À l’issue de Stade Français-Stade Toulousain, défaite 21-27, Jean-Bouin a fait retentir les accords mineurs de la chanson de Queen, The show must go on.
Dans un match que le Stade Français ne pouvait pas (et ne devait jamais se permettre) de perdre, a fortiori contre l’équipe Z de Toulouse, on indiquait au supporter parisien ce qu’il devait en penser : une défaite triste, oui, mais le spectacle continue…
Voilà que le sport est devenu : un show comme les autres. Ce qu’il n’est pas, évidemment. Son idiosyncrasie, c’est de rester imprévisible, insaisissable, et non scripté. Personne ne pouvait prévoir, la même semaine à Old Trafford, l’incroyable 2-4 devenu 5-4 en douze minutes pour Manchester United contre l’Olympique Lyonnais. Si l’on mettait autant de rebondissements dans un film ou dans une pièce, cela serait particulièrement ridicule, mais ici, That’s football, le spectacle capable des plus incroyables rebondissements de dernière minute.
Aussi, prendre les codes du spectacle, de l’Entertainment, pour les appliquer au sport est une erreur tragique. Le sport vit de cette imprévisibilité, qui n’a nul besoin d’être souligné par quelconque feu d’artifice, jingle, ou Pompom girls. Le public réagit, et cela suffit.
C’est malheureusement aussi une tendance dans le cinéma. Spielberg dit qu’un bon film pourrait se comprendre muet, sans dialogue ni musique. Un film comme Dune indiquera pourtant, avec force accents Zimmeriens, ce qu’il faut ressentir : la Peur, le Mystère, l’Amour. C’est aussi le cas des dialogues, qui surexpliquent l’intrigue. Un article récent signalait d’ailleurs l’explosion des sous-titres aux Etats-Unis, le pays où ils n’existaient tout simplement pas, faute de VO. Sur leur plateforme de streaming préféré, les spectateurs américains affichent désormais les sous-titres, pour mieux comprendre l’action.
Il devient d’autant plus simple de distinguer les grands films, les grandes séries, à ce qu’elles laissent une part, volontairement incompréhensible, à la sagacité du spectateur. Fargo, Succession et leurs dialogues qui ne veulent rien dire, sauf à montrer l’imbécillité des personnages et leur vacuité. Ou au contraire l’absence de dialogues, qui laisse le cerveau tirer lui-même ses conclusions, comme dans la scène finale de Lincoln, ou celles d’Adolescence.
Adolescence ? Justement, on y vient…
