mercredi 14 janvier 2009


Papy Fait de la Résistance
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Brèves de bobines -Les films ]

Excellent contrepoint à Verdun, dans le genre déboulonnage des mythes éternels de la France combattante, Papy Fait de la Résistance reste le chef d’œuvre comique cinématographique du Splendid, avec Le Père Noël est une Ordure. S’il a moins marqué l’inconscient collectif de ses phrases cultes (« C’est cela, oui ! »), Papy Fait de la Résistance fait un sort à tous les films de guerre des années 60-70, et règle ses comptes au mythe gaullien de la France « libérée par elle-même ».

Il nous offre aussi un casting à son top, qui malheureusement, ne fera jamais mieux. Clavier, immense comique s’il n’était tombé dans sa propre caricature, fait le portrait parfait du petit français sous Vichy (courageux mais pas téméraire), qui niquerait bien la petite Pauline Lafont, mais est obligé de se rabattre sur la sœur frigide (Lavanant à son top). On pourrait disserter ainsi à l’infini (Maillan et Galabru parfaits, Lhermitte excellent, Giraud-Villeret, rois de la Grosse Komedie).

A vérifier par vous-mêmes, mais 20 ans après, Papy Fait toujours de la Résistance !




mercredi 14 janvier 2009


Verdun
posté par Professor Ludovico dans [ Le Professor a toujours quelque chose à dire... ]

En regardant récemment une docu-fiction scopée sur Arte et consacré à la bataille de Verdun, je me suis fait la réflexion habituelle : « Mais bon sang de bonsoir, va-t-on supporter ces fadaises encore longtemps ? N’ont-ils pas lu Céline, Jünger, ou Genevoix ? »

L’objet de cette colère, c’est l’habituel rengaine sur la Guerre de 14, la Boucherie-Voulue-par-les-Généraux-mais-que-les-Malheureux-Soldats-ne-Voulaient-Pas.

Rappelons pour l’anecdote, qu’Ernst Jünger tricha sur son âge pour s’engager, et blessé quatorze fois (vous avez bien lu), exigea de retourner à chaque fois au Front. Ce n’est pas nier la boucherie et l’incompétence des généraux que de rappeler le fanatisme patriotique, l’esprit revanchard qui habitait les soldats, mais aussi l’Arrière.

Mais non, le cinéma est plus fort que tout. Quand on fait œuvre de tâcheron, on s’inspire forcement des grands maîtres pour réaliser son petit bousin. Ainsi, malgré l’antimilitarisme de rigueur, les auteurs cèdent aux sirènes du film de guerre : jolis travelling latéraux, explosions, sang qui gicle et tutti quanti. Et surtout, les roulements de tambour, un par minute. Ça fait toujours son petit effet.

Dommage, car le « film » recèle quelques pépites, comme des images rares de « trembleurs », ces soldats tellement affectés par les combats qu’ils ne pouvaient plus contrôler leurs nerfs.

On aurait pu nous dispenser des reconstitutions aseptisées façon « Un Long dimanche de Fiançailles », car il y a beaucoup à dire sur Verdun : l’enthousiasme malsain de l’Arrière, la stratégie gagnante de Pétain, les erreurs de Falkenhayn, qui ne sont qu’effleurées ici.

On peut se moquer des images d’Epinal de nos Grands-parents, mais en voici une belle.




mercredi 14 janvier 2009


Adieu Berri, on t’aimait bien…
posté par Professor Ludovico dans [ Les gens ]

Bon, on va pas faire notre Libé, qui a consciencieusement éreinté Berri ces quinze dernières années, avec beaucoup de talent et beaucoup de méchanceté.

Mais Berri, c’était ça, un des grands producteurs mondiaux, et un patron du cinéma français. Le seul qui pouvait monter Germinal, ou Uranus. Le seul aussi qui pouvait réaliser l’improbable carton critique (La Graine et le Mulet) et financier (Bienvenue chez les Ch’tis) la même année.

C’était aussi un bon réalisateur (Tchao Pantin, Un Moment d’Egarement), scénariste, et acteur. Un peu bougon et ridicule, quand il exigea un droit de réponse pour une critique déplaisante, sans parler des menaces diverses, et la mauvaise habitude de ne pas montrer ses films à certains journaux.

Mais bon, des moguls comme ça, on n’en a pas beaucoup. Adieu Berri, on t’aimait bien…




mercredi 14 janvier 2009


Le Diable S’Habille en Prada
posté par Professor Ludovico dans [ A votre VOD -Les films ]

Incarnation des ambiguïtés américaines, Le Diable S’Habille en Prada nous endort, tout en proposant des interrogations intéressantes.

Paradoxe américain, qui vénère le fric mais hait l’idée même de classe sociale. Le patron et l’ouvrier mangent des burgers en matant Jim Carey à la Télé, confortables dans leur vieux T-shirt Gap.

A part Sex and the City, qui assume une fascination fashion, (mais bon, on est à New York), la mode reste une cible de choix du cinéma américain, comme dans Prêt à Porter de Robert Altman, ou Ugly Betty. Un personnage bien fringué, à la mode, c’est souvent le méchant de l’histoire. On se rappelle cet acteur préférant les rôles de bad guys, « mieux habillés » que les autres.

Le Diable S’Habille en Prada improvise donc sur cette même gamme, opposant Andy Sachs (Anne Hathaway), decent american girl, petite brunette mal habillée, à sa nouvelle patronne, la terrifiante virago de la mode Miranda Priestly (Meryl Streep). Andy veut devenir journaliste, et elle est entourée d’un parfait casting de copains (boyfriend au look arabisant (Adrian Grenier, héros de Entourage), et aussi d’un gros et d’une copine noire). Des copains qui n’hésiteront pas à remettre notre working girl dans le droit chemin, ce qui, vous l’avez deviné, finira par arriver.

L’histoire du Diable… serait donc parfaitement ennuyeuse, calqué sur le schéma biblique corruption/rédemption chère à nos amis américains, si un peu d’acide ne venait apporter un peu d’intérêt.

Car après 60 minutes de pilonnage serré sur la vanité et la supercialité (waouh ! la révélation !), surgit un plaidoyer aussi inattendu qu’un gag drôle au milieu de Bienvenue chez les Ch’tis. Un plaidoyer pédagogique, qui part du pull informe de Mlle Hathaway, un pull bleu « céruléen », selon Miranda… Et la Streep d’expliquer, cruellement, cliniquement, d’où vient ce bleu « céruléen ». Ce pull que notre héroïne croit avoir acheté, « par hasard, un jour de soldes dans le magasin du quartier pourri où vous habitez* », vient de bien plus loin. Qu’il y a un créateur qui a décidé ce bleu, que ce bleu est devenu tendance, puis s’est retrouvé dans le prêt-à-porter, etc. Et que nous sommes tous, un jour où l’autre, créatures de mode.

A partir de ce moment là, le film prend une autre tournure, rend le personnage de Miranda plus attachant, (et révèle concomitamment de sombres aspects de certains personnages apparemment sympathiques). Voilà Le Diable… brusquement plus intéressant. On n’échappera pas à la happy end de rigueur, mais avec une petite touche de nostalgie qui donne un joli bonus final au film.

« This… ‘stuff’? Oh… ok. I see, you think this has nothing to do with you. You go to your closet and you select out, oh I don’t know, that lumpy blue sweater, for instance, because you’re trying to tell the world that you take yourself too seriously to care about what you put on your back. But what you don’t know is that that sweater is not just blue, it’s not turquoise, it’s not lapis, it’s actually cerulean. You’re also blithely unaware of the fact that in 2002, Oscar De La Renta did a collection of cerulean gowns. And then I think it was Yves St Laurent, wasn’t it, who showed cerulean military jackets? I think we need a jacket here. And then cerulean quickly showed up in the collections of 8 different designers. Then it filtered down through the department stores and then trickled on down into some tragic casual corner where you, no doubt, fished it out of some clearance bin. However, that blue represents millions of dollars and countless jobs and so it’s sort of comical how you think that you’ve made a choice that exempts you from the fashion industry when, in fact, you’re wearing the sweater that was selected for you by the people in this room. From a pile of stuff. »