vendredi 23 mai 2008


Indiana Jones et le Royaume de Crâne de Cristal
posté par Professor Ludovico dans [ Les films ]

Difficile de dire du mal d’un film qui nous a bien fait rire ! Le plus simple, c’est peut-être de dire la vérité : Indiana Jones et le Royaume de Crâne de Cristal est un mauvais film. Les bons moments (nombreux) qu’on y passe ne sont que le reflet, en creux, de nos vertes années de l’Arche perdue. Et comment se résoudre que cette Arche (notre jeunesse à tous) soit perdue à tout jamais ? Indy IV gère intelligemment ce patrimoine, en le déclinant à chaque plan : clins d’œil, répliques culte, scènes identiques aux trois précédents opus (poursuite, piège, insectes, reptiles)…

Mais bon, tout ça ne fait pas un film. Le scénario est indigeste, incompréhensible. Malgré trois ou quatre versions du scénario, (qu’on imagine pires !), on voit bien que David Koepp (l’un des grands manitous du scénario US (Spider Man, Panic Room, Jurassic park, Snake Eyes, L’Impasse)) ne sait pas quoi faire d’Indy, des russkoffs, de la zone 51 et de ses extraterrestres mayas.

Il y avait de quoi faire pourtant. Le film propose même des piste intéressantes :

– Il y a d’abord un film sur le temps qui passe, l’âge, la maturité. David Koepp l’esquisse, puis finit quand même par retomber dans l’équation « coup de poing + cascade » qui peut passer quand le Dr Jones a quarante ans, pas quand il en a soixante.
– Il y ensuite un film politique : la Guerre Froide, le Maccarthysme, c’est même la partie la plus intéressante du film, une partie presque noire et désespérée. Mais encore une fois, le film retombe sur ses pattes.
– Il y a enfin le côté pulp, à la Captain Sky et le Monde de Demain, qui est LE fonds de commerce d’Indy depuis toujours, et qui aurait bien sonné bien avec l’espionne russe, son look bondage, rapière à la ceinture. Mais là aussi, on ne pousse pas cette logique jusqu’au bout.

Car ces alternatives ne peuvent mener qu’à des impasses, car elles sont inenvisageables dans le business plan d’Indiana Jones. Tout est fait pour que le film marche, qu’il ne déçoive pas les fans de la franchise : c’est parce qu’on veut tellement que ça marche que ça ne marche pas ! On voudrait retrouver la magie, et donc, elle disparait.

Pire, ce qu’il y a de terrible dans cet échec, c’est qu’il finit par révéler la faiblesse ontologique d’Indiana Jones, sa pitoyable recette de cuisine depuis 25 ans : poursuite+ romance + squelettes + trésors + énigmes… Ça…. Et seulement ça ! Essentiellement, la franchise reposait sur le charisme ravageur d’Harrison Ford. Il faut bien avouer que cette partie-là a disparu : le sourire en coin est essoufflé, ses cascades sont ridicules, et pire, c’est que l’on voit bien qu’il s’ennuie !! On aurait pu jouer sur la passation de pouvoir à Shia LeBeouf, comme avait si bien réussi le duo Sean Connery-Harrison Ford du troisième épisode, mais là aussi, ce n’est qu’esquissé. On pense alors aux James Bond de trop (Jamais plus Jamais, A View to a Kill), aux John Wayne de trop (Les Bérets Verts), aux Burton de trop (Les Noces funèbres)…

Dans ces circonstances (scénar indigent, acteurs peu convaincus, producteur (Lucas) aux abonnés absents, on laisse le film aux mains de cet enfant farceur qu’est Steven Spielberg. Et là, gare à la porcelaine ! Il fait littéralement joujou avec le film, le triturant dans tous les sens, pour le meilleur (la zone 51) et pour le pire (le reste du film)… Donc soit vous êtes fan de la franchise, et vous pouvez y aller, vous passerez un bon moment. Si vous êtes juste cinéphile, passez votre chemin…