule à 110, il me répond, dans un grand sourire : « C’est que moi aussi, je suis un côônard ! »

Et bien moi aussi, je suis un côônard qui va voir les films de Tarantino.




dimanche 20 janvier 2013


Arletty
posté par Professor Ludovico dans [ Hollywood Gossip -Les gens ]

J’ai toujours aimé Arletty. Aussi loin que je me souvienne, c’est à dire vers 15 ans, quand j’ai découvert la gouaille de Loulou dans Fric Frac*, la colère rentrée de Raymonde dans Hôtel du Nord**, et évidemment, la sincérité triste de Garance dans Les Enfants du Paradis***.

Je viens de lire son autoportrait, judicieusement baptisée La Défense (elle est née à Courbevoie, comme son ami Céline), et je l’aime encore plus. Représentante éternelle de la petite française type, pas forcément très belle, mais charmante, marrante, et pas la langue dans la poche. L’esprit – et la séduction – à la française.

Dans son livre, elle ne cache rien, ni la semi-prostitution des débuts, ni ses démarrages peu glorieux dans le mannequinat****, les revues comiques, le cabaret, et le théâtre populaire. Où, au passage, les textes étaient très osés, pleins de sous-entendus.

Arletty ne cherche pas à embellir la réalité (elle n’a pas été gentille avec tout le monde), ni à éluder ses problèmes à la Libération***** : elle avait pour amant un officier allemand, et a toujours affiché son mépris (même après) pour De Gaulle, et ses collègues comédiens qui avaient fui la France et revenaient comme « résistants ».

On ressort de cette confession, à la fois peu écrite (des bouts de phrase, façon Céline) mais finalement très littéraire, avec l’impression d’avoir accompagné une femme dans une trajectoire de vie, de la petite fille espiègle à la jeune femme séduisante, de la femme de pouvoir à la vieille dame indigne.

La vie d’Arlette ferait un formidable biopic. Et, surtout, les dialogues seraient de Jeanson.

Arletty
La défense, autoportrait
Editions Ramsay cinema

* « Vous nous prenez pour des caves ! »
** « Atmosphère ! Atmosphère ? Est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ??? »
*** « C’est tellement simple, l’amour »
**** On offrait déjà moult cadeaux aux actrices (on dirait sponsoring aujourd’hui)
***** « Comment vous sentez vous ? » lui demande-t-on en prison. Elle répond : « Pas très résistante. »




vendredi 18 janvier 2013


Petit Eloge de Martin Winckler
posté par Professor Ludovico dans [ Les gens -Séries TV ]

C’est un tout petit livre, mais si vous avez des préjugés contre les séries, c’est le livre qu’il faut lire. En même temps, si vous avez des préjugés contre les séries, vous n’êtes probablement pas en train de lire cette chronique.

Dans son Petit Eloge des Séries, Martin Winckler nous apprend tout ce qu’il faut savoir pour regarder une série : pourquoi une sitcom ne se regarde qu’en VO*, pourquoi il ne faut jamais suivre une série sur TF1** ou sur France2***, a fortiori si c’est un chef d’œuvre****, et pourquoi, finalement, le téléchargement est justifiable.

Martin Winckler est un vrai fan, il possède une culture encyclopédique, et a un vrai sens de la pédagogie. Son Petit Eloge, en plus d’être une porte d’entrée vers les séries américaines, est, comme son nom l’indique, une réhabilitation du genre. « Psyché de la société », « Miroir de notre vie », Winckler échafaude, en quelques pages, une théorie de la fiction comme réparatrice, ou consolatrice, de l’âme. Là où le héros d’un film vous accompagne deux heures, le héros d’un roman, deux semaines, le héros d’une série vous accompagne des années ; il grandit, et vieillit avec vous. Il partage vos joies, vos peines, vos hésitations, vos dilemmes. C’est pourquoi il est si triste de les quitter.

Une lecture salutaire, pour deux euros seulement.




mercredi 16 janvier 2013


Le Silence des Agneaux
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Les grands films ne meurent jamais. Les grands acteurs non plus. Je suis tombé sur Le Silence des Agneaux, j’ai voulu regarder la scène culte (la rencontre avec Hannibal Lecter), et évidemment, je suis resté jusqu’au bout.

Pour une raison simple : Le Silence des Agneaux est a priori une série B (un shocker destiné aux teenagers à pop corn du samedi soir*), magnifiée en chef d’œuvre par un bon réalisateur (Jonathan Demme) mais surtout par son casting A-list : Jodie Foster et Anthony Hopkins. C’est eux qui tiennent le film, c’est eux qui en font une œuvre, qui transforment le monstre en être humain (à certains moments, aussi incroyable que cela puisse paraître, on est avec lui, contre le docteur qui le garde) et l’apprentie G-Man en personnage de chair et d’os, avec passé et fêlures. Jodie Foster est évidemment parfaite dans ce genre de rôle.

A côté, l’intrigue marche toujours, et elle est fort bien gérée par Demme (la scène de l’ascenseur, ou le double assaut) qui procurent l’effroi sous toutes ses formes : psychologique face à Lecter, ou physique dans l’ultime face à face avec le Tueur au Papillon.

A regarder à nouveau, de préférence en plein jour …

* Les suites (Dragon rouge, Hannibal et Hannibal Lecter : Les Origines du Mal), sont d’ailleurs retournées à cet état initial.




lundi 14 janvier 2013


The Master
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Depuis Boogie Nights et Magnolia, les deux films extraordinaires qui le propulsèrent au sommet artistique d’Hollywood, Paul Thomas Anderson n’a cessé de nous proposer un cinéma certes brillant, mais âpre au goût.

Et c’est dommage.

Si Boogie Nights était un film passionnément humain, Magnolia une découpe chorale de la famille américaine, Punch Drunk Love marque le début d’un cinéma andersonien « de l’art pour l’art » : une comédie romantique peu drôle et peu romantique. There Will Be Blood est l’achèvement arty de ce procédé, avec un chef d’œuvre graphique, aride comme un coup de trique.

Il en va de même pour The Master.

Paul Thomas Anderson a énormément de talent, ça se voit. Il travaille beaucoup, ça se voit aussi. Mais son cinéma, sans aucune empathie envers ses personnages, sans la moindre concession au storytelling, reste quelque chose de glaçant : on regarde, on est fascinés, mais on ne ressent rien.

Paul Thomas Anderson n’est pas le premier cinéaste démiurge, plongé dans une œuvre plus grande que lui. Il n’est pas le premier à contempler l’humanité sous un microscope aseptisé, mais même Welles, Altman, Malick, Bergman se raccrochent à un personnage, à une histoire.

Et il y a matière, dans The Master. À commencer par ce personnage à la dérive, dans lequel Joaquin Phoenix a mis tout son talent et peut-être toute son âme. Philip Seymour Hoffman, (le Lancaster Dodd scientologue) délivre une performance peut-être encore plus extraordinaire, car moins outrée. Dans la double fascination des deux, la séduction physique de l’un, la séduction morale de l’autre, il y avait sûrement matière à s’apitoyer un peu sur ce matériau humain qu’Anderson étale devant nous. Car le reste est très pédagogue : méthodes d’endoctrinement, manipulations psychologiques, le scénariste-réalisateur a travaillé son réquisitoire.

Mais pourtant, Paul Thomas Anderson ne lâche rien. Au contraire, il étale ses plans virtuoses, impeccablement éclairés et filmés, et grave des images inoubliables : le bateau sous le Golden Gate Bridge, la Moto dans le Désert, viendront rejoindre quelque part dans notre cerveau le Piano qui Tombe de Punch Drunk Love, les Derricks en flammes de There Will Be Blood, les Grenouilles de Magnolia. Tout comme les performances d’acteurs, servi par des plans séquences étourdissants. Paul Thomas Anderson n’aime pas truquer, il ne coupe rien, impose, comme on le verra « de ne pas cligner des yeux » ; ses comédiens sont donc lancés dans le vide à 200 à l’heure, comme le funambule entre les deux tours du World Trade Center.

The Master est incroyablement beau, fascinant, bien vu sur les dérives sectaires, mais ne parle qu’à notre cerveau.




dimanche 13 janvier 2013


Une Femme Disparaît
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films -Les gens ]

Le Professore n’est pas devenu snob, il est snob.

Aux alentours de 1983, une grande rétrospective Hitchcock enflamma Paris. Le Professore, jeune Rastignac beauceron, venait de monter à Paris pour mener les brillantes études que l’on sait. Reclus dans un cul de basse fosse à Malakoff, terrifié par les dangers de la capitale, il engloutissait l’essentiel de son maigre budget dans les salles de cinéma. Mais cet engouement pour un cinéaste populaire était plus que suspect à ses yeux. Que la multitude communie ainsi, de façon si œcuménique, sur La Mort Aux Trousses, Rebecca, ou Vertigo , le répugnait au plus haut point.

Un an plus tard, la MJC de Malakoff proposa elle aussi ce cycle Hitchcock, au modique tarif de 5F la place. Le sang beauceron de Ludovico ne fit qu’un tour : à ce prix-là, vingt dieux, on pouvait bien se damner pour un Hitchcock.

Ce film, c’était Une Femme Disparaît.

Dès lors, le Professore entreprit son chemin de Damas. Rétrospective complète, Ciné-Club avec Claude-Jean Philippe (sur Antenne 2 le samedi soir) ou Cinéma de Minuit, sur FR3, avec la douce de voix de Patrick Brion le dimanche soir, le but étant de voir les 53 Hitch possibles. Ainsi paré, il restait à lire la Bible (« Hitchcock/Truffaut ») conseillé par elBaba. Lecture indispensable à tout cinéphile, même si on ne s’intéresse pas à Hitchcock. Car ce livre dit tout ce qu’il faut savoir sur le cinéma, de la direction des actrices blondes à l’impossibilité d’adapter des Agatha Christie, en passant par la définition du célèbre McGuffin*.

Bref, j’ai revu hier Une Femme Disparaît, et c’est effectivement une bonne façon de commencer chez Hitch : tout y est, en mode léger. C’est une comédie, un film d’espionnage, un thriller, et on ne s’y ennuie jamais.

Pourtant ça commence très doucement : un hôtel dans les Balkans, bondé à cause d’une avalanche qui retarde un train. Cette première nuit inconfortable permet à Hitch d’installer ses personnages, sans placer pourtant l’enjeu principal : une jeune fille va se marier, un couple illégitime se dispute, deux anglais crypto-gays sont des obsédés de cricket, un musicien dilettante, pénible et charmeur, ennuie la future mariée et une vieille dame sympathique passionnée de musique folklorique.

C’est elle qui va disparaître, et la future mariée qui va s’en inquiéter. Après avoir débuté sur ce mode comique, Hitch change de ton. Bizarrement, et contre toute apparence, on accuse Iris (la jeune mariée) d’être mentalement dérangée. Non, elle n’était pas accompagnée d’une vieille dame dans le train, non, elle n’a pas pris le thé avec elle. Le scénario joue alors à la perfection de l’empathie que nous avons nouée avec ce personnage ; nous somme les seuls, semble-t-il, à croire Iris… Un principe qui sera repris dans les grandes lignes, et aussi dans les détails (le nom sur la vitre) dans FlightPlan, avec Jodie Foster.

La mise en place du début, qui peut sembler longuette, se révèle alors diablement efficace : les obsédés de cricket se taisent car ils ne veulent pas retarder le train, la maîtresse illégitime ment, car elle veut faire divorcer son amant. Et une TSI** commence à naître entre la future mariée et le musicien encombrant, modèle inusable de la comédie, associant la pimbêche et le fâcheux.

A la fin, chacun aura néanmoins révélé son vrai caractère : les anglais seront courageux dans l’adversité, l’amant, un vrai lâche, et le dilettante, un vrai courageux.

Outre le talent d’Hitchcock à bâtir une histoire passionnante autour d’un argument aussi mince, Une Femme Disparaît a plein d’atouts dans sa poche : une ambiance sexy (la scène des jambes, les actrices girondes, les sous-entendus sexuels, future marque de fabrique hitchcockienne), un humour très british (Une Femme Disparaît est le dernier film anglais de Sir Alfred), le tout dans une grande économie de moyens « Nous avons tout tourné dans un studio de 90 pieds », déclare-t-il à Truffaut.

Une Femme Disparaît possède aussi un troublant sous texte, pour un film de 1939 : condamnation du « pacifisme idiot » de l’avocat, américains écervelés et anglais tétanisés par le cricket, tandis que des pays d’Europe centrale sont au bord de la guerre. Une paix qui sera sauvée par un artiste : le musicien polyglotte et cultivé, tout un symbole.

Si vous ne connaissez pas Hitchcock, l’entrée est donc par ici, dans une gare perdue du Bandrika, au coeur des Balkans…

*Le McGuffin, est selon Hitch « un truc très important pour les personnages, mais pas du tout pour moi, le narrateur » (p.111 du Hitchcok/Truffaut). Dans Une Femme Disparaît, c’est le message secret que doit convoyer la vieille dame (on ne saura jamais ce que ce message contenait (et on s’en fout), mais les personnages se battent pour lui, et ça, c’est intéressant.


** Tension Sexuelle Irrésolue : quand un homme et une femme se désirent, mais du fait de l’intrigue, ne peuvent conclure : Mulder et Scully en sont le plus vibrant exemple




jeudi 10 janvier 2013


Avoir une idée… Et la réaliser
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... ]

En ce moment, sur les écrans, il y a un film qui a plagié le Professore. Si. Si. Il s’agit De l’Autre Cóté du Periph’, avec Omar Sy et Laurent Laffitte. Deux flics que tout oppose (classe sociale, style, méthodes) mais qui coopèrent malgré leurs différences, nous avons eu cette idée avec l’ami A.G. dans les années 90, et nous nous voyions bien, avouons-le, dans les premiers rôles.

Tout ça pour dire qu’il ne suffit pas d’avoir une idée. Il faut, comme disait Kubrick, l’incarner, et c’est ça qui est difficile. Tout le monde a des idées, et même des idées géniales. Mais l’art, ce n’est pas que de l’inspiration : c’est avant tout du travail, beaucoup de travail, et aussi de la chance. Et de la persévérance.

Prenons les Rolling Stones. Avaient-ils plus d’inspiration que les autres groupes de blues en 61-62 ? Sûrement pas. Ils étaient une pelletée à l’époque, à s’acharner sur les standards de Jimmy Reed et Muddy Waters, et à tourner autour du même mentor, Alexis Korner. Alors qu’avaient de plus Jagger/Richards ? Si ce n’est une terrible envie de réussir ? Et la peur de se faire virer par celui qui avait plus de talent qu’eux : Brian Jones ?

Pour compenser, ils ont travaillé dur. Et ils ont eu un peu de chance, il en faut dans ce métier. Selon le joli mot de Jagger, il y avait un groupe au Nord (les Beatles), et il fallait un groupe au Sud. Ce furent eux, les Rolling Stones. Quant à Brian Jones, qui avait tant de talent, il se dispersa, ne travailla pas assez, n’avait pas suffisamment envie : son exclusion du groupe par les deux autres carriéristes était inéluctable.

Pour revenir au Periph’, il eut sûrement fallu un peu de chance au Professore et à son compère, mais surtout, il aurait fallu travailler, beaucoup, et et de l’obstination pour ne pas se faire « piquer » l’idée de De l’Autre Cóté du Periph’.




dimanche 6 janvier 2013


Le Hobbit : Un Voyage Inattendu
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Un voyage inattendu, en effet.

Depuis que les Tolkienolâtres ont entamé ce périple en terre du milieu avec le Roi Sorcier Jackson, la route n’a pas été des plus paisibles. Récit speedé aux amphétamines, elfes teints en blonds, nains ridiculisés, et narration façon Blake & Mortimer (« La Bataille Commence ! ») : il n’y avait pas que du bon dans la tarte Hobbite néo-zélandaise. Mais il y en avait quand même. Quelques acteurs pleins de grâce (Frodon, Sam, Faramir…), une réussite incontestable (Gollum), et un final qui donne encore des frissons dans le dos.

Aussi, quand nous apprîmes que Le Hobbit était en chantier, aucune surprise n’était plus envisageable. Jackson s’était emparé de l’Anneau Unique Hollywoodien, celui qui les gouvernait tous : le pognon ! Transformer un gentil conte de fée de 300 pages en trois épisodes de trois heures, c’était osé, quand on avait synthétisé 1000 pages dans le même format. Mais cela répondait à une vraie logique du business : quand on a dans les mains une aussi belle franchise, on n’allait pas la gâcher en 2h30…

Pourtant, l’histoire du Hobbit est simple. Si Le Seigneur des Anneaux – le livre – est une grande fresque, ambitieuse et mature, Bilbo Le Hobbit est une aventure pour enfants sans grande prétention, même très réussie. L’aventure d’un hobbit dans la Terre du Milieu, des nains, un trésor, un dragon, un mystérieux anneau… Aller et retour, et c’est fini.

Faire trois épisodes, c’était forcément ajouter, rajouter… pour faire vendre des figurines de Legolas ou d’Aragorn, même pas dans le livre, des posters de cités naines, des jeux vidéo. Bref, trahir à nouveau le texte pastoral de JRR Tolkien.

Tout à son mépris, le Professore était sur le point de commettre une grave erreur, une erreur ontologique même. Car en vérité, on ne peut pas reprocher à Peter Jackson deux choses à la fois. D’avoir accéléré le bouzin Seigneur des Anneaux et, en même temps, lui reprocher de prendre son temps avec Le Hobbit.

Car c’est tellement rare, un cinéaste qui prend son temps. Ce qui fait du début du Hobbit un moment très agréable, bien mieux réussi que le début de la trilogie, tout en respectant pourtant le même canevas : installation de la méta intrigue (la guerre au royaume des nains), de nouveaux personnages (Bilbo jeune, la compagnie naine de Thorin) rencontrant des anciens (Gandalf), et le développement de l’intrigue même du film…

Le tout est bien amené, bien joué, dans un calme peu fréquent chez Peter Jackson. Une heure où l’on esquisse tranquillement les personnages, avec toutes les subtilités possibles. Ainsi le jeune Bilbo est crédible en hobbit velléitaire, emmené dans une aventure trop grande pour lui. Et en face, les inquiétudes de Gandalf, ou les doutes du chef nain (joué avec subtilité par Richard Armitage, malgré un maquillage catastrophique). Ce temps d’installation sera évidemment payant au final, car ces personnages, confortablement installés dans cette première heure, auront toute une gamme de sentiments à mettre en valeur pendant les deux heures qui suivent.

Après, évidemment, ça se gâte, et on a un peu le sentiment de suivre une immense et interminable cinématique de jeu vidéo. L’image de synthèse permet de tout faire, ce n’est pas une raison pour le faire ! La montagne des Gobelins, sorte d’hommage dérisoire aux mines indiennes d’Indiana Jones et le Temple Maudit, sort des rails au bout de 30 secondes. Le Profanateur Orc, arch-ennemi de ce premier épisode est lui aussi particulièrement caricatural et raté. La direction artistique est souvent catastrophique (les elfes, les nains…), ou irréaliste (les cités gobelines). Tout est propre, voire propret. Il faut éviter de regarder Game of Thrones avant, sinon ça pique les yeux.

On sent aussi le besoin de Saroumane Jackson de payer son hommage à Sauron-Warner Bros : les scènes inutiles de bataille vont donc s’enchaîner (même si elles sont globalement mieux filmés que celles de la trilogie). Les rebondissements aussi : chutes, précipices, embuscades, rien n’est oublié, mais finalement, cela ne suffit pas à entamer notre enthousiasme.

Probablement parce que, contrairement au Seigneur des Anneaux, on accepte ces facilités dans un conte de fée ? Chez ce Hobbit, on est dans un film pour enfants, façon Harry Potter ou Narnia, plutôt que dans une grande fresque épique censée s’adresser aux adultes, et évoquer la tentation du pouvoir, le courage des hommes, ou les ravages de la guerre…

Ensuite parce que cette première partie finit en beauté, avec le retour d’un vieil ami : Gollum, impérial comme toujours. Les conseils de Gandalf, la personnalité de Bilbo, si détaillée depuis le début, prendront alors toute leur saveur dans ce premier affrontement.

On ira donc volontiers voir les deux suivants, parce l’on accepte ces images d’un cinéma finalement désuet ; nous voilà revenus, finalement, au cinéma des années cinquante, avec John Wayne évoluant dans le carton-pâte d’un décor de studio, tandis qu’on projette sur un fond bleu des images de Monument Valley.

Un cinéma purement hollywoodien dans la pire et la meilleure acception du terme, ni plus, ni moins.




samedi 5 janvier 2013


Argo
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Il y a plein de raisons de rater un film au cinéma : être de mauvais poil, avoir été bassiné par ses potes pour aller voir Argo, la sensation du mois de novembre, ou avoir une voisine bruyante.

Ou un peu des trois.

Mettons tout de suite les choses au point : Argo est un bon film, même un très bon film. Bien écrit, bien joué, il y a même ma petite chérie de The Faculty, Clea DuVall.

Mais ça n’a pas suffit à m’attendrir. Je me suis un peu ennuyé à Argo. Parce que tout simplement, il n’y a pas d’enjeu. On sait ce qui va se passer : les otages vont être libérés à la fin, le sujet du film c’est comment.

Et le comment, c’est quelque chose dont on se fout au cinéma.