vendredi 12 février 2016


Under the Skin
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Pourquoi Scarlett Johansson fascine-t-elle autant les cinéastes ? Elle est très belle, bien sûr. Mais sa beauté est légèrement étrange, pas totalement dans les canons classiques de la beauté hollywoodienne du modèle mondial (Jennifer Lawrence, Anne Hathaway, au hasard).

C’est surtout, on peut le penser, l’extrême plasticité de Scarlett Johansson qui en fait un rêve de metteur en scène. Capable d’une beauté éclatante (la Kay Lake du Dahlia Noir chez de Palma), ou plus modeste, plus vulgaire, de la fille d’à côté chez Joseph Gordon-Levitt (Don Jon), ou encore d’incarner fantasme redhead absolu : La Veuve Noire des Avengers.

D’où vient que bien souvent, l’on a vu Mrs Johansson errer à tous les étages de la maison cinéma ; le blockbuster à haut degré d’octane (Avengers, The Island, Lucy), le cinéma indépendant top crédibilité (Lost in translation, Her, The Barber), la romcom (Ce que Pensent les Hommes, Nouveau départ, #Chef), sans oublier (deux fois) l’inévitable passage chez Woody Allen où elle était parfaite en fille légèrement pompette (Match Point), l’un des meilleurs crus récents du cinéaste newyorkais.

Ici, dans Under the Skin, (la même année que Lucy !) Scarlett Johansson se met à nu, physiquement et moralement.

En n’ayant pas l’air de faire grand’chose : simplement promener ce visage d’habitude si souriant, et cette fois-ci énigmatique, voire terrifiant, et sa coupe de cheveux brune, dans les causses désertiques des Highlands ou dans un Glasgow surpeuplé.

Adapté du livre de Michel Faber, Under the Skin est une histoire de chasse. Une extraterrestre séduit les hommes et les tue. Il n’y a pas d’autre histoire. Tout est dans le traitement de cette idée basique. Que peut penser un alien dans un corps de femme qui tue sans morale tout ce qui tombe à sa portée ? Et qui essaie de comprendre ce corps, cette planète et ces insectes qui rampent à sa surface ? Cette inquiétante étrangeté trouve un réceptacle parfait dans le visage impassible de Scarlett Johansson.

Si le thème a souvent été traité, des Envahisseurs à Predator, c’est la première fois qu’un film s’y attelle de façon sérieuse et artistique. Placé sous le haut patronage de 2001 et de David Lynch, le film est une extraordinaire performance artistique. Beaucoup ont invoqué les mânes de Kubrick et de Lynch, peu ont atteint les maîtres. Mais ici tout est parfait, à commencer par la photographie qui est capable de passer du reportage de rue à l’expérimentation graphique pure, et servi par une musique entêtante, étrange elle-même, parfait support des émotions – si jamais elle en a – de l’alien Scarlett Johansson.